Quand une voiture est dépossédée de ses poignées de porte au profit d'une simple sangle de tissu, c'est que ses artisans ont compris la maxime du regretté Colin Chapman voulant que « weight is the ennemy » («l'ennemi est le poids») dans la conception d'une automobile.

À plus forte raison, s'il s'agit d'une voiture destinée à fréquenter aussi bien la route qu'une piste de course telle la Porsche Cayman R, le coupé sport élaboré sur la plateforme du populaire roadster Boxster. Abandonnant luxe et confort au profit de performances suprêmes, la Cayman R n'a qu'un seul but : procurer à son conducteur un agrément de conduite insurpassable en offrant moins au lieu de toujours plus.

Car, en plus de ses poignées de porte remplacées par une tirette, cette Porsche se prive de radio, de climatisation et de porte-gobelets. Si vous insistez, on vous vendra en option un système d'air conditionné et une radio, mais le prix de base de 75 600 $ fait normalement abstraction de ces suppléments.   

On prend alors la direction inverse à celle du constructeur qui a grappillé des kilos ça et là en enlevant tout ce qui alourdit inutilement. C'est en effet le rapport poids puissance qui fait foi de tout. Dans le cas présent, il a été bonifié par la suppression de 55 kilos en tout. On a aussi laissé le moteur 6 cylindres à plat de 3,4 litres faire sa part en lui injectant 10 ch supplémentaires par rapport à une Cayman S.  Bien placé au centre de la voiture, il délivre 330 chevaux à 7400 tr/min, gérés par une boîte manuelle à 6 rapports ou encore, comme dans notre voiture d'essai, par la transmission PDK à double embrayage, ce qui équivaut à la présence de deux boîtes de vitesses placées à l'intérieur d'un même carter. La R bénéficie en outre d'une carrosserie abaissée de 20 mm, d'un différentiel à glissement limité et de jantes de 19 pouces allégées.

L'oeil exercé notera la présence de l'aileron fixe sur le hayon arrière et de sièges baquets sport à l'intérieur. Précisons que l'angle du dossier n'est pas réglable. Comme tape-à-l'oeil, rien ne bat toutefois le vibrant vert péridot (de la teinte d'une pierre semi-précieuse) dont la carrosserie de la voiture essayée était peinte.

Voilà pour le portrait statique de cette Cayman R s.t. Une 458 au tiers du prix   

De par leurs caractéristiques assez différentes, il est extrêmement rare que l'on puisse comparer une Porsche à une Ferrari. Or, la première impression que j'ai eue au volant de la Cayman R a été de me sentir au volant d'une Ferrari 458.

Regardant la route droit devant, sans me laisser distraire par la présentation intérieure, j'avais la sensation de rouler dans une sorte de 458 aux performances légèrement voilées. Et je me disais qu'au quart du prix de la diva italienne, on pouvait certes se satisfaire du déficit d'une seconde et trois dixièmes de sa comparse allemande au sprint entre 0 et 100 km/h (4,7 secondes contre 3,4) . Vrai que la Porsche n'a pas le panache de sa rivale, ni sa stridente sonorité, mais l'économie réalisée aux dépens de la Ferrari vous permettra de vous offrir une Mercedes-Benz SLS comme compagne de la Cayman R dans votre garage. Si le V8 italien est plus vibrant que le 6 cyl à plat de la Porsche, on ne voit pas une grande différence dans la vitesse d'exécution des deux transmissions robotisées. Les deux sont éblouissantes de rapidité. Seul petit bémol dans la Cayman R; il est facile de confondre les trop nombreux leviers sous le volant. Ainsi en voulant manipuler la palette de gauche pour changer de vitesses, j'ai aspergé le pare-brise d'eau. En mode tout automatique, la boîte PDK perd considérablement de son agrément, passant de 5 à 3 étoiles pour ceux qui aiment ce genre d'évaluation.

On se retrouve encore à égalité en matière de tenue de route et de freinage. Merveilleusement équilibrée, la Porsche reste campée sur ses pneus ultralarges dans les virages les plus serrés et son poids,restreint à 1080 kg, lui confère en tout temps une grande maniabilité.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

La Cayman R se reconnaît non seulement à sa couleur spéciale, mais aussi à son becquet fixe sur le hayon arrière.

Adieu confort

Le conducteur de la Cayman R devra cependant faire son deuil du confort que la voiture ne disperse qu'en très faible dose. Une suspension raide et des baquets pauvres en rembourrage ne sont pas pour les petites natures, pas plus d'ailleurs que pour les ventripotents qui auront beaucoup de mal à se glisser au volant.  

Bien que ce ne soit pas le but recherché, l'injection directe du moteur a permis d'abaisser d'environ 10 % la consommation d'essence, qui se chiffre à 8,5 litres aux 100 km contre 9,5 pour l'ancienne Cayman S.   

Il est clair que ce modèle de petite série est une opération de marketing comme seul Porsche en a le secret. La multiplication des « éditions spéciales » de la 911 dans sa dernière année sous sa forme actuelle en est un exemple frappant. Quelques ajouts ça et là, une petite dose de puissance supplémentaire, un nom évocateur,t un prix substantiellement plus élevé et une nouvelle Porsche est née. Dans le cas de la Cayman R cependant, l'approche est agréablement différente pour un acheteur en quête d'une voiture de tous les jours (oublions l'hiver) qui lui permettra de s'initier au sport automobile sur un circuit si le coeur lui en dit. Et par son comportement parfaitement aiguisé, la Cayman R lui facilitera la tâche.

Photo: Jacques Duval, collaboration spéciale

La Cayman R se drape d'un intérieur spécial avec un rappel de la couleur extérieure (vert péridot), des sièges baquets, une sangle rouge à la place des poignées de porte et quelques autres particularités.