Il y a des voitures qui ont marqué à leur façon l'histoire de l'automobile. Huit d'entre elles se retrouvent cette année au Salon de l'auto de Montréal, dans la salle des Légendes de la route. Appartenant toutes sans exception à des passionnés du Québec, elles sont l'objet de la télésérie du même nom, dont le premier épisode est diffusé ce soir sur la chaîne Historia. La Presse a rencontré deux de ces propriétaires de voitures de rêve.

BERNARD BELLAVANCE

Jaguar Type E 1964

Q La Jaguar Type E représente quoi, pour vous?

R C'est une icône. Une icône de la voiture GT des années 60, qui pouvait être considérée comme une grande routière, rapide, mais à un coût intéressant pour tout le monde. Elle affichait des performances supérieures aux Ferrari 250 GTO et Aston Martin DB5, mais à un coût bien inférieur à ces deux voitures-là.

Q Sans parler de sa ligne...

R La ligne est spéciale, en effet. La personne qui a fait le design de cette voiture est un aérodynamicien (NDLR: Malcolm Sayer) qui avait été embauché par Jaguar et qui venait du constructeur d'avion britannique De Havilland. C'est lui qui lui a donné cette ligne aérodynamique. Maintenant, j'ai lu quelque part que, dans un tunnel d'aérodynamique, la voiture n'était pas si performante que ça! Habituellement, c'est le propriétaire de Jaguar, William Lyons, qui mettait la touche finale au design des nouveaux modèles. Dans le cas de la Type E, il ne s'en serait mêlé que de très loin.

Q Vous conduisez souvent votre Jaguar, vous êtes même allé jusqu'à New York. Ça représente quoi pour vous d'être au volant d'une voiture comme celle-là?

R C'est une voiture avec une suspension indépendante aux quatre roues et des freins à disque aux quatre roues, ce qui n'était pas commun à l'époque. Quand on roule, on est à l'aise. Par exemple, quand on roule sur un passage à niveau, ça passe en douceur. Quand on fait un voyage de 500 ou 600 milles avec une Type E, on arrive à destination comme dans une voiture moderne, sans être fatigué. Par contre, dans mon cas, j'ai dû changer les bancs, parce que la banquette d'origine était mince comme du carton en plus d'être très droite. Mais avec des bancs Recaro, qui sont aussi d'époque, ça devient une voiture de rêve.

Q On a parlé technique. Mais qu'est-ce que l'on ressent quand on pilote une Type E?

R C'est exaltant. On monte dans la voiture pour aller chercher une pinte de lait au dépanneur, mais quand on revient, on décide d'y retourner pour aller chercher un pain. Parce qu'elle est plaisante à conduire. Que ce soit en ville ou sur la route. On n'a pas besoin d'avoir une radio, le simple son du moteur suffit.

Q Est-ce que l'on peut retrouver un sentiment semblable dans une voiture d'aujourd'hui?

R Il y a des voitures qui procurent un «feeling» semblable, une Porsche, par exemple, mais on dirait qu'on a perdu le contact entre le volant et la route. Elles sont devenues tellement civilisées, pour des raisons de sécurité, et c'est très normal. Il y a plein de voitures modernes plaisantes à conduire, mais ce ne sont pas des Type E.

Photo Marco Campanozzi, La Presse

La Jaguar Type E 1964 de Bernard Bellavance.

DANIEL AUCLAIR

Dodge Challenger SE 1970

Q La Challenger est très certainement spéciale à vos yeux.

R C'est la première année que Dodge construisait la Challenger. Elle a été lancée pour concurrencer la Ford Mustang et la Chevrolet Camaro. Chrysler voulait avoir ainsi sa propre «pony car». Dodge a donc sorti 56 000 Challenger en 1970, tous modèles confondus. C'était une voiture performante, car à cette époque, c'était les moteurs qui faisaient foi de tout, avec notamment le 426 Hemi, le 383 Magnum, le 440 Six-Pack.

Q En quoi la Challenger a-t-elle marqué l'histoire?

R Elle a marqué un changement de cap pour Chrysler, qui s'était jusqu'alors limité à lancer des voitures d'ancienne génération, plus imposantes. La Challenger était plus effilée, plus sportive. La première Challenger est aussi un modèle unique. Ses pièces ne font pas sur la 1971. C'est donc un modèle plus recherché, parce que plus rare. Les modèles de 1971 à 1974 ont tous des pièces interchangeables parce qu'il s'agissait de modèles assez semblables.

Q Quand vous êtes au volant de votre Challenger, comment vous sentez-vous?

R C'est un rêve de jeunesse. En 1970, j'avais 20 ans. À l'époque, j'avais un Plymouth Duster 340, alors la Challenger me fait penser à la première voiture performante que j'ai eue. Mais, en 1970, il ne fallait pas imaginer qu'on avait les moyens de s'acheter une Challenger parce qu'elle était plus rare et plus coûteuse.

Q Est-ce que vous êtes nostalgique de cette époque-là?

R Oui! Pour les voitures, la musique, tout en fait. Quand je suis au volant de la voiture, c'est sûr que ça me rappelle plein de souvenirs de cette époque-là. À l'époque, on parlait voiture. Aujourd'hui, les jeunes ont plein de gadgets électroniques pour se divertir, nous, c'était les voitures!

Photo Marco Campanozzi, La Presse

La Dodge Challenger SE 1970 de Daniel Auclair.