C'est sur les bords du lac Léman, au Salon de l'auto de Genève, que le groupe Renault va montrer dès la semaine prochaine la version définitive de sa nouvelle «berlinette» Alpine A110. Côté voitures de rêve, Genève sera le théâtre de premières signées Ferrari, Lamborghini, Pagani, McLaren et Bentley.

Dès lundi sera désignée la voiture de l'année: Alfa Romeo Giulia, Citroën C3, Mercedes Classe E, Nissan Micra, Peugeot 3008, Toyota C-HR ou Volvo S90/V90.

Mais ce seront à nouveau les multisegments, VUS et autres 4x4 urbains, désormais proches de 30% du marché européen, qui se tailleront la part du lion, comme le Volvo XC60, le prototype Citroën C-Aircross, le DS7 Crossback ou le Land Rover Velar.

Aujourd'hui la prospérité; demain, risques, chocs et dangers

Mais pour l'industrie automobile mondiale réunie en Suisse, le Salon de Genève est aussi une occasion d'exposer sa prospérité la semaine prochaine au Salon de l'auto de Genève, en Suisse, tout en se préparant aux chocs technologiques, réglementaires et peut-être politiques qui se profilent.

La possible acquisition d'Opel par PSA, les conséquences économiques du vote du «Brexit» et de nouvelles échéances électorales dans plusieurs pays devraient dominer les conversations mardi et mercredi lors des journées de presse de la 87e édition du salon international de l'automobile.

Les dirigeants des grands groupes «sont globalement optimistes, parce que c'est très bien reparti» après la crise de 2008-2013, remarque Rémi Cornubert, expert chez AT Kearney. Le marché européen des voitures neuves a crû de 6,8% en 2016 à 14,64 millions d'unités, retrouvant son niveau de 2008.

Les constructeurs du continent ont profité de cette dynamique, après avoir pour certains dû consentir à des restructurations. Ainsi du français PSA (Peugeot, Citroën et DS) qui a dégagé 2,15 milliards d'euros de bénéfice net l'année dernière, alors qu'il avait frôlé la faillite il y a trois ans.

L'allemand Volkswagen, après une année 2015 dans le rouge marquée par les conséquences du scandale de moteurs diesel truqués, a publié un bénéfice de 5,1 milliards d'euros en 2016, tandis que son dauphin en termes d'immatriculations en Europe, le français Renault, a vu son escarcelle se gonfler de 3,54 milliards d'euros.

«Quand on regarde le marché européen, son degré de maturité, les fondamentaux économiques, globalement il n'y a pas de raisons d'avoir de mauvaises surprises en 2017», estime Flavien Neuvy, directeur de l'observatoire Cetelem de l'automobile, évoquant des taux d'intérêt bas et des cours du pétrole globalement stables, en surplus d'une croissance économique faible mais «correcte».

«Le marché européen va continuer de croître cette année, ce qui est une bonne nouvelle pour les constructeurs», abonde l'expert allemand Ferdinand Dudenhöffer, de l'institut CAR. Pour l'Europe de l'Ouest, il table sur un marché en progression de 1,5%, soutenu par la France, l'Italie et l'Espagne alors que les ventes devraient légèrement retomber en Allemagne et au Royaume-Uni.

Ce tableau favorable pourrait néanmoins être bouleversé par un «risque politique», indique M. Neuvy.

Dans la foulée du Brexit puis de l'élection de Donald Trump aux Etats-Unis --deux variations sur l'isolationnisme-- «il peut y avoir de grosses surprises», remarque-t-il en évoquant les échéances électorales au Pays-Bas, en France et en Allemagne, autant de facteurs d'incertitude pour la consommation et des constructeurs mondialisés profitant des accords de libre-échange.

L'auto high tech de demain coûtera plus cher

Au delà, le secteur se prépare à la réduction réglementaire des émissions polluantes, passée au premier plan depuis l'affaire Volkswagen, à la chute des ventes de véhicules diesel qui y est liée et aux chantiers de la voiture électrifiée, connectée et autonome.

Ces contraintes vont «entraîner l'industrie dans une logique où le véhicule de demain sera plus cher à concevoir et à produire, de manière significative», prévient Guillaume Crunelle, associé responsable industrie automobile chez Deloitte.

D'où les vélléités de PSA d'acquérir Opel, filiale européenne déficitaire de l'américain General Motors (GM), pour pouvoir supporter les coûts comme le font les grands groupes mondiaux (Toyota, Volkswagen, GM et Renault-Nissan) qui vendent quelque 10 millions de véhicules en rythme annuel.

Seul grand salon automobile européen organisé chaque année, puisque Paris et Francfort le sont à tour de rôle, Genève est traditionnellement «le salon des belles voitures et des bolides exclusifs», rappelle M. Dudenhöffer.

Près de 180 exposants montreront quelque 900 voitures, le grand public étant admis du 9 au 19 mars. L'édition 2016 avait attiré 687 000 visiteurs.