La sécheresse en Californie incite une petite entreprise de Québec, Sanszo, à devancer ses projets d'expansion aux États-Unis. Sanszo conçoit et vend des produits de nettoyage automobile sans eau - comme son nom le dit - et s'efforce depuis sa fondation en 1998 de surfer sur la demande croissante de produits éco-amicaux.

Son produit éponyme, Sanszo, s'applique sur les véhicules secs avec un vaporisateur. Au lieu d'arroser la voiture au boyau avant de savonner puis de rincer à grande eau, on vaporise le produit sur la carrosserie, et il dissout la saleté. L'enlèvement se fait à l'aide d'un chiffon. Le robinet du boyau reste fermé.

«On a depuis le début des projets d'expansion aux États-Unis, mais avec la sécheresse en Californie et le rationnement décrété il y a deux semaines par le gouvernement là-bas, les astres sont vraiment alignés pour nous», a dit à La Presse Dany Leclerc, le président de Sanszo.

La situation est un dilemme: «On doit rester focalisés sur le marché canadien, où on est en plein développement, mais en même temps, il y a un besoin réel et une opportunité historique pour notre produit là-bas.»

La Californie vit depuis quatre ans une sécheresse aggravée par l'hiver presque sans neige observé dans les Rocheuses. Le niveau des lacs artificiels censés recueillir l'eau à la fonte des neiges devrait être très bas encore cette année. Il y a trois semaines, le gouverneur Jerry Brown a imposé un rationnement visant à réduire de 25%, en moyenne, l'approvisionnement en eau dirigé vers les agences régionales et les municipalités. Le gouverneur Brown a délégué aux autorités locales le pouvoir de demander des injonctions et d'imposer des amendes aux entreprises et aux particuliers qui gaspillent l'eau.

Un taux de pénétration modeste de Sanszo en Californie permettrait d'épargner des dizaines de millions de litres d'eau chaque année, note M. Leclerc: «Laver une auto au boyau prend entre 150 et 200 litres d'eau potable et ça peut atteindre 500 litres dans certains types de lave-autos sans système de récupération d'eau.»

Avec ses 39 millions d'habitants et ses 13,2 millions de voitures, VUS et camionnettes, la Californie a toujours été dans la ligne de mire de Sanszo, dit M. Leclerc: «La Californie - tout comme la Floride - est un marché naturel pour nous: il y a beaucoup de monde, beaucoup d'autos et le climat assure une demande 12 mois par année.» Et c'est un État réputé écologiste, où on inflige désormais une amende de 500$ à quiconque est pris à laver son auto avec un boyau sans pistolet-gicleur pour contrôler le débit.

L'auto, grande consommatrice d'eau



La pénurie d'eau va frapper de nombreux secteurs économiques l'été prochain, y compris le commerce automobile. Les concessions automobiles lavent des dizaines de voitures tous les jours et ont leur propre lave-auto. La semaine dernière, la California New Car Dealers Association évoquait dans le magazine Automotive News la possibilité que les lave-autos de ses membres soient fermés pour une durée indéterminée.

Contacté par La Presse à ce sujet, M. Leclerc a indiqué que la vraie demande n'est pas là: «L'association de concessionnaires et le bureau du gouverneur, on va les contacter en temps et lieu pour présenter notre produit, dit M. Leclerc. Mais c'est bien plus important, avant, d'amener notre produit sur les rayons des grands magasins là-bas.»

Par chance, le fournisseur principal de Sanszo, Lab-Clean, est en Californie. De plus, le grossiste Key-Stone, qui assure déjà une distribution limitée de Sanszo aux États-Unis, a son siège social en Californie.

Le deuxième actionnaire de Sanszo est Investissements One Drop, qui appartient à Guy Laliberté, président du Cirque du Soleil, une organisation qui a ses entrées et des ressources. Aide-t-elle Sanszo dans ses démarches américaines? «Ils nous donnent des conseils généraux sur l'organisation de la compagnie et l'exécution du plan d'affaires. J'ai abordé le sujet avec eux [Investissements One Drop]», a dit sans donner plus détails M. Leclerc. «Investissements One Drop est actionnaire, mais ça ne veut pas dire que je peux appeler Guy Laliberté et lui demander sa liste de contacts en Californie. Ça ne marche pas comme ça.»

Il note que même ici, «dans un pays nordique où l'eau ne manque pas, les gens voient bien que laver son auto avec de l'eau potable est un mauvais choix. C'est pour ça qu'on vend déjà entre 60 000 et 70 000 bouteilles de Sanszo ici, essentiellement à des particuliers, au détail».

La seule eau utilisée avec Sanszo est celle que contient le flacon, et dans laquelle est mélangée une émulsion de polymère biodégradable, un solvant à base de citron et des agents de conservation.