Lasers, caméras, réalité augmentée... Ces technologies ont souvent l'air de gadgets extravagants. Mais croyez-en les constructeurs présents au Consumer Electronics Show (CES) cette année, elles ont un objectif clair : réduire les accidents de la route et éradiquer les 1,3 million de morts provoquées annuellement par une automobile. Voici comment ils comptent y parvenir.

« Quelque 1,3 million de personnes meurent chaque année d'un accident d'automobile. L'équivalent de 3000 Boeing 747 qui s'écraseraient. Si c'était le cas, plus personne ne voudrait prendre l'avion ! Alors qu'on continue de conduire sa voiture comme si de rien n'était... » 

Voilà comment Kurt Lehmann, directeur de la technologie pour l'équipementier allemand Continental, remet en contexte les nouvelles technologies qu'on nous promet au fil des cinq ou six prochaines années. La mission que se fixe cet important fabricant de composants automobiles tient en trois mots : objectif zéro accident.

Pour y arriver, Continental bosse sur diverses technologies qui feront rapidement progresser la façon dont la voiture s'intègre à son environnement. Certaines font davantage penser aux jeux vidéo, la réalité augmentée, notamment. Il suffirait de projeter sur le pare-brise une information s'ajoutant à celle que le conducteur voit déjà : obstacles, limites de vitesse, indications routières, distances, etc.

Photo Agence France-Presse

Le Consumer Electronics Show devient de plus en plus un événement de choix pour présenter des technologies automobiles de pointe. Photo: AFP

LE RÊVE LOINTAIN DE LA CONDUITE AUTONOME

Au-delà des radars, sonars et lidars, entre autres, qui détectent les objets à proximité, Continental compte également mettre en marché un « pneu intelligent », lequel transmettrait de l'information à la voiture, améliorant ainsi son comportement routier. « Par exemple, ce pneu pourrait reconnaître les conditions routières, la présence d'eau ou de neige, et en informer le véhicule », explique M. Lehmann. Car en effet, si la voiture veut devenir intelligente, elle doit miser sur des composants intelligents eux aussi...

L'an dernier, Toyota a ouvert un centre de R & D à Palo Alto, en Californie, afin d'étudier le potentiel de l'intelligence artificielle dans la création de la voiture autonome. 

Présent à Las Vegas, son prototype Concept-i, qui a recours à un assistant numérique appelé « Yui », incarne ce projet, dont le but avoué est également de mettre fin aux accidents de la route. 

Les nouvelles sont cependant moins bonnes de ce côté...

« Nous travaillons sur toutes les technologies qui nous permettront de construire des véhicules incapables de blesser qui que ce soit : robotique, intelligence artificielle, tout », résume Gill Pratt, directeur général du Toyota Research Institute.

La Concept-i salue son conducteur quand il s'en approche. Photo: Toyota

Ainsi, même si les voitures autonomes parvenaient à réduire le nombre de morts sur les routes en Amérique du Nord (qui frôle les 40 000 par an), elles ne seraient pas acceptées du grand public, selon lui. « Même si elles coupent ce nombre de moitié, ce ne sera pas perçu comme acceptable », dit-il.

La voiture autonome a un autre problème de taille à affronter : l'automne dernier, la Société américaine des ingénieurs, la très influente SAE, a proposé cinq stades de développement pour arriver à la voiture réellement intelligente. Les systèmes de Tesla et de Mercedes-Benz actuellement en service, les plus avancés à l'heure actuelle, sont de niveau 2. Ils exigent du conducteur d'avoir les mains sur le volant en permanence.

Pour atteindre le niveau 3, la voiture devra avertir le conducteur 15 secondes à l'avance d'un éventuel danger. « C'est tout un défi : ça veut dire qu'elle doit voir venir des événements des centaines de mètres devant elle. On en a pour des décennies avant d'en arriver là », dit M. Pratt.

L'intérieur du prototype Toyota Concept-i, une voiture conçue pour apprendre les comportements de son conducteur, Photo: Reuters


LA COMMUNICATION AVANT TOUT

En attendant, les systèmes autonomes risquent donc de se limiter à des rôles de seconds violons : aide au stationnement, service de valet, conduite sur autoroute en ligne droite. À moins que les systèmes de communication intervéhiculaires que les constructeurs seront obligés d'installer dans leurs véhicules dès 2018 règlent cette question pour de bon.

S'il n'en tient qu'au gouvernement américain, ces systèmes de communication « véhicule à véhicule », ou V2V (en anglais), seront obligatoires dans au moins la moitié des nouveaux modèles mis en marché chez nos voisins du Sud en 2018, et devront équiper tous les nouveaux véhicules dès 2020. Le but : réduire la congestion urbaine d'abord, et les accidents ensuite.

Le rayon d'action de ces systèmes sans fil est de 900 m. Chaque voiture peut ainsi communiquer sa position, sa vitesse et sa direction, entre autres, à d'autres véhicules dans ce rayon, et ainsi évaluer s'il y a des obstacles ou même des dangers à l'horizon. 

Certains exposants présents au CES, comme Intel et Qualcomm, ont conçu des technologies allant en ce sens. On verra l'an prochain lesquelles seront adoptées par l'industrie - sans doute au CES 2018. Le salon devient de plus en plus un événement de choix pour présenter des technologies automobiles de pointe.

La Toyota Concept-i au moment de dévoilement au Consumer Electronics Show de Las Vegas le 4 janvier dernier. Photo: Reuters