Les partisans des voitures autonomes promettent un avenir radieux avec moins de bouchons et d'accidents mortels, mais cette nouvelle technologie menace aussi des millions d'emplois, comme l'ont soulignés des participants au forum de Davos cette semaine.

«Les entreprises vont devoir commencer à y réfléchir, les gouvernements aussi», a affirmé à l'AFP Missy Cummings, de l'Université Duke, en Caroline du Nord, qui appelle les autorités à préparer l'arrivée de ces véhicules.

«Nous ne pouvons pas faire l'autruche et nous cacher la tête dans le sable», a-t-elle ajouté, en marge du Forum de Davos.

Rien qu'aux États-Unis, environ quatre millions de personnes travaillant comme camionneurs ou chauffeur de taxi, entre autres, verront leur emploi menacé quand l'utilisation des voitures autonomes se diffusera à grande échelle. Au Canada, il y a près de 300 000 camionneurs, selon le Conference Board.

En octobre, les livreurs ont reçu un message peu encourageant pour l'avenir, quand un camion sans chauffeur conçu par Otto, une filiale du groupe de service américain Uber, est parvenu à livrer tout seul une cargaison de bière.

Des véhicules avec des fonctions autonomes, comme la possibilité de réguler la vitesse, circulent déjà sur nos routes et la plupart des grands constructeurs automobiles se sont lancés dans une course pour mettre sur le marché une voiture sans chauffeur d'ici 2020.

Ces nouvelles voitures pourraient réduire le nombre de victimes des accidents de la route, qui s'élève à 1,3 million chaque année à l'échelon mondial, la plupart en raison de la fatigue ou d'une distraction ou parce que le conducteur n'a pas réagi assez rapidement.

L'industrie automobile considère la voiture autonome à la fois comme une menace et comme une opportunité.

Le patron de l'alliance Renault-Nissan, Carlos Ghosn, a assuré que la voire autonome était «en train de rebattre les cartes» au sein de l'industrie automobile.

Ce camion International peut rouler en conduite assistée. Photo : International

Transition douloureuse

«Il y a un nouveau match. Nous verrons qui sera capable de s'imposer», a-t-il expliqué lors d'une conférence à Davos.

Le défi pour la technologie autonome est désormais d'attirer de nouveaux acteurs dans le secteur automobile comme les géants Google ou Apple.

Il est vrai que l'arrivée de ces nouveaux véhicules va aussi créer des emplois, notamment des postes d'ingénieurs et dans les prestations de services qui y seront associées.

Mais la transition sera douloureuse pour tous les camionneurs et les chauffeurs de taxi qui ne seront pas suffisamment qualifiés pour les nouveaux postes de travail.

«A ce stade, nous n'avons pas vraiment de programme conçu pour la formation», a reconnu la commissaire européenne Violeta Bulc à Davos, qui a souligné que «la numérisation  était en train d'opérer des changements spectaculaires».

La manière de réguler ces nouvelles voitures donne déjà des maux de tête aux gouvernements.

Inga Beale, directrice générale de Lloyd's of London, a admis au WEF que les assureurs allaient devoir se saisir de la question de la responsabilité en cas d'accident.

Mais les constructeurs automobiles font face également à des questions étiques et légales. Par exemple, que devrait faire une voiture autonome qui aurait à choisir entre tuer son passager ou risquer une embardée qui pourrait en tuer cinq autres?

L'industrie a d'ailleurs reçu avec soulagement cette semaine la décision des autorités américaines de classer sans suite une enquête de six mois sur le système de pilotage automatique du constructeur de voitures électriques Tesla, faute d'avoir détecté un défaut du logiciel à la suite d'un accident mortel.

En public, les constructeurs préfèrent parler des avantages de ces nouvelles voitures.

«Vous pourrez être dans la voiture et faire tout ce que vous faites à la maison ou au bureau, sauf que vous serez en train de vous déplacer», a expliqué M. Ghosn à Davos