Deux Québécois sur trois estiment que la présence des aînés derrière le volant est inquiétante. Dans la même proportion, les gens ayant convaincu un parent plus âgé de réduire son utilisation de l’automobile ont trouvé l’expérience « pénible ». Jeunes et vieux, il est peut-être temps d’aborder le sujet… autrement.

Dans cette optique, la Fondation CAA-Québec a procédé au cours de l’automne à une mise à niveau importante d’un guide qu’elle publie à ce sujet, appelé La bonne conduite n’a pas d’âge. « Notre but est de nous assurer que les gens de tous âges puissent demeurer mobiles et autonomes. Notre guide s’adresse à tout le monde, mais tout particulièrement aux proches de ces personnes âgées qui semblent peut-être moins alertes derrière le volant, afin de les aider à mieux les accompagner [dans le changement de leurs habitudes de mobilité] », explique Pierre-Olivier Fortin, porte-parole de CAA-Québec.

Cette notion d’accompagnement est cruciale, explique M. Fortin, car elle peut toucher à des valeurs délicates mais divergentes, selon l’âge.

« Pour la génération plus âgée, le fait de posséder et de conduire une automobile a longtemps eu valeur de symbole, que ce soit de succès, ou plus simplement d’autonomie et d’indépendance. Les plus jeunes, qui se soucient moins de décrocher leur permis de conduire, ne voient pas ça de la même façon. »

— Pierre-Olivier Fortin, porte-parole de CAA-Québec

Ainsi, plutôt que d’aborder la question de front, peut-être que de suggérer une auto-évaluation est un bon moyen d’ouvrir le dialogue, voire d’amorcer un changement durable dans les habitudes d’un parent plus âgé. « Il y en a qui sont plus aptes à conduire à 91 ans que d’autres à 41 ans… Ce n’est pas toujours l’âge, le problème. Les gens qui ont plus de difficulté à vérifier leurs angles morts, qui trouvent que la signalisation routière écrite est de plus en plus petite, ou qui ont de la misère à distinguer les objets lorsqu’ils conduisent de nuit, vont souvent réaliser qu’ils ont peut-être besoin de faire des changements », ajoute le porte-parole du club automobile québécois.

Moderniser ses habitudes, un début de solution

La beauté de l’affaire est qu’il n’a probablement jamais été aussi facile d’être parfaitement actif et autonome sans voiture. Avec les nombreux services de livraison et de mobilité sur demande, une bonne partie des déplacements qui semblaient autrefois impossibles sans prendre sa voiture peut être faite autrement, sinon carrément évitée. C’est d’ailleurs le premier conseil avancé par CAA-Québec dans la recherche d’une solution pour réduire l’utilisation de sa voiture. Qu’on soit un aîné ou pas.

« De nos jours, on peut se faire livrer son épicerie à peu près n’importe où, même à l’extérieur des grands centres », dit Pierre-Olivier Fortin. On peut utiliser un service d’autopartage pour d’autres types de courses, également. Pour les gens à mobilité plus réduite, les CLSC et certains organismes locaux proposent des services plus adaptés, qu’il s’agisse de se déplacer dans un but précis, ou simplement pour se divertir.

Si la voiture demeure essentielle au quotidien, il existe des cours de conduite qui font office de mise à jour où même les conducteurs qui comptent beaucoup de kilométrage derrière la cravate en apprendront un peu plus sur les nouvelles technologies, le code de sécurité routière, etc. CAA-Québec a d’ailleurs sa propre offre en ce sens.

Suivre une telle formation pourrait rassurer les jeunes qui émettent des inquiétudes sur la capacité des aînés à conduire en toutes circonstances. De façon plus générale, peut-être que ça va aussi apaiser les quelque 62 % des Québécois qui croient justement qu’il faudrait imposer des cours d’appoint aux gens ayant atteint l’âge de la retraite, ou plus. Plus précisément, ceux (18 % des répondants au sondage de CAA-Québec) qui pensent qu’il serait plus simple de retirer le permis de conduire aux gens d’un certain âge…

Car si ça se trouve, peut-être que ceux-là seront heureux de pouvoir encore conduire de façon sécuritaire lorsqu’ils auront atteint l’âge de leurs aînés.