Nouveaux venus sur un marché porteur, quoique notoirement encombré, les Jeep Cherokee et Mitsubishi Outlander cherchent à se démarquer. Si l'objectif est le même, l'approche diffère. L'américain mise sur son audace, le japonais sur sa fonctionnalité. Laquelle de ces deux pistes conduira au succès?

Le créneau des multisegments est du genre à vous donner le tournis. Les lancements se succèdent à un rythme soutenu, et les premières places au classement des ventes demeurent, contrairement à bien d'autres catégories, une lutte ouverte. Et les marques Jeep et Mitsubishi estiment toutes deux qu'elles ont une chance de briller.

Pour s'illustrer, la marque américaine joue d'audace avec un Cherokee aux formes excentriques qui apportent une bouffée de fraîcheur dans un créneau où tous les participants finissent par se ressembler. L'approche de Jeep peut paraître paradoxale par rapport à la démarche de Mitsubishi. La firme japonaise a en effet profité de la refonte - la troisième - de l'Outlander pour l'habiller d'une carrosserie classique, qui compte deux places additionnelles. Voilà un facteur de différenciation. À noter qu'une version cinq places figure toujours au catalogue.

En dépit de ces deux «fauteuils» supplémentaires, l'Outlander présente sensiblement les mêmes dimensions que le Cherokee. La troisième rangée de sièges n'est utile que pour dépanner, car celle-ci est taillée (et accessible) pour accueillir de jeunes enfants. Mieux vaut l'escamoter et profiter de ce volume additionnel pour accroître la superficie du coffre, qui surpasse alors celle du Jeep dans toutes les configurations comparables.

Si les baquets avant du Cherokee offrent un meilleur dégagement, ceux de l'Outlander sont plus accueillants à l'arrière. Le Mitsubishi est plus spacieux, mais les deux protagonistes font jeu égal sur le plan de la modularité, puisque tous deux font glisser leur banquette sur des rails.

À l'image de son apparence extérieure, le Mitsubishi ne casse rien sur le plan de la présentation intérieure. Qu'est-il advenu de l'audace qui caractérisait les créations passées de ce constructeur japonais? À défaut de nous en mettre plein la vue, reconnaissons à tout le moins la qualité d'assemblage et la diversité des matériaux employés dans le garnissage de l'habitacle. Saluons également le nombre d'espaces de rangement - même si ceux-ci ne sont pas tous aussi ingénieux qu'à bord du Jeep - ainsi que l'ergonomie irréprochable des principales commandes.

Dès le premier coup d'oeil, la décoration du Cherokee apparaît plus valorisante. Un commentaire qui s'applique surtout aux versions Trailhawk et Limited, lorsque celles-ci se parent des dernières avancées du monde électronique. Un domaine où le Cherokee prend un net ascendant sur son concurrent d'un jour, en raison d'une connectivité plus simple pour appareiller les accessoires considérés comme essentiels à la vie moderne (appareillage d'un téléphone portable et baladeur numérique).

Une question de perception



Derrière la calandre à «sept branches» du Cherokee respire un V6 de 3,2 litres. Ce dernier dérive étroitement du 3,6 litres et est considéré comme l'un des 10 meilleurs du monde, si l'on prête foi au palmarès établi par Ward's. Mais ces fleurs se fanent rapidement. Ce moteur comporte très peu d'avancées sur le plan technique. On ne retrouve ni l'injection directe, ni un dispositif de coupure automatique à l'arrêt, ni un système de désactivation des cylindres. Des technologies dont le groupe Fiat se fait pourtant le chantre pour certains de ses autres produits. On ne peut se montrer aussi sévère à l'égard de Mitsubishi, qui propose une motorisation dont le développement est visiblement terminé depuis de très nombreuses années déjà. Robuste et fiable, sans l'ombre d'un doute, ce V6 n'offre carrément pas les prestations et le rendement d'une mécanique moderne, et encore moins la performance attendue par une telle cylindrée. Qui plus est, ce moteur japonais exige qu'on l'abreuve de super.

Pour transmettre toute cette énergie aux roues, «nos» deux constructeurs empruntent encore une fois des routes différentes. Le Jeep a droit à une boîte automatique à neuf rapports, alors que celle proposée par Mitsubishi en compte trois de moins (soit six). Peu importe le nombre, ces deux transmissions manquent de réactivité. Cela est principalement dû à une gestion électronique qui donne priorité à la consommation au détriment de la puissance pure (accélération et reprises). Leur rendement est toutefois correct, mais leur étourderie agace parfois.

On retrouve une mécanique quatre cylindres au catalogue de ces deux modèles. Mitsubishi la publicise peu, arguant que 70% de sa clientèle préfère le V6. On peut comprendre pourquoi. Le quatre-cylindres n'est pas une jeunesse lui non plus, et est jumelé uniquement à une - détestable - boîte à variation continue. Quant au quatre-cylindres du Jeep, sa puissance peut paraître un peu juste considérant la masse qu'il doit déplacer. Nous abordons le sujet au paragraphe suivant.

Sur papier, les performances du V6 américain surpassent celles de son homologue japonais, mais à l'usage, la différence n'apparaît pas aussi clairement. L'explication réside essentiellement dans le poids de ces deux montures. Le Cherokee est lourd, beaucoup trop lourd. Et pas seulement par rapport aux meilleurs de la catégorie. Devant l'Outlander également (voir nos fiches techniques). Ce dernier a été délesté de plus d'une centaine de kilos dans le cadre de sa refonte.

Contre toute attente, cette masse importante que traîne le Jeep a peu d'impact sur le dynamisme de son comportement routier. Dans ce domaine, le Mitsubishi a peu à lui envier. Il fait d'ailleurs preuve d'une plus grande agilité en milieu urbain et dans les manoeuvres de stationnement en raison de son diamètre de braquage plus court. Sur les voies rapides, la direction du Cherokee apparaît plus communicative et offre surtout un «toucher» de route plus précis. Les mouvements de caisse paraissent mieux maîtrisés, mais cela a un prix: le confort de roulement est inférieur à celui proposé par l'Outlander.

Des deux, le Cherokee fait figure de «meilleur espoir» pour s'intercaler parmi les meneurs de la catégorie. La silhouette audacieuse, les prix plus attractifs, la gamme plus diversifiée et le modernisme d'un point de vue technique représentent tous des arguments favorables. En revanche, sur le plan rationnel, l'Outlander mérite tout autant considération. La configuration à sept places, l'habitacle plus spacieux, les éléments mécaniques éprouvés et la garantie de base plus généreuse militent en sa faveur. Mais il faut trancher. Allons-y avec le Cherokee, pour peu qu'il progresse et se raffine dans un futur pas trop lointain.

Le Cherokee est le premier véhicule de conception américaine à offrir une boîte automatique à neuf rapports. Celle-ci a été conçue par l'équipementier allemand ZF

Le Cherokee propose plusieurs systèmes à quatre roues motrices. Le plus performant de tous se nomme «Active Drive Lock», mais il n'intéressera que l'amateur qui sait pourquoi et quand il est nécessaire de verrouiller le différentiel arrière.

Pour rattraper son retard technologique, Mitsubishi proposera d'ici le printemps 2015 une version hybride rechargeable de l'Outlander. Ce dernier compte deux moteurs électriques (un sur chaque essieu) et un moteur à essence de 2 litres.

Le rouage intégral de l'Outlander ne vise pas les amateurs de «chouette la bouette», mais plutôt à améliorer les performances routières. Le constructeur entend en faire étalage dans les prochaines semaines à l'occasion du Pikes Peak, une course de côte.

Fiche technique - Jeep Cherokee

> Prix : 23 695$ à 32 395$

> Frais de transport et préparation: 1695$

> Garantie de base : 3 ans/60 000 km

> Consommation obtenue lors de l'essai : 11,2 L/100 km

> Pour en savoir plus : www.jeep.ca

> Moteur : V6 DACT 3,2 litres

> Puissance : 271 ch à 6500 tr/min

> Couple : 239 lb-pi à 4400 tr/min

> Poids : 1834 kg

> Rapport poids-puissance : 6,76 kg/ch

> Mode: Intégral

> Transmission de série : Automatique 9 rapports

> Transmission optionnelle : Aucune

> Direction/Diamètre de braquage: Crémaillère/11,6

> Freins avant/arrière : Disque/Disque

> Pneus avant -arrière : 225/60R18

> Capacité du réservoir de carburant : 60 litres

> Essence recommandée: Ordinaire

Fiche technique - Mitsubishi Outlander

> Prix : 25 998$ à 35 998$

> Frais de transport et préparation: 1700$

> Garantie de base : 5 ans/100 000 km

> Consommation obtenue lors de l'essai : 11,5 L/100 km

> Pour en savoir plus : www.mitsubishi-motors.ca

> Moteur : V6 SACT 3 litres

> Puissance : 224 ch à 6250 tr/min

> Couple : 215 lb-pi à 3750 tr/min

> Poids : 1620 kg

> Rapport poids-puissance : 7,23 kg/ch

> Mode: Intégral

> Transmission de série : Semi-automatique 6 rapports

> Transmission optionnelle : Aucune

> Direction/Diamètre de braquage: Crémaillère/10,6

> Freins avant/arrière : Disque/Disque

> Pneus avant -arrière : 225/55R18

> Capacité du réservoir de carburant : 60 litres

> Essence recommandée: Super