S'il faut s'inquiéter d'une éventuelle attaque terroriste sur quatre roues même à Montréal, il est plus raisonnable de tenter d'abord de prévenir les accidents mortels et même les accrochages plus banals entre automobilistes, cyclistes et piétons.

La promesse de Valérie Plante d'être la « mairesse de la mobilité » en faisant plus de place au transport multimodal, incluant des voies cyclistes express partout dans l'île, réjouit les experts en planification urbaine, mais souligne l'importance de parler d'abord de sécurité routière.

Surtout pas «un sommet du G8 permanent»

« C'est sûr qu'on doit rendre les villes sécuritaires, mais il ne faut pas non plus tomber dans la surenchère d'équipement de sécurité. Une ville sûre est une ville qui prend soin de ses citoyens au quotidien, ce qui réduira indirectement la menace terroriste », estime Brent Toderian, président du Conseil canadien d'urbanisme.

L'ex-planificateur urbain de Vancouver, qui offre désormais son expertise à des municipalités partout sur la planète, explique qu'une ville comme Montréal ne doit pas devenir « un sommet du G8 permanent », avec ce que ça implique de murets de béton, de clôtures grillagées et de bornes de protection encombrantes.

« C'est ce qu'Édimbourg a fait pour protéger son quartier du Royal Mile, et c'est clairement une mauvaise solution», dit M. Toderian« La sécurité d'une ville doit être pensée en fonction de la qualité de vie de ses citoyens, avec des mesures de sécurité efficaces mais discrètes. Je pense que c'est ce que Valérie Plante pense également. »

Lorsque judicieusement positionné, le mobilier urbain --comme ces supports à vélos à Washington-- peut jouer un rôle dans la réduction du risque. Ils réduisent la largeur du trottoir, qui est aussi protégé par une rangée de bollards. Photo: Reuters

Une sécurité invisible

Marc Jolicoeur, directeur de la recherche et de l'expertise chez Vélo Québec, collabore avec des municipalités partout au Québec dans l'élaboration de leur stratégie de sécurité du transport. Il partage l'avis de M. Toderian.

« On n'est jamais à l'abri : on a déjà vu quelques actes terroristes au Canada. Mais est-ce qu'on doit installer des barrières partout ? Ça ne semble pas réaliste, résume-t-il. Dans certaines villes en Europe, on utilise des bollards qui se fondent tout naturellement au décor », dit-il.

On peut aussi ralentir la circulation en recourant aux dos d'âne et en prolongeant les trottoirs en saillie, comme on le voit déjà à certaines intersections montréalaises. Autoriser ou interdire certains types de véhicules dans certains quartiers durant les heures de pointe est aussi envisageable. 

Ces mesures facilitent non seulement la cohabitation entre divers usagers de la voie publique, selon les deux experts, mais elles pourraient aussi aider à déjouer ces terroristes qui voient dans les automobiles une nouvelle arme de destruction massive.

Ce bollard protégeant un trottoir de Sydney a été peint pour représenter une cigarette, dans le cadre d'une campagne de santé publique pour encourager les Australiens à écraser. Photo: AFP