La décision de la justice allemande d'ouvrir la porte à des interdictions de voitures diesel dans les villes inflige un nouveau coup sévère, voire mortel, à ces motorisations déjà décriées et en déclin depuis plusieurs années.

«C'est peut-être la mort du diesel», a commenté pour l'AFP Willi Diez, expert de l'Institut pour l'économie de l'automobile (Ifa), basé en Allemagne. Selon lui, «les acheteurs sont très déstabilisés parce que personne ne sait ce qui va se passer» et cela aura un impact sur le marché allemand, le plus grand d'Europe, mais «vraisemblablement aussi sur les autres marchés européens».

Il souligne que les constructeurs «ne vont plus beaucoup investir» dans cette technologie, «si bien que le diesel pourrait disparaître du marché sur les dix prochaines années».

Dénoncées par de nombreuses associations environnementales pour leurs rejets de particules fines et d'oxydes d'azote, les motorisations diesel sont de plus en plus montrées du doigt.

En France, la mairie de Paris a par exemple décidé d'interdire les diesel d'avant 2005 à partir du premier semestre 2019 et d'aller vers l'interdiction totale des voitures diesel en 2024.

Ces motorisations, qui émettent moins de CO2 que leurs équivalents essence, étaient pourtant encouragées jusqu'à récemment par les pouvoirs publics européens, à l'aide de différents dispositifs dont la fiscalité des carburants. Mais l'affaire des moteurs truqués de Volkswagen, révélée en 2015, a démontré que pour l'ensemble de l'industrie, fraude ou pas, le diesel polluait bien plus que les valeurs affichées lors des tests d'homologation.

Le marché pour ce type de véhicules s'est retourné brutalement ces dernières années, mettant au défi les constructeurs d'adapter à la hâte leur outil industriel.

En Allemagne, la part de marché du diesel a chuté à 33% des immatriculations le mois dernier contre encore 51% en janvier 2015.

«Point de non retour», même pour les diesels neufs

Pour les experts, le fait que les éventuelles interdictions allemandes ne concerneraient que des véhicules anciens, ne respectant pas les normes actuelles, ne change rien à l'effet psychologique sur les acheteurs de véhicules neufs. «Il est bien possible que la part de marché du diesel tombe sous les 25% dès cette année», estime Peter Fuss de Ernst & Young.

En revanche, les motorisations alternatives comme l'électrique ou les moteurs hybrides essence-électrique, devraient avoir encore plus le vent en poupe, selon lui.

La chute du diesel est tout aussi spectaculaire en France, où sa part des immatriculations neuves est tombée à 41% en janvier alors que ces moteurs représentaient encore 75% des ventes en 2012.

Le phénomène touche toute l'Europe, qui représente les deux tiers des ventes mondiales pour cette motorisation. Le diesel a perdu 5 points de parts de marché l'an dernier sur le Vieux continent, selon le cabinet spécialisé Jato Dynamics.

Face à cette situation, le constructeur italo-américain Fiat Chrysler (FCA) aurait décidé d'abandonner le diesel pour la motorisation de ses voitures particulières d'ici à 2022 et s'apprêterait à l'annoncer au mois de juin, a affirmé le journal Financial Times dans son édition de lundi.

«Si la tendance négative actuelle du diesel se poursuit, cela aura des conséquences économiques significatives pour les constructeurs et les équipementiers, et donc pour l'emploi dans ces entreprises», avertit M. Fuss.

Inquiet des conséquences pour le tissu industriel du pays, le gouvernement français a décidé de réunir début avril les dirigeants de l'industrie automobile, dont le patron de PSA Carlos Tavares et celui de Renault Carlos Ghosn.

Pour les constructeurs, il devient de plus en plus coûteux de respecter les normes environnementales toujours plus strictes pour ces motorisations, alors qu'ils doivent dans le même temps investir massivement dans la transition vers l'électrique et les véhicules autonomes.

«Le diesel a atteint un point de non-retour. Sur les voitures particulières, ce n'est plus l'avenir», assure Ferdinand Dudenhöffer, du Center Automotive Research (CAR).