Jimi Hendrix était réputé aussi mauvais au volant que extraordinaire à la guitare mais il aimait les Corvette. Il en a acheté au moins deux durant sa courte vie de conducteur, dont une que le légendaire gaucher a promptement détruite peu après avoir obtenu son permis de conduire.

Il y a 50 ans aujourd'hui, Hendrix et son groupe The Jimi Hendrix Experience ont fait salle comble à l'aréna Paul-Sauvé le mardi 2 avril 1968, date de son seul concert à Montréal.

Il n'est pas venu en auto, bien entendu, mais c'est un bon prétexte. Avant de parler de voitures, quelques mots sur le spectacle. Il existe un enregistrement du concert de Montréal sur internet. C'est un bootleg, le son est atroce, mais ça vaut le coup (le lien est au bas de la page) juste pour se mettre un moment dans l'ambiance de l'époque.

Hendrix a joué durant juste trois quarts d'heure, enchaînant Killing Floor, Hey Joe, Fire, la magnifique The Wind Cries Mary, Foxy Lady, I Don't Live Today, Manic Depression, Purple Haze et Wild Thing. Mais pas Crosstown Traffic, une chanson qui compare les difficultés de l'amour à conduire à contrecourant de l'heure de pointe (à 95 milles à l'heure, note Hendrix).

Le concert est court; Hendrix avait le haut de l'affiche et le groupe anglais Soft Machine avait fait la première partie, a dit à La Presse jeudi le guitariste montréalais Bob Cohen, qui avait 16 ans ce jour-là.

«J'étais à la 4e ou 5e rangée, au centre, je l'avais directement devant moi. Le volume était très fort, le son était épouvantable... et c'était très excitant», dit Cohen, qui allait par la suite devenir un des musiciens de studio les plus en demande à Montréal durant des années.

Jimi Hendrix posant sur une Lotus Elan pour un magazine. C'était la voiture du bassiste Noel Redding (à droite). À gauche, le batteur Mitch Mitchell.

Achetée et interceptée par la police le même jour

Mais revenons-en aux voitures de Jimi Hendrix.

Il a acheté la première Corvette --sa toute première auto-- à Cleveland une semaine exactement avant le concert de Montréal. On le sait grâce à un fan de Hendrix (et de la Corvette), Patrick Smith, qui a tenu durant plusieurs années un blogue documentant sa recherche de la seconde Corvette de Hendrix, celle que le musicien n'a pas eu le temps de détruire.

Smith cite l'autobiographie de Mitch Mitchell*, le batteur de The Jimi Hendrix Experience, à l'époque, selon qui Hendrix a acheté sa première auto («une Corvette bleu Le Mans, avec peinture métallisée», précise Mitchell) à Cleveland durant la tournée 1968.

Mitchell ne date pas l'anecdote, mais grâce aux calendriers de tournée qu'on trouve en ligne, on sait que Hendrix était à Cleveland le 26 mars 1968. Mitchell raconte que Hendrix n'avait pas de permis de conduire et qu'il s'est fait arrêter par la police en roulant à contrecourant dans un sens unique. 

Il a été mis à l'amende et c'est sa compagnie de disque, Yameta, qui a dû récupérer la voiture et l'entreposer pour le reste de la tournée. Hendrix n'a pu remettre les mains sur le volant que six mois plus tard à la fin de la tournée, en septembre, en Californie, présumément après avoir appris à conduire et obtenu le permis.

Vendue après sa mort pour payer ses factures

Ça ne l'a pas beaucoup aidé. Mitchell raconte que peu de temps après avoir repris possession de la voiture, Hendrix l'a détruite dans un accident perte totale au petit matin.

«Un samedi soir, nous sommes allés voir Cream et au retour, on a fait un party à la maison. Ça n'a pas fini avant 5 h du matin et à 7 h, je me suis endormi. J'ai entendu la voix de Jimi : Hé, devine quoi, je viens de détruire mon auto..., mais j'ai cru que j'avais rêvé et je me suis rendormi. Quelques heures, plus tard, j'ai découvert que c'était vrai», raconte Mitchell, qui ajoute avoir trouvé la voiture écrasée sur des rochers, à droite de la route.

La seconde Corvette existe peut-être toujours. Le blogueur Patrick Smith affirme que les biens de Hendrix --pas le plus économe des rockers-- ont été vendus pour payer ses dettes après sa mort en 1970.

Le lien entre la voiture et Hendrix a pu échapper aux propriétaires subséquents : Smith note que la seconde Corvette --tout comme la première-- était sans doute au nom de Yameta ou d'une autre des compagnies fondées autour de son client par le gérant de Hendrix, Michael Jeffery.

Si c'est le cas, la personne l'ayant acquise ignore peut-être qu'elle a appartenu à un musicien fantastique qui est passé à Montréal une fois il y a un demi-siècle.

*Jimi Hendrix: Inside the Experience. Mitch Mitchell; St.Martin Press; New york; 1990

Pour lire le blogue de Patrick Smith, cliquez ici.