À la télé américaine la semaine dernière, le président des États-Unis Donald Trump a salué l'élection de son nouvel homologue mexicain, Andrés Manuel López Obrador, en expliquant : « J'ai le sentiment qu'il sera bon, et la raison est que s'il ne l'est pas, je vais taxer [les] véhicules que [les Mexicaines] vendent chez nous, et ce sera gros. »

Après la série de nouvelles taxes et de mesures protectionnistes mises en place par Washington ces dernières semaines, il n'en fallait pas plus pour faire réagir les spécialistes. Dans une note aux investisseurs publiée il y a quelques jours, un analyste de la Banque Scotia va jusqu'à prédire une récession au Canada en 2020, si jamais Trump met sa menace à exécution et impose des taxes supplémentaires sur les véhicules importés dans son pays.

Ce qui semble inévitable, c'est que le prix des véhicules vendus au Canada augmentera. Photo Reuters

Une récession avec ça ?

« Dans ce qui est encore l'éventualité peu probable que les États-Unis imposent des taxes sur les automobiles et que le reste de la planète réplique de la même façon, une guerre commerciale s'ensuivra qui pourrait pousser le Canada vers une récession, dans la seconde moitié de 2019 et en 2020 », écrit Jean-François Perrault, économiste en chef pour l'institution torontoise" Le cas échéant, il prédit un recul de 1,8 % de l'économie canadienne dans deux ans, soit un repli de moitié inférieur à celui qui s'est produit après la crise financière de 2008.

Cette situation reste encore improbable, puisqu'elle sous-entend que le traité de libre-échange nord-américain (ALENA) pourrait être carrément abandonné par les trois pays qui en font partie. Ce qui, même si les négociations sont actuellement au point mort, est loin d'être la seule conclusion envisageable, souligne M. Perrault.

Ce qui semble inévitable, par contre, c'est que le prix des véhicules vendus au Canada augmentera, dans les prochains mois, en raison de nouvelles taxes américaines et canadiennes sur des matériaux comme l'acier et l'aluminium, évidemment très présents dans les automobiles.

Vous paierez plus

Les automobilistes qui songent à remplacer leur véhicule actuel par un nouveau dans un proche avenir devront s'attendre à payer plus, avertit George Iny, président de l'Association pour la protection des automobilistes (APA).

« Ça pourrait avoir un impact de quelques centaines de dollars sur le prix d'un véhicule neuf », dit-il, en tenant lui aussi pour acquis que l'ALENA demeurera intact, sinon, ça coûtera plus cher encore.

M. Iny estime que le mouvement qui semble s'organiser au Canada anglais pour inciter les consommateurs à acheter des produits faits au Canada se transpose malheureusement mal au secteur automobile. Ce dernier est si intégré qu'il est improbable que l'achat d'une voiture assemblée en Ontario, plutôt que d'une autre assemblée en Indiana, ait un impact quelconque.

En revanche, tout ce mouvement géopolitique pourrait avoir un effet tangible au Québec : les véhicules électriques à vendre pourraient être plus nombreux chez nous dès l'automne.

Le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford, a promis d'abolir l'aide à l'achat qui rend ces modèles si populaires dans sa province dès octobre.

Plus d'autos électriques au Québec grâce à Doug Ford ?

Les constructeurs seront alors tentés de diriger leurs produits vers le Québec, où la demande est toujours forte.

« On ne paiera pas nécessairement moins cher, mais ça pourrait provoquer un déplacement de l'approvisionnement qui rendra les véhicules électriques plus faciles à trouver chez nous », croit M. Iny.

Avantage économique tangible des véhicules électriques, précise l'expert montréalais : l'énergie qui les anime est produite au Québec, plutôt que d'être importée.

Opter pour ces véhicules soutient donc l'économie locale, à l'abri des sautes d'humeur des politiciens étrangers.