De prime abord, la Challenger SRT n'a pas les caractéristiques d'une voiture classique moderne, un objet qui est souvent l'extension d'une pensée très cérébrale. Aussi discrète qu'un solo de Jimmy Page, encombrante, chargée d'une nostalgie assumée. C'est plutôt un muscle car pur que nous sert Dodge, dont les arêtes ont été lissées pour mieux cadrer dans notre époque.

Cet anticonformisme est particulièrement apparent lorsqu'on s'attarde au design de cette dernière cuvée de la Challenger, une création largement inspirée de son ancêtre née à l'aube des années 70 dans une Amérique en pleine ébullition. Éclipsés par l'énorme capot avant, les phares ronds entourés d'un halo de diodes amplifient l'intensité du regard.

C'est une présence imposante, menaçante, à laquelle nous convie cette livrée SRT, accentuée par le becquet avant et un extracteur d'air central sur le capot. 

Sur la latérale, les designers ont pris soin d'incorporer une ligne d'aile qui s'élève vers l'arrière, un autre clin d'oeil à la grande influence stylistique qu'a été le modèle 1971. Dans l'ensemble, on ne peut que saluer cette relecture, qui capte bien l'esprit de la Challenger, une personnalité colorée.

Cette chose massive produit 475 lb-pi à 4200 tr/min. Photo: Dodge

Habitacle cossu

Si le design extérieur semble tout droit sorti du film Vanishing Point, l'habitacle, quant à lui, a tout ce qu'il y a de moderne.

Plus longue de 24,5 cm lorsqu'on la compare à sa rivale de toujours, la Mustang, cette Challenger libère énormément d'espace à l'avant. Bien installé dans des sièges confortables et assurant un bon maintien latéral, on constate toutefois que les places arrière sont étriquées, malgré l'étroite parenté du coupé avec une grande berline, la Charger.

On pose les yeux sur une planche de bord massive aux formes organiques. Les instruments de mesure et l'excellent système d'infodivertissement sont concentrés du côté du conducteur pour valoriser leur lecture. Le tout est fondu dans une plaque d'aluminium qui rappelle le côté brut de cette Challenger. La qualité des matières employées est d'ailleurs très bonne, tout comme l'assemblage, plus soigné que celui de la Mustang.

L'extérieur fait penser au film Vanishing Point, aussi connu ici sous le titre Point limite zéro. Photo: Wikipédia

Penchant pour le grand tourisme

À la lecture de sa fiche technique, la Challenger SRT donne l'impression d'être une machine à sensation intraitable. Le portrait est toutefois beaucoup plus nuancé lorsqu'on prend le pouls réel de la voiture.

Sur le plan mécanique, cette Challenger a certainement les moyens de ses ambitions. Le grondement guttural du ralenti de l'immense V8 de 6,4 L à culbuteurs le met en exergue. La pédale d'accélération montre rapidement que le plus gros moteur en volume de la famille Hemi a une énorme réserve de couple (475 lb-pi) qui peut tout aussi rapidement écourter la vie des deux pneus Pirelli PZERO du train arrière. Ses 485 ch sont livrés de manière progressive, de sorte que cette Challenger SRT n'est pas une voiture intimidante, malgré la trame sonore du V8, délicieuse et accentuée par l'échappement actif qui se tait en vitesse de croisière.

Des deux boîtes de vitesses proposées, la manuelle à six rapports demeure plus intéressante pour son aspect tactile. Il faut toutefois accepter de négocier avec une course de levier très longue, mais précise, et une consommation de carburant très élevée en raison, entre autres, de l'absence de la désactivation de la cylindrée avec cette transmission.

Malgré cette grande cavalerie, la Challenger SRT reste une voiture particulièrement docile. La conduite à basse vitesse nécessite malgré cela une période d'adaptation, en raison du ratio de différentiel optimisé pour l'accélération. Du reste, la voiture est très confortable si l'on prend soin d'éviter le mode Track des amortisseurs Bilstein adaptatifs, beaucoup trop ferme. C'est un vrai coupé de grand tourisme.

Ce tempérament a évidemment un effet sur le comportement routier. On sent le poids élevé, surtout en milieu de virage. 

Les mouvements de caisse sont toutefois bien contrôlés, à condition, encore là, d'éviter le mode Track des amortisseurs qui semble beaucoup trop déporter le véhicule lorsque la route se fait moins lisse. La direction, précise, n'a pas la finesse de celle de la Mustang ou de la Camaro. Le freinage, appuyé par d'immenses étriers Brembo empruntés à la version Hellcat, est en outre très performant et très bien dosé.

Une question reste toutefois en suspens. Cette version SRT vaut-elle la peine d'être considérée en comparaison avec la livrée R/T Scat Pack, moins chère et outillée du même moteur ? C'est moins certain. Qu'à cela ne tienne, l'approche de la Challenger SRT demeure pertinente, avec un bon raffinement et un positionnement différent des rivales, mais les versions moins onéreuses méritent d'être considérées.

PHOTO FOURNIE PAR DODGE

Dodge Challenger SRT 2016 - crŽdit: Dodge

Fiche technique

Version à l'essai : SRT

Prix (avec options et transport) : 61 110 $

Moteur : V8 ACC 6,4 L

Puissance : 485 ch à 6000 tr/min

Couple : 475 lb-pi à 4200 tr/min

Transmission (modèle à l'essai) : manuelle à six rapports

Architecture motrice : moteur longitudinal avant, propulsion

Consommation (ÉnerGuide) : 13,9 L/100 km (super recommandée)