En près d'un demi-siècle de métier, il ne m'était jamais arrivé encore d'avoir à évaluer une voiture sans vraiment la voir. Encore moins, sans en connaître les principales données techniques. Cette cachotterie a été ficelée par Lexus qui nous avait invités à prendre le volant de la version 2014 de ses modèles d'entrée de gamme, les IS 350 et 250 4WD qui ne seront dévoilés officiellement que dans quelques semaines en marge du salon automobile de Detroit et, par la suite, à Montréal.

Désireux de créer un certain suspense, les responsables de la marque de prestige du groupe Toyota avaient donc pris soin de nous révéler leur secret qu'à moitié en camouflant habilement la carrosserie de la voiture à l'aide d'une pellicule adhésive bariolée masquant la silhouette véritable du véhicule. On a même prolongé le mystère en se gardant de nous révéler l'entièreté des caractéristiques techniques de cette nouvelle IS.

Le message que l'on tenait surtout à faire passer à travers ces prototypes banalisés était que la voiture a subi une véritable métamorphose. En somme, ni les chiffres, ni les astuces techniques ne pouvaient nous influencer ou nous détourner du but ultime de l'ingénieur en chef du projet, Junichi Furuyama, soit de créer un modèle axé sur le plaisir de conduire. Pas bête, même si cela va totalement à l'encontre du principe qu'une auto se doit d'être belle pour bien se vendre. En revanche, aimer une voiture sans savoir de quoi elle a l'air est un acquis précieux.

La fierté de M. Furuyama

Dans la catégorie des voitures dont le plaisir de conduire est bien ancré dans leurs gènes, Lexus était un peu à la traîne, si l'on fait exception de son modèle IS-F à moteur V8 de 416 chevaux. Cela ne signifie pas nécessairement que l'IS actuelle est une voiture négligeable, mais que dans un match comparatif, elle aurait du mal à se défendre contre une BMW de série 3, une Mercedes-Benz de Classe C ou une Audi A4.

D'où la prise en charge de la nouvelle version par l'ingénieur Furuyama et son équipe. La première étape du renouvellement de l'IS passait d'abord par une parfaite communion entre la voiture et son conducteur. D'ailleurs, quand on demande à M. Furuyama ce dont il est le plus fier dans sa dernière création, il répond sans hésiter que c'est la direction pour les sensations de route qu'elle procure et sa rapidité. La présence d'un petit volant à gros pourtour ajoute à cette impression de faire parfaitement corps avec la voiture. L'ingénieur japonais qui a aussi élaboré la Yaris et le camion Tacoma considère la rigidité du châssis comme l'élément crucial d'une bonne tenue de route. À cette fin, la structure de l'IS a été renforcée par le biais d'un plus grand nombre de points de soudure (dont certains au laser) et d'adhésifs. La suspension avant reprend essentiellement celle de la Lexus GS, mais avec des barres antiroulis 20% plus fermes. Allongée de 7,5 cm et légèrement élargie, cette IS 2014 propose de meilleures places arrière que ses rivales et un niveau sonore moins importun.

Impressions de conduite

Le contenu sous le capot est demeuré secret, mais il semble que l'on ait affaire aux mêmes moteurs V6 avec des puissances légèrement en progrès allant de 200 (IS 250) à 300 chevaux (IS 350) qui s'expriment chacun avec une agréable sonorité sportive. Une chose est sûre et c'est que ces motorisations ne seront offertes qu'avec une boîte de vitesses séquentielle à huit rapports.

Le hasard a voulu que nous conduisions l'IS 350 par un temps pluvieux sur un petit circuit aménagé dans un terrain de stationnement. En moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire, il était évident que cette version 2014 diffère carrément de l'ancienne au plan dynamique. Son agilité est absolument remarquable et la voiture s'inscrit en virage avec une adhérence peu commune. J'irais jusqu'à dire que je n'avais jamais conduit une voiture aussi sûre sur un pavé détrempé.

Même dans les changements de trajectoire brusques, la résistance au sous-virage est étonnante, bien qu'il faille créditer ici la présence de la traction intégrale offerte dans la gamme IS. En annulant le contrôle de la traction, cette nouvelle Lexus repousse très loin les propensions au tête-à-queue. Comme beaucoup de berlines sportives, la future IS peut compter sur une suspension sur mesure qu'un simple bouton fait passer en quatre modes différents: éco, normal, sport et sport+. Ce dernier réglage procure des changements de vitesse et des accélérations plus rapides.

 

Sans visage

Un autre aspect qui a fait l'objet de recherches poussées est la qualité des sièges avant. Par leur forme concave, ils offrent un maintien exceptionnel et, surtout, un confort qu'une victime de maux de dos chroniques comme l'auteur de ces lignes est en mesure d'apprécier.

La position de conduite ne saurait être mieux étudiée et on en retire l'impression que tout a été conçu dans un souci d'ergonomie parfaite, comme dans une voiture de course. Face au conducteur, un cadran circulaire multifonctions affiche la vitesse, les tours-minute ainsi qu'un économètre tandis que les autres instruments sont en périphérie. Quant au reste du tableau de bord, il était lui aussi masqué par du ruban gommé et il faudra attendre au 15 janvier pour pouvoir mettre un visage sur cette nouvelle Lexus IS. On la dit très belle, avec une touche de LFA (le coupé sport hors de prix de la marque japonaise) et des accents du concept LF-CC. C'est à voir.

Malgré son invisibilité et sans savoir à quoi ressemblera la nouvelle berline sport de Lexus, on peut au moins affirmer que les ingénieurs du constructeur nippon ont transformé radicalement les IS250 et 350 dotées de l'option F Sport. Il suffit de conduire en succession les anciennes et nouvelles versions pour s'en convaincre rapidement. Si le plaisir des yeux vient s'ajouter au plaisir de conduire expérimenté au cours de cet essai, les gens de Lexus pourront dire mission accomplie.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

Même le tableau de bord de la nouvelle Lexus IS avait été caché à la vue par du ruban gommé.