Le groupe automobile français Renault veut reprendre « dans les 12 mois à venir » les discussions avortées de fusion avec son partenaire Nissan, avant de jeter son dévolu sur un autre constructeur, possiblement Fiat Chrysler

Selon le quotidien britannique le Financial Times de mercredi, l'intention de de Renault est de rouvrir des discussions «dès que possible» afin de rendre irréversible l'alliance née il y a exactement 20 ans.

M. Ghosn nourrissait le projet d'intégrer les deux groupes, associés à Mitsubishi Motors, avant d'être soudainement arrêté le 19 novembre à Tokyo pour des malversations financières présumées et emprisonné pendant plus de 100 jours.

 «La société résultant de la fusion mènerait ensuite une acquisition afin d'être plus forte dans la lutte pour la domination mondiale avec Volkswagen et Toyota», ajoute le Financial Times.

Contacté par l'AFP, Nissan s'est refusé à » commenter des rumeurs « .

Fiat Chrysler (FCA) apparaît parmi «les cibles privilégiées», précise le quotidien. D'après deux sources interrogées, M. Ghosn avait eu des discussions «il y a deux à trois ans» avec le constructeur italo-américain, «mais la proposition avait capoté du fait de l'opposition du gouvernement français», actionnaire de Renault.  

La fusion Renault-Nissan, scénario à contre-courant des volontés japonaises

Après des semaines de tensions, Renault et Nissan ont affiché leur entente mi-mars et annoncé une gouvernance désormais basée sur le » consensus «, lors d'une conférence de presse commune au siège de Nissan à Yokohama, en banlieue de Tokyo.

Interrogé à cette occasion sur une éventuelle fusion Renault-Nissan --un scénario qui ne plaît pas au Japon-- le président de Renault, Jean-Dominique Senard, avait assuré que la question n'était pas à l'ordre du jour.  Pour le moment, l'Alliance Renault-Nissan implique certaines synergies mais les deux constructeurs conservent leur autonomie.

Il avait aussi réfuté tout problème concernant l'actionnariat. Renault détient 43 % de Nissan qui en retour possède 15 % de Renault, mais sans droit de vote, une répartition qui apparaît déséquilibrée aux yeux des Japonais.

Pour apaiser les choses, l'actuel président de Renault, Jean-Dominique Senard, avait indiqué à la mi-mars renoncer à briguer la tête de Nissan.

La volonté de Renault de se fusionner avec Nissan fait surface le même jour où un comité chez Nissan recommandé recommande « la suppression du poste de président du conseil d'administration », afin d'empêcher « la concentration des pouvoirs » entre les mains de l'ancien titulaire Carlos Ghosn.

Avant sa spectaculaire arrestation le 19 novembre pour malversations financières présumées, Carlos Ghosn présidait à la fois Nissan et Renault, une situation que le groupe japonais veut éviter à l'avenir.

Nissan veut abolir le poste qu'occupait Carlos Ghosn

« La cause principale de ces malversations est la concentration d'autorité dans les mains de M. Ghosn », a jugé le comité. « Dans les départements administratifs qui auraient pu découvrir ses agissements », le fonctionnement était « opaque » : il avait placé « des proches, dont son bras droit Greg Kelly, rendant ainsi difficile la mise au jour » de problèmes, selon la même source.

Par conséquent, « le poste de président du conseil d'administration de Nissan devrait être aboli », souligne le comité qui préconise aussi « la nomination d'une majorité d'administrateurs indépendants ».

Par ailleurs, le patron exécutif de Nissan « ne pourra être dans le même temps employé de Renault ou Mitsubishi Motors ». Il s'agit d'« éviter des conflits d'intérêts », a expliqué le co-président du comité, Seiichiro Nishioka, lors d'une conférence de presse dans un hôtel de Yokohama (banlieue de Tokyo), non loin du siège de Nissan.

Parmi les autres propositions, figure la mise en place de comités distincts (nominations, audit et rémunérations), pour plus de transparence.

Aucun mot sur les participations croisées qui unissent Nissan et Renault, alors que refait surface dans la presse le projet de fusion. Or, justement, toutes les propositions du comité érigeraient des cloisons entre les deux constructeurs et vont dans la direction opposée d'une fusion.

Ce rapport a été soumis mercredi au conseil d'administration de Nissan, qui entend mettre en place les préconisations d'ici juin, date de l'assemblée générale ordinaire d'actionnaires.

PHOTO PAUL SANCYA, AP

La fusion avec Nissan, telle qu'envisagée par Renault, serait le prélude à une offre semblable à FCA pour créer un géant mondial de l'automobile.