Présentée sous la forme d'une étude au Mondial de l'auto il y a cinq ans, la Sport Turismo, énième déclinaison de la Panamera, propose essentiellement des fonctionnalités accrues comme des places arrière plus spacieuses et un coffre plus volumineux. Dans les faits, il n'en est rien. Il s'agit d'abord et avant tout d'un exercice de style.

Dans le monde automobile d'aujourd'hui, les excentricités sont d'autant plus appréciées qu'elles se font rares. La familiale de chasse - style autrefois artisanal visant à emmener les chiens - appartient à cette catégorie peu fréquentée, mais qui crée des mythes sous les blasons Aston Martin, Lamborghini et Lotus. Le constructeur allemand, toujours à la traque du nouveau client, estime qu'il était temps de réhabiliter le genre. Était-ce bien nécessaire?

Une autre Panamera sans doute, mais celle-ci a le mérite d'être visuellement différente. Fortement inspirée de l'étude éponyme présentée au Mondial de l'auto de Paris en 2012, la Sport Turismo descend dans la rue. Les proportions du modèle de série sont semblables à celles du prototype, mais le coup de crayon apparaît ici moins fin.

Légèrement plus haute que la version standard (+5 mm), la Sport Turismo assure aux passagers des places arrière un meilleur accès à celles-ci. Autre particularité propre à ce modèle: une configuration à cinq places. N'en croyez rien. Il serait ici plus juste de parler de 4+1, puisque personne ne voudra prendre place dans la partie centrale, même sur une courte distance. L'assise est plate et dure et, qui plus est, le pauvre occupant devra chevaucher le très imposant tunnel de transmission qui se trouve à ses pieds. Ridicule. Et ce qui l'est encore davantage, c'est que la configuration à quatre places avec deux sièges individuels est proposée moyennant un supplément.

Moins incliné, le hayon à commande électrique bénéficie pour sa part d'un volume de coffre augmenté de 20 litres (520 litres ou 420 litres pour la version hybride) par rapport à la Panamera standard.

C'est peu, mais c'est toujours cela de pris. Les trois dossiers (40/20/40) peuvent être rabattus ensemble ou séparément, ce qui ajoute à la modularité de cette auto. En escamotant tous les dossiers, la surface de chargement est quasiment plane, le volume de chargement atteignant alors près de 1390 litres pour les versions à essence et 1295 pour la déclinaison hybride.

Parmi les originalités de ce modèle, mentionnons la présence d'un aileron escamotable. Positionné au sommet de la lunette, celui-ci s'incline ou se déploie en fonction de la situation et du mode de conduite. Trois positions ont été définies pour diminuer la résistance à l'air ou améliorer la stabilité. L'angle de cet aileron varie de +26 degrés à -7 degrés. Cette dernière position rétractée est active jusqu'à 170 km/h. Au-delà de cette vitesse, son angle passe automatiquement à 1 degré, en position Performance. À noter qu'en mode Sport et Sport+, cet aileron se déploie à compter de 90 km/h et ajoute un appui aérodynamique équivalant à 50 kg sur le train arrière. 

Bref, à moins de vous rendre sur un circuit doté d'une longue ligne droite, vous n'aurez jamais la chance d'en vérifier les bénéfices.

Joli écrin

À l'intérieur, l'espace ne manque pas. Les occupants sont accueillis dans un habitacle à l'élégance sobre, structuré autour d'une vaste console gainée de cuir qui se déploie dans le sens de la longueur qui abrite - enfin, diront certains - de véritables porte-gobelets. Dans son ensemble, l'aspect intérieur est léché et valorisant pour un véhicule de ce rang et qui commande, ne l'oublions pas, des prix assez élevés, surtout lorsque vous écumerez l'ensemble des groupes d'options, qui n'en finit plus.

On s'étonne en revanche, pour une auto aussi exclusive et soi-disant avant-gardiste, de ne retrouver qu'une seule prise USB (une seconde est offerte, mais seulement en configuration 4+1).

En outre, parmi nos doléances, mentionnons l'ergonomie très discutable de plusieurs commandes. En choisissant délibérément de faire table rase sur les boutons - et Dieu sait qu'ils étaient nombreux, mais ô combien faciles à manipuler sur la première génération de ce modèle -, Porsche n'a visiblement pas prévu une période de transition. À l'exception du sélecteur de vitesse et de cinq interrupteurs (sur la première génération, on en recensait 25), la console lisse et tactile représente un élément de distraction, puisqu'on n'a jamais la conviction d'avoir appuyé correctement sur la commande. Pour s'en assurer, il faut régulièrement quitter la route des yeux pour voir si celle-ci est en fonction ou pas. 

Il aurait sans doute été préférable d'obtenir un retour d'information tactile à la manière des Cadillac, par exemple, pour rendre l'expérience plus agréable.

Les suspensions pilotées limitent à presque rien les trépidations sur les chaussées déformées, mais à la condition de ne pas sélectionner la fonction Sport +, dont la rigidité n'a pas encore sa place sur les voies publiques québécoises... Les deux autres modes offerts suffisent pour coller - avec une étonnante ténacité - cette Porsche au bitume.

L'effet turbo

Techniquement, les caractéristiques de la Sport Turismo demeurent identiques à celles de Panamera standard. Pour l'heure, la gamme se compose de quatre modèles: 4, 4S, 4 E-Hybrid et Turbo. Cette dernière est, de loin, la plus enthousiasmante à conduire, à défaut d'être financièrement la plus abordable.

Son moteur V8 de 4 litres suralimenté assure des performances dignes d'une véritable voiture de sport avec un 0-100 km/h abattu en moins de 4 secondes.

Plutôt vif dans ses réactions, ce moteur s'acoquine hélas avec une transmission au rendement décevant. Cette dernière a beau comporter un double embrayage et huit rapports, cette boîte manque de réactivité et n'affiche pas non plus la souplesse d'une transmission conventionnelle.

Par ailleurs, de la conduite de cette «familiale excentrique», on retient surtout une direction rapide capable de faire oublier le poids du véhicule pour peu que la route ne soit pas trop sinueuse. La Sport Turismo préfère les grands espaces et négocie les virages avec une étonnante stabilité pour un véhicule de cet encombrement. Bref, on se surprend encore de voir cette auto pesant près de 2 tonnes plonger à la corde des virages sur ses disques surdimensionnés et s'en extraire avec pareille force.

Comme pour toutes les déclinaisons qu'elle produit, Porsche ne communiquera jamais les ventes de cette version Sport Turismo qui, à défaut d'être aussi spacieuse et fonctionnelle qu'elle le prétend, apporte néanmoins un zeste de folie à une catégorie autrement bien conservatrice.

Les frais d'hébergement liés à ce reportage ont été payés par Porsche Canada.

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Fiche technique

L'ESSENTIEL

Marque/Modèle: Porsche Panamera Sport Turismo

Déclinaison à l'essai: Sport Turismo Turbo

Fourchette de prix: De 109 700 $ à 175 600 $

Frais de transport: 1250 $ (préparation en sus)

Garantie de base: 4 ans/80 000 km

Consommation réelle: 10,9 L/100 km

Rivales à surveiller: Audi RS7, BMW 6 Gran Turismo

Pour en savoir plus: www.porsche.ca

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TECHNIQUE 

Moteur: V8 DACT 4 litres suralimenté

Puissance: 550 ch entre 5750 et 6000 tr/min

Couple: 567 lb-pi entre 1960 et 4500 tr/min

Poids: 2035 kg

Rapport poids/puissance: 3,7 kg/ch

Mode: Intégral

Transmission de série: Automatique 8 rapports à double embrayage

Transmission optionnelle: Aucune

Diamètre de braquage: 11,9 m

Freins av-arr: Disque / Disque

Pneus (av-arr): 275/40ZR20 - 315/35ZR20

Capacité du réservoir: 90 L

Essence recommandée: Super

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ON AIME

Stabilité incroyable

Suspensions prévenantes

Style discutable, mais exclusif

ON AIME MOINS

Configuration 4+1 ridicule

Boîte peu réactive

Ergonomie des commandes