C'est donc ici que tout a commencé. Il y a 70 ans. La 356 marque l'entrée officielle de Porsche dans le cercle des marques sportives et haut de gamme. À l'occasion de cet anniversaire, quatre unités de ce modèle mythique ont quitté le musée où elles sont exposées pour reprendre une nouvelle fois la route aux mains d'une poignée de journalistes internationaux, sans restriction aucune, sur un parcours de 148 kilomètres.

À l'époque, la genèse de cette voiture, élaborée dans les années 40, n'était pas très claire. Conçue sous la direction de Ferry Porsche, la 356 semblait dérivée assez étroitement de l'antique VW Coccinelle conçue avant la guerre par son père, le célèbre ingénieur Ferdinand Porsche. D'ailleurs, la 356 en conserve intégralement l'architecture à moteur arrière en porte-à-faux, et en substance, les trains roulants ainsi que la base du moteur à quatre cylindres à plat opposés et refroidi par air. 

Nombreuses épreuves sportives 

La 356 a participé à de nombreuses épreuves sportives et notamment enregistré des victoires aux 24 Heures du Mans et aux Mille Miglia. La robustesse de la constitution de la 356 lui a valu aussi de se constituer un joli palmarès flatteur dans les plus grands rallyes de l'époque (Liège-Rome-Liège et Monte-Carlo). Ces succès ont largement contribué à la reconnaissance du modèle, mais aussi à asseoir la réputation de la marque.

Au cours de sa longue carrière (1948-1965), plusieurs mécaniques ont trouvé refuge sous le minuscule capot arrière des 356. Le quatre-cylindres à plat refroidi à l'air s'est ainsi doté d'une culasse distincte, puis d'une série de transformations afin de varier la cylindrée, qui atteindra 2 L (130 ch). Pour les collectionneurs, la variation 356 B 2000 GS Carrera 2 Cabriolet est la plus exclusive (34 unités produites) et se vend actuellement plus de 1 million de dollars.

Un moteur d'ascendance Volkswagen

Gavé par deux carburateurs, le moteur de 1,6 L de la 356A 1600 Super apparu en 1954 ressemblait étrangement à celui de Volkswagen. Seulement en apparence. Le bloc moteur en fonte propre aux moteurs VW de l'époque avait été fondu dans un matériau plus noble, l'aluminium. Le carter comptait trois parties et les alésages de la tête et du pied des bielles enduits de chrome et ensuite polis. Beaucoup d'efforts pour atteindre 59 ch et 81 lb-pi de couple...

La 356 est destinée aux amateurs de conduite. Son pilotage demande un engagement physique absolu ; c'est un rodéo qui mouille les tempes et les aisselles. Le volant rend coup pour coup la moindre déformation du bitume, tandis que la caisse vous suspend au-dessus de la route sans filet... Et pourtant, on adore se faire piéger par sa boîte de vitesse capricieuse et se faire peur chaque fois que l'on appuie sur la pédale de frein, spongieuse comme un gâteau des anges.

Priorité sport absolue

L'aménagement sommaire reflète la priorité absolue donnée à la performance sur le confort. Celui de ce coupé 356, pourtant davantage taillé pour le voyage que pour la course, se débarrasse de tout élément superflu. Rassurez-vous, on y trouve tout de même un autoradio. Malgré la proximité avec le siège d'à côté et l'encombrant volant à jantes fines, la position de conduite, dominante, convient à tous les gabarits.

Pas de ceintures de sécurité, encore moins de coussins gonflables. Ici, on se retrouve comme enserré dans le cockpit d'un avion de chasse, avec le tableau de bord truffé de cadrans et étincelant de chrome et de laque vernie sous le nez, juste derrière le grand volant de couleur ivoire. Il ne faut pas craindre de l'empoigner avec énergie, car la conduite va s'avérer physique !

Un bloc d'instrumentation plutôt optimiste.

La vitesse maximale inscrite au compteur ne sera jamais atteinte au volant de cette 356 A de 1956. Les plus téméraires pourront atteindre 165 km/h et les plus habiles mettront près de 11 secondes pour atteindre les 100 km/h. Bien avant d'atteindre cette vitesse déjà, les remous d'air et le bruit de roulement des pneus vous placent au coeur d'un orchestre qui n'éprouve aucun complexe à se faire entendre.

Chaque coup de volant donne envie d'en remettre. La 356 à la voix de crécelle vous jette d'un virage à l'autre en débordant parfois de la trajectoire qu'on lui dessine. Et pourtant, lorsque les bosses n'osent plus menacer les suspensions, que les quatre roues ont cessé de glisser mollement, que le moteur a hurlé toute sa peine, on comprend à quel point l'automobile d'aujourd'hui est infiniment plus banale.

Note de la rédaction : Les frais de transport et d'hébergement ont été payés par Porsche AG, qui n'a exercé aucun droit de regard sur le contenu du reportage.