Au départ, il s'agissait simplement de faire un spectacle dans le cadre du Festival de la gargouille de Saint-Narcisse-de-Beaurivage, au sud de Québec. Un groupe d'amis a eu l'idée d'organiser une course avec des tracteurs de pelouse, un peu comme on en faisait déjà aux États-Unis. Douze ans plus tard, le sport est chez nous plus dynamique que jamais, et il se pratique été comme hiver!

«Les gens rigolent encore quand on leur parle de courses de tracteur de pelouse, explique Éric Lemay, président des Courses de tracteur de pelouse du Québec. Mais le sport a vraiment évolué, c'est rendu plus sérieux, c'est vraiment de la course.» On peut être sceptiques, mais lorsqu'on voit - et qu'on entend! - les tondeuses à quatre roues filer à plus de 80 km/h en pratiquant de longs dérapages contrôlés, on ne peut faire autrement qu'être impressionné.

Bon, d'accord, mais pourquoi diable voudrait-on piloter un véhicule dont la principale fonction est de tondre la pelouse? «Parce que j'aime bien ça, faire parler de moi, avoue Kevin Côté, pilote depuis maintenant quatre ans. La course de tracteurs de pelouse, ça ne ressemble à rien, c'est original.» C'est un collègue qui a initié Kevin au sport, lui qui n'avait jamais fait de course automobile auparavant. Et comme il n'y a probablement pas de forme de sport auto aussi abordable que les tracteurs de pelouse, le jeune homme de Drummondville a attrapé le virus de la course, si bien qu'il donne aujourd'hui un coup de main à l'organisation des épreuves.

Le premier tracteur de Kevin Côté en catégorie Super Stock lui a coûté 1000$, et il était fin prêt pour la course - «sur la coche», nous a-t-il précisé. On peut le traîner d'une piste à l'autre avec une remorque toute simple que l'on peut tirer avec une voiture compacte, et les droits d'inscription pour une saison complète de cinq ou six courses dans le championnat estival CTGQ (Courses de tracteur à gazon du Québec) ne sont que de 60$.

Dans la catégorie Pro-Mod, qui regroupe les bolides les plus affûtés de la série, une machine compétitive coûte 8000$. «C'est le prix d'un seul moteur pour une stock-car de catégorie Sportsman, a illustré Éric Lemay. C'est pourquoi on accueille chaque année des pilotes de stock-car, parce que c'est beaucoup moins cher de rouler chez nous.» De même, il n'y a pas de courses éliminatoires au sein du CTGQ, si bien que tous les pilotes sont assurés de rouler jusqu'en finale, une formule qui attire son lot de pilotes. «Nous, on veut que ça demeure un spectacle, a assuré M. Lemay. On veut que les gars roulent de 13h à 16h30, qu'ils gardent le sourire et que les gens aiment ça.»

N'empêche, on prend la chose de plus en plus au sérieux: les meilleurs pilotes d'ici se rendront en Alabama en novembre pour participer aux All-American Mower Championships, et ils ont bon espoir de tirer leur épingle du jeu.

Sur la glace



Pendant que le CTGQ prenait du galon en Beauce, dans Bellechasse et dans Lotbinière, des pilotes de la région d'Asbestos ont eu l'idée, il y a huit ans déjà, de sortir leurs tracteurs l'hiver pour rouler sur la glace. Les deux univers ont évolué côte à côte, mais cette année, pour la première fois, les courses hivernales ont été organisées sous l'égide du CTGQ. Pour l'instant, les épreuves sur glace sont davantage une occasion de sortir les machines pour le plaisir en attendant l'été. Mais l'idée de créer deux championnats provinciaux parallèles est bien là, surtout à la lumière des succès enregistrés cet hiver; à Asbestos, il y a deux semaines, plus de 1150 personnes ont vu à l'oeuvre 49 tracteurs inscrits dans les 6 catégories au programme.



PHOTO FOURNIE PAR DANIEL CARRIER

Gilbert Carrier (mauve) a remporté la finale en catégorie Modifié à Asbestos.      

PHOTO FOURNIE PAR DANIEL CARRIER

En hiver, les pneus à crampons sont permis dans toutes les classes sauf Super Stock. Ce qui n'a pas empêcher Alexandre Laforest de sortir de piste, à Sainte-Clotilde-de-Horton.     

Ne touchez pas à mon tracteur!

Piloter un tracteur à gazon se situe à mi-chemin entre le kart et les bolides de type Sprint. «La géométrie des tracteurs est étroitement inspirée de celle des karts, explique Éric Lemay. On essaie de rabaisser le centre de gravité, et plus on monte en classe, plus c'est stable. Mais reste que ça peut virer à l'envers quand les roues «mordent» la surface. Et ça brasse, car il n'y a pas de suspension.» Parce qu'on tient mordicus à ce que les bolides, même lorsqu'ils sont allègrement modifiés, ressemblent en tous points à des tracteurs à gazon. «Sous mon règne, je vais tenir ça serré, assure le président du CTGQ. On veut que ça reste esthétique, il faut que ça ressemble à un tracteur.»

Les catégories

STOCK



Divisé en deux sous-classes, Super Stock et Pro Stock. Il s'agit de tracteurs à gazon d'un ou deux cylindres, d'une puissance maximale de 18 chevaux, dont le régulateur de vitesse a été débranché. On doit conserver le tablier de coupe, mais la tondeuse est bien sûr désactivée. Seule l'essence vendue en station-service est permise.

MODIFIÉ



Les modifications permises sont presque toutes destinées à améliorer le châssis. On peut concevoir une structure d'acier artisanale en atelier, pourvu que ses spécifications soient identiques à celles de tracteurs admis dans la catégorie. Moteur de 20 chevaux maximum. On permet l'utilisation d'un siège de kart et il est possible de modifier l'angle de carrossage des roues.

PRO-MOD



Les modifications au moteur sont permises, mais celui-ci doit impérativement provenir d'un tracteur à gazon. On peut notamment changer les arbres à cames, réaléser les cylindres, remplacer le volant d'inertie, etc. Les modifications au châssis sont similaires à la classe Modifié. Ainsi transformé, on a déjà vu un tracteur Pro-Mod de 110 chevaux dont le régime du moteur pouvait atteindre les 13 000 tours-minute!

OPEN



Divisé en deux sous-classes, 400cc et moins et plus de 400 cc. On s'éloigne un peu plus de l'allure traditionnelle du tracteur à gazon, mais on doit conserver un capot, la grille et des ailes sur les roues arrière. Toutes les modifications mécaniques sont permises. La cylindrée maximale est fixée à 1000 cc, mais le bloc peut provenir d'une moto, d'un VTT, d'une motoneige, etc. Seulement, le moteur doit être placé à l'avant du siège, qui ne doit pas être plus bas que le dessus des ailes arrière.