Si elle n'est pas aussi populaire qu'on l'espérait, la voiture électrique ne laisse personne indifférent au vu des réactions suscitées par notre sondage publié la semaine dernière. Les Québécois ne sont toujours pas emballés par cette auto, car elle est « toujours beaucoup moins avantageuse que la voiture traditionnelle », tonnent des lecteurs.

Le temps de recharge : trop long !

Le temps de recharge n'ayant pas été souligné en 2011 dans le premier sondage, ce paramètre n'a pu être mesuré dans celui de cet automne. Mais oui, c'est une grosse contrainte qui interpelle beaucoup de gens.

À juste titre. « La voiture électrique est le véhicule idéal pour le banlieusard ou celui qui possède une entrée privée. Je fais quoi au troisième étage pour me brancher, et de surcroît en hiver ? Ce n'est certainement pas la voiture du peuple, et ce, sans égard au prix de vente », soutient Bernard Chabot, lecteur de Morin-Heights. Ce serait cependant oublier les efforts déployés en matière de stations de recharge au Québec, l'un des mieux équipés parmi les provinces et les États. L'une des solutions passe par la recharge rapide. Il faudra néanmoins que le milieu scientifique parvienne à réduire le temps de recharge.

Le temps de recharge est l'un des points qui dérangent le plus les lecteurs. Photo: Martin Chamberland, La Presse

Mal informés, les Québécois

Les réactions au problème de recharge montrent également à quel point les gens peuvent être mal informés sur cette voiture et sur l'infrastructure existante.

Ce commentaire de Viviane Revez le résume très bien : « Si la perception des Québécois semble être la même aujourd'hui qu'il y a cinq ans, c'est sans doute parce que nous n'avons pas l'impression que l'accessibilité aux bornes a (suffisamment) changé. Or j'apprends, en vérifiant sur le web, qu'il existe maintenant 1000 bornes de recharge au Québec. Peut-être y aurait-il lieu de mieux informer les consommateurs du réseau existant ? »

Photo: David Boily, La Presse

Sacro-saints coûts

L'argent est évidemment au coeur des débats. « J'ai considéré un petite BMW i3 pas plus grosse qu'une Fiat... à 55 000 $. Mais la classe moyenne n'en a pas les moyens et ne les aura pas de sitôt », constate Richard Côté, de Saint-Malachie.

« Le revenu disponible des contribuables s'est effrité. Ceci expliquerait qu'il y ait autant de consommateurs qui n'achètent pas une automobile mais recherchent des paiements en fonction de leurs moyens financiers », ajoute Jean Livernois, de Québec. « J'y ai pensé par deux fois avant d'acheter mon dernier véhicule, un Ford Escape. Je voulais faire un pas en avant en acquérant une hybride [...] mais le coût est encore trop élevé. Vous devez constater également que la capacité de payer des Québécois s'effrite de plus en plus », considère cet autre lecteur sous le couvert de l'anonymat.

Le prix des voitures électriques est un autre point négatif pour les acheteurs potentiels. Photo: Robert Skinner, La Presse

L'autonomie : le principal problème

Sans surprise, la faible autonomie des véhicules électriques est déplorée, pour une raison toute simple répétée maintes et maintes fois.

« Il est exact que nous n'avons pas besoin d'autonomie pour le quotidien, mais il en est d'un tout autre ordre lorsque, en une seule journée, nous désirons nous rendre à Québec ou voir des amis dans Charlevoix.»

«Et là, si nous avons une voiture électrique, deux choix se présentent : louer un véhicule (à essence) ou l'autobus. Les voitures hybrides offrent cette autonomie, mais à un prix qui n'est pas attractif », résume Jean-Pierre Godbout, de Montréal.

« Il ne faut vraiment pas être pressé pour rouler électrique. C'est un ‟trip" de ville. L'autonomie est la clé de l'avenir de la voiture électrique », conclut Patrice Brunet, de Scotstown, en Estrie.

La faible autonomie est déplorée. La Chevrolet Bolt, avec son rayon d'action de 383 km, changera peu la donne car les usagers veulent pouvoir rouler 500 km. Photo: Bloomberg

Les rabais ne suffiront pas

Est-ce réellement à coups de rabais gouvernementaux que l'on réussira à convaincre les consommateurs d'acheter un véhicule vert ?

Hugues Rousseau, de Montréal, par exemple, pense que non.

« Au lieu d'offrir des rabais à l'achat, on devrait bien mieux se concentrer à fournir une infrastructure de recharge. Ce serait bâtir pour l'avenir. Les achats suivront. En ce moment, c'est hyper complexe d'avoir une borne dans un stationnement de copropriétés. Encore plus en logement. Les gens ne veulent pas changer leurs habitudes. Cessons de prétendre le contraire. »

« Il faut admettre que même avec les rabais, c'est encore plus cher qu'une Corolla », reconnaît Jean Péloquin, propriétaire d'une Nissan Leaf à L'Île-des-Soeurs.

Les rabais gouvernementaux ne sont pas la clé pour convaincre les acheteurs potentiels, disent les lecteurs. Photo: Le Soleil

L'histoire se répète-t-elle ?

N'assistons-nous pas finalement à un bégaiement de l'histoire, comme le laisse suggérer René St-Germain ?

« Ce qui a fait disparaître l'auto électrique au siècle dernier risque de se répéter dans les futures années, estime ce Lavallois. Au début du siècle dernier, on retrouvait à New York des taxis électriques, et il y avait plus d'autos électriques qu'à essence, mais le prix élevé et le manque d'autonomie ont eu raison de ce moyen de transport silencieux et écologique. »

On pourrait lui répondre que beaucoup de contraintes ont été levées depuis un siècle.

Dans le fond, n'est-ce pas la contrainte majeure du temps de recharge qui pourrait nuire définitivement à la voiture électrique ?

La Jamais contente est la première voiture à franchir le cap des 100 km/h, en 1899. Elle était électrique... Photo: Wikipédia

Mais elle fait des heureux !

Il y a tout de même d'« heureux propriétaires » de Volt ou de Leaf. Témoin, Michel Plante, de Lac-Mégantic : « J'ai besoin d'une source alternative quand je veux me rendre à l'extérieur, ce que la Volt me procure. Avec ce véhicule, j'obtiens le meilleur des deux mondes, soit l'écologie de l'électricité et le kilométrage de l'essence.»

«Ça fait du bien à mon compte de carte de crédit... », ajoute-t-il.

« Le sondage a été effectué deux ans trop tôt ! Les gros changements, surtout pour l'autonomie, s'en viennent en 2017 et en 2018. Le nombre de véhicules électriques sur les routes du Québec va doubler dans les 18 à 24 prochains mois », croit Louis Pinsonneault, de L'Île-Perrot.

Une hybride Chevrolet Volt. Photo: Bernard Brault, La Presse