Les constructeurs allemands vont accueillir à domicile, au centre de l'Allemagne, la pièce maîtresse de leur offensive pour l'électrification des voitures, une usine du géant chinois de la batterie, après la signature lundi d'un accord bilatéral.

Après des mois de tractations, Contemporary Amperex Technology (CATL), l'un des premiers producteurs de cellules de batteries électriques au monde, fournira aux industriels ce composant clé depuis sa gigantesque usine programmée près de la ville d'Erfurt, à 240 km au sud-ouest de Berlin.

photo REUTERS

Le président du fabricant de batteries chinois CATL, Robin Zeng, lors de la conférence de presse où la construction de l'usine allemande a été annoncée.

Retard européen dans les batteries

Le projet a été officiellement signé lundi après-midi à Berlin, en présence du Premier ministre chinois Li Keqiang et de la chancelière Angela Merkel, qui s'en est félicitée, tout en prenant acte du retard européen dans ce secteur des batteries de voiture.

«Il faut reconnaître qu'aucun investissement pour fabriquer des batteries en Europe n'a été initié par des firmes européennes», a déploré la chancelière lors d'une conférence de presse suivant la signature de 22 nouveaux partenariats.

«CATL possède le savoir-faire pour produire en masse (...) Ce savoir-faire n'est pas encore en Europe», a aussi concédé lundi lors d'une conférence de presse le directeur des achats de BMW, Markus Duesmann.

Le groupe a déjà passé un contrat d'une valeur totale de 4 milliards d'euros avec le mastodonte chinois CATL, basée à Ningde en Chine et cotée depuis juin à la Bourse de Shenzhen.

Maître du cobalt

Ce projet sino-allemand intervient alors que l'Union européenne tergiverse pour se doter d'un «Airbus des batteries», soit un plan justement destiné à éviter la dépendance énergétique vis-à-vis de l'Asie, maître incontesté du stockage d'électricité.

Mais les constructeurs allemands, lancés dans une offensive pour préparer la sortie des moteurs à combustion, ont eux d'ores et déjà renoncé à investir directement dans la très coûteuse production de batteries électriques, conscient que le retard accumulé serait difficile à rattraper.

Les constructeurs européens développent bien des moteurs électriques, et des composants électroniques pour augmenter la puissance énergétique, mais se sont désintéressés de la chimie des cellules nécessaires aux batteries.

Ainsi l'équipementier allemand Bosch a renoncé cette année à produire ses cellules, calculant qu'il faudrait 20 milliards d'euros environ pour devenir un acteur de premier plan dans la prochaine décennie.

Le chinois CATL dispute ainsi la place de leader mondial de la batterie lithium-ion pour voitures électriques au japonais Panasonic, allié au californien Tesla, dans un marché entièrement dominé par les firmes asiatiques.

1000 emplois

La future usine, qui pourrait créer jusqu'à 1000 emplois, sera implantée en Thuringe, une région d'ex-Allemagne de l'Est encore à la traîne économiquement mais qui peut espérer devenir «l'un des plus importants sites européens pour la technologie des batteries», s'est réjoui lundi le ministre régional de l'Economie de ce Land, Wolfgang Tiefensee.

Le groupe BMW a précisé lundi vouloir conserver la maîtrise de l'approvisionnement en cobalt, matière première des futures batteries. Les conditions d'extraction de ce minerai en Afrique sont considérées comme parfois douteuses, notamment lorsque des enfants sont employés dans les mines.

«Nous achèterons nous-mêmes les matières premières auprès des fournisseurs et les mettrons à la disposition du producteur (de cellules)», a précisé le responsable des achats BMW, chiffrant à un demi-milliard d'euros cet investissement.