En débarquant à Montréal, Sébastien Buemi a remarqué que « les gens n'[avaient] pas l'air contents d'avoir ces courses de Formule Électrique » (FE) qui débuteront demain au centre-ville. Une constatation qui étonne plus ou moins le pilote champion du monde en titre de FE, conscient qu'il a un rôle d'éducation à remplir qui va au-delà du mandat traditionnel de pilote de monoplace. Pour lui, comme pour son patron Alain Prost, grand artisan de l'émergence de cette discipline, la FE a sa raison d'être.

Enthousiaste, Sébastien Buemi pourrait fort bien mettre la main sur une deuxième couronne mondiale de suite, cette fin de semaine à Montréal, en clôture de cette troisième saison de Formule E. Convaincu, le pilote belge l'est. Convaincu de l'avènement de la voiture électrique dans un avenir plus ou moins rapproché et, par ricochet, de la pertinence du championnat du monde de FE.

« La Formule E, c'est pour promouvoir les véhicules électriques dans les centres-villes, assène-t-il. C'est pourquoi il est important d'avoir des courses au centre-ville, et non pas au circuit Gilles-Villeneuve. Un circuit de 5 ou 6 km, par exemple, serait évidemment beaucoup trop long. [...] »

« Dans le futur, c'est sûr, il n'y aura quasiment que des voitures électriques. La FE est donc une plateforme pour développer ça et pour montrer aux gens que vous pouvez avoir des voitures électriques puissantes et le fun à conduire. »

- Sébastien Buemi, champion du monde en titre de Formule E

À ses côtés, son patron, copropriétaire de son écurie Renault e.Dams, l'a manifestement convaincu de l'intérêt de ce championnat. Mais son patron n'est pas n'importe qui. Quadruple champion du monde de Formule 1, Alain Prost a donné un sacré coup de pouce à la naissance de la Formule E il y a trois ans, lancée par la Fédération internationale de l'automobile (FIA).

Le Suisse Sébastien Buemi, s'installe derrière le volant de sa Renault e.Dams pour un ajustement. Photo: Presse Canadienne

« J'ai toujours suivi ce projet de courses de voitures électriques, nous a expliqué hier soir Alain Prost. Je me suis dit qu'il fallait y aller, j'ai toujours eu le désir de voir les choses de manière différente, je n'aime pas la monotonie. J'ai poussé Renault un peu à venir. [...] On a commencé sans savoir ce que cela pouvait donner. L'objectif était de donner de la crédibilité à la voiture électrique, d'attirer un public plus jeune. Tout cela a été réussi. Mais de là à dire qu'on aurait aujourd'hui 10 constructeurs, dont les plus grands au monde, dans cette série, on ne pouvait pas le savoir il y a trois ans. »

Trois ans plus tard, Renault a été rejoint en FE par Audi, Peugeot-Citroën, Jaguar, BMW, Mahindra, Faraday. Dans deux ans, Mercedes-Benz se joindra à eux. Ce matin, Porsche en fera l'annonce à son tour.

« Ça veut dire que ce n'était pas une mauvaise idée », fait remarquer Alain Prost, conscient qu'il y a « encore beaucoup à faire » et conscient que les législations dans le monde poussent les constructeurs à investir dans la FE.

Alain Prost, copropriétaire de l'écurie Renault e.Dams et légende de la Formule 1. Photo: Olivier Pontbriand

«Il ne faut pas comparer les circuits»

Aguerri à la F1, vainqueur une seule fois d'ailleurs sur le circuit Gilles-Villeneuve, Prost voit Montréal d'une autre manière. « Il ne faut pas comparer les circuits, dit-il. On fait des circuits de FE en ville parce que les voitures électriques ne sont pas adaptées à des circuits traditionnels. [...] »

« Si vous roulez sur un circuit de plus de 4 km comme le Gilles-Villeneuve, dans les grandes lignes droites, avec l'autonomie, ce n'est pas possible. [...] Ce serait une erreur de comparer une FE à une F1. »

- Alain Prost

Le célèbre pilote français a eu vent des plaintes concernant l'organisation du Grand Prix de FE au centre-ville de Montréal.

L'an dernier, à Paris, la première course du genre n'a pas été accueillie avec des fleurs. « J'ai fait des réunions moi-même avec des riverains pour leur expliquer ce que cela allait être. La première année, ça a été difficile. La deuxième année, ça s'est beaucoup mieux passé. [...] C'est un circuit éphémère, avec du béton, des grillages, des restrictions de la FIA. La première année, c'est difficile, c'est sûr. »

Son pilote Sébastien Buemi, leader du championnat du monde, reste convaincu : « Il n'y a pas un championnat dans le sport auto qui a un avenir plus prometteur que celui de la FE. [...] C'est super pour Montréal d'être au début de quelque chose. C'est vraiment le futur. »

Sébastien Buemi, au volant de sa Renault e.Dams lors du GP de Formule E de Berlin le 10 juin dernier.