(Montréal) Sebastian Vettel a bien failli mettre un terme à la domination des Mercedes, hier au Grand Prix du Canada, mais une décision controversée des commissaires a plutôt offert la victoire à son grand rival Lewis Hamilton.

L’Allemand Sebastian Vettel, qui était parti de la position de tête, a terminé les 70 tours du Grand Prix du Canada au premier rang, mais il a été pénalisé de cinq secondes après avoir failli causer une collision avec Lewis Hamilton. Le Britannique, qui a terminé 1,4 seconde derrière son rival, a donc hérité de la victoire.

L’incident décisif est survenu au 47e tour de l’épreuve quand Vettel a perdu la maîtrise de sa Ferrari à l’entrée du virage 3-4. Les commissaires ont jugé qu’il était revenu en piste de façon dangereuse après avoir roulé dans le gazon. Coincé entre son rival et le mur, Hamilton a dû freiner. Il s’est ensuite contenté de suivre Vettel jusqu’à l’arrivée.

Le vainqueur a reconnu : « Ce n’est pas de cette façon que j’aurais voulu gagner la course, c’est certain, et la victoire me laisse un sentiment un peu vide. J’étais plus rapide que lui à ce moment de la course, j’essayais de le pousser à la faute et j’ai voulu saisir ma chance quand il est sorti de la piste. J’avais l’avantage dans le virage, mais il est revenu devant moi et je ne l’ai évité que de justesse en freinant violemment. »

« On n’est pas censé reprendre la ligne de course quand on sort de la piste, mais il l’a fait… » — Lewis Hamilton

Vettel a finalement dû se contenter du deuxième rang, tout juste devant son coéquipier monégasque Charles Leclerc. Le Finlandais Valtteri Bottas (Mercedes), le Néerlandais Max Verstappen (Red Bull), l’Australien Daniel Ricciardo (Renault), l’Allemand Nico Hülkenberg (Renault) et le Français Pierre Gasly (Red Bull) ont suivi au classement.

Le Québécois Lance Stroll, qui partait de la 17e place, a signé sa meilleure performance de la saison pour revenir à la 9place (voir autre texte en écran 3).

Il s’agissait d’une septième victoire pour Hamilton au Canada, ce qui lui permet d’égaler un record de Michael Schumacher. « Les spectateurs sont toujours extraordinaires ici, et c’est sûrement l’un de mes trois Grands Prix préférés, tout près de celui de Grande-Bretagne, chez moi. »

Le Britannique a été un peu chahuté sur le podium, mais Vettel s’est empressé de rappeler à la foule que son rival n’avait rien à voir dans cette affaire et que c’était plutôt la décision des commissaires qu’il fallait critiquer…

Avec maintenant cinq victoires et deux deuxièmes places en sept courses, Hamilton a porté son avance au Championnat du monde à 62 points sur Vettel. Son coéquipier Valtteri Bottas, quatrième hier après une course rendue compliquée par une mauvaise performance en qualifications, est relégué à 33 points.

Des ennuis en coulisses

Au-delà de la manière, la victoire d’Hamilton constitue une belle récompense pour l’ensemble de l’équipe Mercedes. Les mécaniciens ont découvert une fuite hydraulique sur la voiture du quintuple champion du monde samedi soir et, pour éviter une pénalité, ils ont dû patienter jusqu’à hier matin pour démonter le moteur et effectuer la réparation. L’opération nécessite habituellement près de six heures, mais ils l’ont complétée en un temps record.

« Les gars ont été incroyables pour réparer la voiture. C’était un défi massif de retirer le moteur comme ça, à quelques heures de la course, mais nos gars sont les meilleurs et j’avais pleine confiance en ma voiture. »

Le directeur de Mercedes, Toto Wolff, a ajouté : « Nous avons eu un de nos week-ends les plus difficiles de la saison, avec des ennuis mécaniques sur les deux voitures. Nous n’étions même pas certains de pouvoir amener la voiture de Lewis sur la grille de départ. Tout le monde a fait un travail fantastique, et Lewis a encore effectué une course remarquable dans des conditions qui n’étaient pas parfaites pour lui. »

De la décision des commissaires, Wolff a estimé : « Une telle décision, ce n’est jamais noir ou blanc, et chacun a une opinion différente. Parfois les décisions vont en votre faveur, parfois elles vont contre vous. Il faut toutes les respecter… »

La colère de Ferrari

Pas sûr que Vettel et Ferrari vont respecter la décision rendue hier par les commissaires. En course, l’Allemand n’a pas caché sa colère quand son équipe l’a avisé de sa pénalité : « Où diable devais-je aller ? J’ai été chanceux de ne pas frapper le mur. C’est incroyable, ils nous volent la course ! Ce n’est pas juste ! »

Quand son directeur Mattia Binotto a tenté de le calmer, Vettel a plutôt continué : « Je ne veux pas être calme. Ce n’est pas juste, ce n’est pas juste. Je suis en colère et je crois être en droit de l’être. »

Et en fin de course, alors qu’il saluait de la main les spectateurs, il en a remis une couche.

« Je n’avais aucune place où aller et je ne l’ai même pas vu. Dommage, une foule merveilleuse, une grande course… Merci, merci [à mon équipe]. » — Sebastian Vettel

Mon collègue Alexandre Pratt relate dans sa chronique comment Vettel a réagi en rentrant au puits de ravitaillement. De longues minutes plus tard, après avoir (un peu) retrouvé son calme, il a expliqué : « Je me suis d’abord assuré de reprendre le contrôle en piste, puis j’ai vu qu’il [Hamilton] était derrière moi. Je n’ai que deux mains, je ne pouvais en faire davantage. Je crois n’avoir fait rien de mal et je sais que je n’aurais rien pu faire différemment.

« Nous avons eu un soutien fantastique tout au long du week-end et j’entendais vraiment les encouragements de la foule dans les gradins principaux, dans l’épingle. Ç’a été une course fantastique, nous nous sommes battus toute la journée. Pour le reste, demandez aux spectateurs ! »

Prochaine épreuve : Grand Prix de France, le 23 juin 

Une procédure d'appel ?

Ferrari a indiqué hier soir qu’elle avait fait part à la FIA de son intention d’en appeler de la décision qui a privé l’Allemand Sebastian Vettel de la victoire au Grand Prix du Canada. L’équipe devait procéder dans un délai de 96 heures après la course, mais il n’est pas évident qu’elle peut légalement porter en appel ce genre de décision. Les règlements de la F1 indiquent en effet que les pénalités de temps en course sont sans appel. Il semble donc possible que le Tribunal d’appel de la FIA juge l’affaire « irrecevable ».

— Michel Marois, La Presse

La leçon de Guenther Steiner

PHOTO TIRÉE DU COMPTE TWITTER @AUTOHEBDO

Guenther Steiner, patron de l’écurie Haas

Le patron de Haas, Guenther Steiner, n’a pas la langue dans sa poche. Les amateurs de la série Drive to Survive sur Netflix ont appris à connaître un personnage coloré, qui n’a pas peur de déplaire.

Doit-on rappeler qu’il a déjà lancé le célèbre « Shut up ! » à son pilote Romain Grosjean qui se plaignait de sa voiture au Grand Prix des États-Unis en 2017 ?

Hier, il a servi le même traitement, en termes un peu plus polis, à Kevin Magnussen.

Le pilote danois a détruit sa voiture en qualifications, samedi, après avoir touché le mur des champions. L’impact a brisé une jante, et la voiture est partie en tête à queue jusque dans le muret. Les mécaniciens ont passé la nuit à remonter le véhicule pour qu’il soit prêt pour la course.

Évidemment, la journée a été un désastre pour Magnussen. Il avait dû partir des puits, en raison de l’ampleur des réparations, et il se retrouvait avec deux tours de retard encore loin de la ligne d’arrivée. C’est là que Magnussen a perdu patience.

« C’est la pire expérience de toute ma vie dans une voiture de course. De toute ma vie. » — Kevin Magnussen

Son ingénieur Gary Gannon lui a répondu calmement, mais avec fermeté : « Personne n’est heureux avec ce rythme. Les gars sont restés debout toute la nuit… »

C’est alors que Steiner a pris le contrôle des communications radio. « Ce n’est pas une belle expérience, mais assez, c’est assez. C’est assez. »

Magnussen a terminé la course au 17e rang, devant Lando Norris et Alexander Albon, tous deux victimes d’un abandon, et la terrible Williams de Robert Kubica. Il avait au moins eu le temps de se calmer avant de se présenter devant les caméras de RDS.

« C’est seulement parce que la voiture était bonne en qualifications. Mais avec les pneus que nous avions, ça ne fonctionnait pas. Nous avions bâti une si belle voiture, et c’était très frustrant.

« Je ne visais pas mon équipe avec mes propos. Nous pensions tous la même chose, pas seulement moi. Les gars ont travaillé incroyablement fort pour rebâtir ma voiture après mon erreur. Ce n’est rien contre eux. J’ai parlé sous le coup de l’émotion. »