(Monza) Charles Leclerc était censé être la future vedette de Ferrari. Dimanche, debout sur le podium emblématique de Monza, surplombant une mer de spectateurs vêtus de rouge, il a été acclamé comme s’il était l’actuel chef de file de la Scuderia.

Devenu le plus jeune vainqueur en Grand Prix avec Ferrari en Belgique, Charles Leclerc a remis une semaine plus tard l'écurie italienne sur la première marche du podium en Italie après neuf ans de disette.

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Charles Leclerc a résisté avec acharnement aux attaques du champion du monde Lewis Hamilton en fin de course. Le Britannique a terminé au 3e rang.

« En à peine plus de six mois » depuis son arrivée chez les rouges en début de saison, après un an seulement en Formule 1 avec Sauber, le Monégasque a « tout conquis : la Scuderia, l’amour du peuple Ferrari et sans doute l’avenir », résumait la Gazzetta dello Sport après son triomphe à Monza dimanche.  

Mais pour le pilote de 21 ans, tout s’est accéléré en quelques jours.

Leclerc était déjà passé dans un nouveau monde, l’automne dernier, après son embauche par Ferrari, qui allait faire de lui le deuxième plus jeune pilote de l’histoire de la marque au cheval cabré.

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Le vainqueur de Monza, Charles Leclerc (à droite, portant la casquette) et le PDG Ferrari Louis C. Camilleri célèbrent avec l'équipe après la course.

Il a franchi une nouvelle étape en signant sa première victoire en F1 --la première pour son équipe en 2019-- le 1er septembre à Spa-Francorchamps, où le héros des tifosi Michael Schumacher avait lui-même remporté son premier succès en 1992 avec Benetton.

Puis une nouvelle dimension s’est ouverte à lui avec son deuxième damier en deux semaines, dimanche à Monza, devant les fans italiens qui n’avaient plus vu un de leurs pilotes gagner à domicile depuis l’Espagnol Fernando Alonso en 2010.

Tout le monde aime les gagnants

Si devenir vainqueur en GP n’était pas suffisant, reproduire cette performance le week-end suivant est la marque des grands : le Britannique Lewis Hamilton, en bonne position pour conquérir son sixième titre mondial, a lui aussi remporté ses deux premiers succès à une semaine d’intervalle en 2007.

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Les partisans de Ferrari ont bruyamment célébré la victoire de Charles Leclerc dimanche au GP d'Italie, premier triomphe à domicile pour la Scuderia en neuf ans.

Mercredi, durant la semaine précédent le GP de Monza, quelque 10 000 tifosi s'étaient réunis à Milan pour célébrer les 90 ans de la Scuderia avec les pilotes de l'écurie. Ils donnaient certes plus de voix pour le quadruple champion du monde Sebastian Vettel, arrivé en homme providentiel à Maranello en 2015. Mais dimanche, au pied du podium de Monza, il n’y en avait plus que pour Leclerc, qui aura 22 ans le 16 octobre.

L’Allemand, lui, était occupé à s’excuser pour son tête-à-queue en début de course et l’accrochage qui a suivi avec le Canadien Lance Stroll (Racing Point), qui l’ont relégué à une bien maigre 13e place. Un résultat aux airs de passation de pouvoir.

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Sebastian Vettel a été applaudi avant la course durant le défilé des pilotes, mais pas après.

Hors piste, Leclerc a pour lui un charisme qui tranche étonnamment avec sa discrétion. Un italien impeccable également, perfectionné dans les équipes de la Botte avec lesquelles il a évolué depuis le karting jusqu’à la filière de jeunes pilotes de la Scuderia et désormais l’écurie la plus emblématique de F1.

En piste, il impressionne depuis longtemps par ses capacités de résistance à la pression et de gestion de ses émotions, fruit d’un travail effectué depuis ses jeunes années, raconte-t-il.

Sans pitié

À la pression mise par rien moins que l’ogre Hamilton, au volant de sa Mercedes, dans ses roues en Belgique et en Italie. À l’émotion de la mort de son ami Anthoine Hubert lors d’une course de Formule 2 à Spa la veille de sa victoire.

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Charles Leclerc au volant de sa Ferrari dimanche à l'Autodromo nazionale de Monza.

En 2017 déjà, le tout jeune homme s’était imposé en F2 quelques jours seulement après avoir perdu son père. Un autre drame après le décès en 2015 de son ami et mentor Jules Bianchi des suites d’un accident au GP du Japon 2014.

On pouvait s’inquiéter toutefois que la gentillesse et la politesse saluées par ceux qui le fréquentent ne jouent des tours au Monégasque, comme lors de ce duel avec l’impitoyable Néerlandais Max Verstappen (Red Bull) qui lui a coûté la victoire en Autriche fin juin.  

Poli, gentil, mais agressif aussi

Mais dimanche, en défendant face à Hamilton, Leclerc a montré qu’il pouvait lui aussi être agressif et flirter avec la limite. Sans pitié vis-à-vis de ses adversaires mais aussi de lui-même.  

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Charles Leclerc a vaincu les deux pilotes Mercedes Lewis Hamilton et Valtteri Bottas au GP de Monza.

Très --trop ?-- prompt à l’autocritique, il n’a pas manqué de pointer des « erreurs » commises au volant auxquelles « il (lui) faudra faire attention » à l’avenir. L’intransigeance, c’est cela aussi qui fait les champions.  

Quoi qu'il en soit, sa victoire dimanche lui a permis à dépasser Vettel au classement général. Il a désormais 13 points de plus que son coéquipier.

Et pendant que Leclerc célébrait sa deuxième victoire consécutive, sous les acclamations de milliers de passionnés de Ferrari, Vettel faisait grise mine après une saison décevante ponctuée d’une nouvelle maladresse à Monza. Le pilote allemand de 32 ans a commis la dernière d’une série d’erreurs en chaîne dimanche, et c’est peut-être la pire de toutes.

Et maintenant, que faire de Vettel ?

Vettel, parti de la quatrième position sur la grille, mettait de la pression sur Bottas lorsqu’il a perdu le contrôle dans la chicane Ascari au sixième tour. Pour aggraver les choses, Vettel est revenu en piste de façon dangereuse et s’est placé sur la trajectoire de Lance Stroll, heurtant même la Racing Point partie en tête à queue.

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Sebastian Vettel (de dos) est venu féliciter son coéquipier Charles Leclerc après la course.

Vettel a reçu une pénalité de 10 secondes pour conduite dangereuse. Il a également reçu trois points de pénalité, ce qui porte son total à neuf en 12 mois, à trois seulement d’une suspension d’une course.

« J’ai eu un peu de mal à relancer ma voiture qui était coincée dans l’herbe, a expliqué Vettel. J’ai donc perdu un peu de vitesse et cela a pris un peu plus de temps. Ce n’était donc certainement pas idéal, mais je ne pouvais rien voir vers la gauche. Je savais qu’il y aurait des voitures, mais je pensais que je pourrais revenir en piste plus rapidement. »

« Ne le comptez pas pour battu » prévient le patron de Mercedes

Vettel, dont le contrat se termine en 2020, a terminé 13e. Il n’a pas remporté la victoire à ses 22 dernières courses. Il est quatrième au championnat, à 115 points de Hamilton.

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Sebastian Vettel avant le GP de Monza.

Mais le directeur de l’équipe Mercedes, Toto Wolff, croit au retour en force du pilote allemand.

« Ne le comptez pas pour battu, car c’est un quadruple champion du monde, a souligné Wolff. La différence entre les grands et les bons est que les grands sont capables de se relever et je suis convaincu qu’il peut le faire. »

« Il a connu une séquence de mauvaises courses et maintenant ce sera à lui de faire ce qu’il faut pour retrouver la place qu’il mérite. Aujourd’hui, c’est assurément un mauvais jour pour lui. »

Classement général officiel du Grand Prix d’Italie

1. Charles Leclerc (MON/Ferrari) les 306 720 km en 1 h 15 : 26 665

2. Valtteri Bottas (FIN/Mercedes) à 0835

3. Lewis Hamilton (GBR/Mercedes) à 35 199

4. Daniel Ricciardo (AUS/Renault) à 45 515

5. Nico Hülkenberg (GER/Renault) à 58 165

6. Alexander Albon (THA/Red Bull-Honda) à 59 315

7. Sergio Pérez (MEX/Racing Point-Mercedes) à 1 : 13 802

8. Max Verstappen (NED/Red Bull-Honda) à 1 : 14 492

9. Antonio Giovinazzi (ITA/Alfa Romeo Racing-Ferrari) à 1 tour

10. Lando Norris (GBR/McLaren-Renault) à 1 tour

11. Pierre Gasly (FRA/Toro Rosso-Honda) à 1 tour

12. Lance Stroll (CAN/Racing Point-Mercedes) à 1 tour

13. Sebastian Vettel (GER/Ferrari) à 1 tour

14. George Russell (GBR/Williams-Mercedes) à 1 tour

15. Kimi Räikkönen (FIN/Alfa Romeo Racing-Ferrari) à 1 tour

16. Romain Grosjean (FRA/Haas-Ferrari) à 1 tour

17. Robert Kubica (POL/Williams-Mercedes) à 2 tours

Meilleur tour en course : Lewis Hamilton (GBR/Mercedes) 1 : 21 779 au 51e tour (moyenne : 255 014 km/h)

Abandons :

Carlos Sainz Jr (ESP/McLaren-Renault) : roue mal fixée 28e tour

Daniil Kvyat (RUS/Toro Rosso-Honda) : fuite d’huile 30e tour

Kevin Magnussen (DEN/Haas-Ferrari) : problème hydraulique 44e tour

Classement du Championnat des pilotes après Monza

1. Lewis Hamilton (GBR) 284 pts

2. Valtteri Bottas (FIN) 221

3. Max Verstappen (NED) 185

4. Charles Leclerc (MON) 182

5. Sebastian Vettel (GER) 169

6. Pierre Gasly (FRA) 65

7. Carlos Sainz Jr (ESP) 58

8. Daniel Ricciardo (AUS) 34

9. Alexander Albon (THA) 34

10. Daniil Kvyat (RUS) 33

11. Nico Hülkenberg (GER) 31

12. Kimi Räikkönen (FIN) 31

13. Sergio Pérez (MEX) 27

14. Lando Norris (GBR) 25

15. Lance Stroll (CAN) 19

16. Kevin Magnussen (DEN) 18

17. Romain Grosjean (FRA) 8

18. Antonio Giovinazzi (ITA) 3

19. Robert Kubica (POL) 1

Classement des constructeurs après Monza :

1. Mercedes 505 pts

2. Ferrari 351

3. Red Bull-Honda 266

4. McLaren-Renault 83

5. Renault 65

6. Toro Rosso-Honda 51

7. Racing Point-Mercedes 46

8. Alfa Romeo Racing-Ferrari 34

9. Haas-Ferrari 26

10. Williams 1