Même si de plus en plus d'observateurs pensent, comme Elon Musk, que le moteur électrique viendra remplacer complètement le moteur à essence, le grand patron du sport automobile est catégorique: la F1 était, est et restera une discipline où se brûle du pétrole.

«C'est impossible [que la F1 devienne électrique]. Ce n'est pas du tout le but. La F1 est une discipline absolument différente des autres», a lâché hier Jean Todt, président de la Fédération internationale de l'automobile (FIA).

M. Todt participait à Movin'on Montréal, un sommet sur la mobilité durable. Il a donc beaucoup été question de la Formule E, qui sera de passage dans la métropole le 29 juillet.

Même s'il se dit un grand fan de Formule E, même si sa fédération chapeaute ce championnat tout comme la F1 et même s'il pense que l'avenir appartient à l'électrique, M. Todt ne pense pas que la Formule 1 se passera un jour d'essence.

«La F1 est une formule à motorisation hybride, ce qui est un énorme pas en avant par rapport à ce qu'il y avait avant. Mais la F1, sa vocation n'est absolument pas d'être une discipline à motorisation électrique.»

L'électrification de l'industrie automobile est une tendance lourde. Selon un récent rapport de Bloomberg New Energy Finance, d'ici 2022, les voitures électriques coûteront moins cher que celles à combustion. À partir de là, l'industrie automobile pourrait changer de façon draconienne et l'auto électrique, sortir de la marge.

Malgré cela, M. Todt pense que la Formule 1 restera ce qu'elle est. Il remarque par ailleurs que les performances de la voiture électrique ne sont pas encore comparables à celles de la voiture conventionnelle.

«Pour l'instant, c'est impossible [de parler de parité] en matière de performance automobile. Actuellement, une voiture hybride est beaucoup plus performante. On sait très bien aussi que la voiture électrique est limitée en autonomie et en temps de recharge», dit-il.

Succès «absolument remarquable»

La Formule E en est à sa troisième saison et M. Todt, malgré ces quelques réserves, parle de succès «absolument remarquable». Il note que les constructeurs s'intéressent de plus en plus au championnat. «On a une dizaine de constructeurs qui désirent s'impliquer dès la cinquième saison. On a été sollicités par des villes parmi les plus grandes du monde», assure-t-il.

«Aujourd'hui, il y a des marques comme Renault qui sont en F1 et en Formule E. Vous avez Audi qui est en Formule E, vous allez avoir BMW... Il y a beaucoup de constructeurs qui sont impliqués», dit-il.

Il note que les choses avancent. À la cinquième saison de Formule E, les pilotes n'auront plus besoin de conduire deux voitures pendant une course comme c'est le cas maintenant. Un seul bolide suffira, alors que l'autonomie des batteries s'améliore sans cesse. «Ça démontre les progrès qui sont faits», dit-il.

Pour lui, le championnat de Formule E sert de «laboratoire» et de vitrine pour la voiture électrique. Il voit le sport automobile international évoluer dans une sorte de dualité: d'un côté, la traditionnelle F1, et de l'autre, la Formule E, où les développements s'accélèrent.

Le grand patron du sport automobile porte en quelque sorte deux chapeaux, tente de ménager la chèvre et le chou. D'autres sont plus tranchants, comme le fondateur de la Formule E, Alejandro Agag.

«Si l'industrie de l'auto devient 100% électrique, alors la Formule E deviendra le championnat pertinent pour l'industrie», a-t-il dit récemment à Reuters.

«Mais je pense que la Formule 1 va continuer d'exister, concède-t-il toutefois. Comme, de nos jours, il y a des courses de chevaux, et plus personne n'utilise un cheval pour se rendre au travail. Les véhicules à combustion seront probablement utilisés simplement pour la course.»