L'industrie du camionnage est en pleine ébullition. Le folklorique camion à long museau affublé de cornes de boeuf est en voie de disparition. Les impératifs économiques et environnementaux transforment l'univers du camionnage à la vitesse grand V. Tout ça pendant que l'activité économique dépend de plus en plus du transport routier.

Aux États-Unis, les camions transportent pas moins de 70 % des marchandises, une proportion qui est appelée à croître. Tout comme leurs émissions de gaz à effet de serre (GES), conséquemment. Selon l'agence de protection de l'environnement américain (EPA), les camions moyens et lourds comptent pour 23 % des émissions de GES, même s'ils ne représentent que 5 % des véhicules sur la route. Ainsi, dans la phase 2 de son plan de réduction des GES, le gouvernement américain exige d'ici 2027 une amélioration énergétique pouvant atteindre 24 % par rapport aux niveaux actuels.

Réduire la consommation de carburant (et ses coûts)

Les entreprises de transport ont donc du pain sur planche pour atteindre ces niveaux, mais à terme, cet effort représente aussi d'importantes économies en carburant - l'EPA évalue que le coût des nouvelles technologies sera amorti en deux ans seulement, le tout se traduisant par des économies de carburant globales de 170 milliards pendant la vie utile d'un camion.

« Notre moyenne de consommation de carburant était de plus de 35 L/100 km en 2005, elle est maintenant de 28 L/100 km », explique Réal Gagnon, président de Trans-West, entreprise spécialisée dans le transport réfrigéré de longue distance.

M. Gagnon donne l'exemple des rétreints de remorques, ces volets d'extension installés à l'arrière afin de réduire la traînée globale du véhicule - ils viennent d'être autorisés au Québec, avec plusieurs années de retard sur nos voisins américains. « Ça représente de 6 % à 8 % d'économie de carburant, affirme le président de l'entreprise de Lachine. Ça fait une énorme différence quand on fait 35 millions de milles par année. »

Le choc des générations

Un tel changement n'est toutefois pas facile à suivre pour tout le monde au sein d'une industrie plutôt conservatrice. « Notre défi est d'entretenir nos relations avec les nouvelles générations, reconnaît Guy Landry, directeur des ventes chez Globocam, détaillant Freightliner et Western Star. Les propriétaires de flottes ont souvent plus de 60 ans. Ils ont envoyé leurs enfants à l'école et ces derniers ne font plus des affaires en suivant leurs émotions. Les jeunes sont aussi beaucoup plus sensibles à l'environnement et aux nouvelles technologies. C'est un véritable choc culturel que subit l'industrie du camionnage. »

« L'apparition des nouvelles technologies a atteint un rythme exponentiel, explique Patrice Guay, vice-président de LPG Transports, entreprise familiale de Lévis. Il faut être créatif et ouvert d'esprit et se documenter auprès des fabricants tout en s'efforçant de voir au-delà de leurs petits calculs tout faits d'avance. »

« Pour notre part, nous avons adopté plusieurs nouvelles technologies, parce qu'on pense que notre survie en dépend, mais on ne doit pas aller trop vite et faire attention aux erreurs, enchaîne l'homme d'affaires de 43 ans. Il pourrait vraiment y avoir de l'attrition au sein de l'industrie, et c'est déjà commencé. L'époque du camionneur "owner operator", il y a de moins en moins de place pour ce modèle-là. »