Nos voitures sont plus sûres que celles de nos parents. Mais le sont-elles au point d'avoir amélioré à elles seules le bilan routier?

«Autrefois, le véhicule encaissait très peu d'énergie lors d'un impact, il était rigide. Dans les années 60 et 70, le volant était rigide, la colonne de direction n'était pas télescopique, le tableau de bord, pas aussi arrondi. Aujourd'hui, les voitures se déforment énormément sous la force de l'impact. C'est une grosse différence et une nécessité.»

Julien Dufort, ingénieur membre de l'équipe de sécurité routière de l'École polytechnique de Montréal, juge que les modifications apportées à la structure des véhicules et l'instauration de «zones tampons» absorbant les chocs ont grandement contribué à l'amélioration de la sécurité. La ceinture, les coussins gonflables, les renforts dans les portières et la résistance des toits sont autant d'éléments faisant de la voiture un moyen de transport qui, sans être le plus sûr, a subi au cours des 30 dernières années des transformations considérables pour le bien-être de ses passagers.

Simultanément, le bilan des victimes de la route s'est nettement amélioré. Au Québec, par exemple, le nombre de décès sur les routes a presque été divisé par quatre entre 1978 et 2011, selon les statistiques de la Société de l'assurance automobile du Québec (cliquez ici pour consulter le tableau statistique complet). Au-delà des multiples chiffres qu'on pourrait analyser, c'est surtout le taux de mortalité qui est le plus significatif. On recensait ainsi 28 victimes pour 100 000 habitants en 1978, année de l'entrée en vigueur du régime public d'assurance automobile du Québec. En 2011, on compte seulement 6 morts pour 100 000 habitants. Durant cette même période, le taux de blessures graves et légères a presque diminué de moitié - il est passé de 913 à 519 blessés pour 100 000 habitants.

Les chiffres sont implacables. Ce qui fait dire à Jean-Marie De Koninck, président de la Table québécoise de la sécurité routière, que «chaque nouvelle voiture est devenue une petite forteresse».

Mais pour lui comme pour la SAAQ, l'amélioration du bilan routier ne s'explique pas uniquement par les progrès techniques. «Plusieurs facteurs l'expliquent, dit-il. Parmi ceux-ci, on retrouve le fait que les voitures sont conçues de façon de plus en plus sécuritaire; que les routes sont de mieux en mieux conçues; que nos systèmes de premiers soins sont de plus en plus perfectionnés; que les lois sont de plus en plus sévères, et qu'il y a une importante amélioration des comportements des usagers.»

À la SAAQ, «nous ne sommes pas en mesure de déterminer la part de l'amélioration de la sécurité des véhicules dans l'amélioration du bilan routier», confirme le porte-parole Gino Desrosiers.

Cette part est effectivement difficilement quantifiable, mais elle apparaît tout de même très importante. «La plus grande part de l'amélioration du bilan routier est due à la sécurité des véhicules», assure Éric Salvas, policier reconstitutionniste au Service de police de la Ville de Montréal.

Lors d'une expérience de collision frontale entre une Chevrolet Bel Air 1959 et une Chevrolet Malibu 2009, réalisée il y a un peu plus de trois ans, l'Insurance Institute for Highway Safety a clairement démontré «à quel point les voitures sont plus sûres de nos jours». Et à quel point ce progrès contribue à la diminution du nombre de victimes sur les routes.

Pour l'ingénieur Julien Dufort, «l'amélioration des véhicules explique les gros changements observés dans le bilan routier». Plus que les comportements et plus que la répression. Il en veut pour preuve l'une des dernières innovations technologiques: le système antidérapage, installé sur tous les nouveaux véhicules depuis un an et demi. «Les résultats préliminaires des études sur ce système montrent une nette diminution des collisions et des sorties de route grâce à celui-ci», souligne-t-il.

Il n'en va pas de même, cependant, avec les détecteurs d'angles morts ou d'animaux, l'avertisseur de franchissement de ligne et le système anticollision. «Il n'y a pas assez de véhicules équipés de ces systèmes pour tirer des conclusions sur leur efficacité», explique le chercheur.

Les véhicules ont beau être plus sûrs, il n'en reste pas moins que le facteur humain représente la plus grande cause de collisions - 80% des cas. En somme, même si des progrès technologiques et comportementaux ont été accomplis, la machine derrière le volant demeure encore perfectible.