L'anecdote en dit long sur la réputation de la municipalité. Ça se passe dans une école secondaire de Québec, au début des années 90, pendant un match de Génies en herbe. À la question «Quelle ville est surnommée La Ville de l'automobile», un jeune concurrent répond du tac au tac: «Saint-Raymond de Portneuf». Pas Detroit. Saint-Raymond de Portneuf.

La ville de 9500 âmes, située à 45 minutes à l'ouest de Québec, compte aujourd'hui cinq concessionnaires d'autos neuves Toyota, Hyundai, Ford, Chevrolet et Chrysler , qui vendent entre 300 et 650 véhicules par année. Il y a quelques années, c'était sept concessionnaires de voitures neuves qui avaient pignon sur rue à Saint-Raymond. La réputation de la municipalité est telle qu'on la surnomme parfois «Saint-Raymond du char neuf»...

Avec le résultat qu'entre 30% et 50% de la clientèle des concessionnaires de Saint-Raymond vient de la ville de Québec. Ça vaut, semble-t-il, la peine si on veut un service affable et attentionné. Et si on veut magasiner le samedi!

«Notre force, c'est notre accueil personnalisé, soutient le propriétaire de Germain Chevrolet, Louis Moisan. Ici, on peut facilement rencontrer le propriétaire et les gens du service. L'autre facteur est le fait que l'on soit ouvert le samedi. Quand est-ce que les gens peuvent magasiner? C'est souvent le samedi parce que c'est plus pratique.»

En effet, les concessionnaires de la région de Portneuf peuvent ouvrir le samedi, malgré la directive de la Corporation des concessionnaires d'automobiles de la Régionale de Québec. «Ça ne plaît pas trop aux confrères de la ville, mais c'est une espèce de droit acquis parce que c'était déjà comme ça avant l'adoption des normes établies par la Corporation», a expliqué de son côté Claude Plamondon, propriétaire de Saint-Raymond Toyota.

Le service avant tout

C'est au milieu des années 80 que l'expression «Ville de l'automobile» a vu le jour et a été adopté dans la région. Les sept détaillants de la municipalité (Pontiac et Nissan avaient aussi des concessions à l'époque) ont eu l'idée de se faire connaître en faisant une publicité commune dans les journaux et à la télé de Québec. La campagne, qui s'est interrompue il y a quelques années, est sur le point d'être relancée. Le but: attirer la clientèle de la région de Portneuf, avec un clin d'oeil aux gens de Québec.

«Quand un client arrive de Québec, il faut que le contrat se signe sur-le-champ. Parce que s'il s'en va, il y a de fortes chances qu'on ne le revoit plus, affirme Jacques Larue, directeur des ventes chez Dalton Ford. On essaye ainsi de lui donner le plus d'informations possible. Et l'accueil est primordial: la vente se fait généralement dans les deux premières minutes suivant le moment où le client est entré dans notre salle de montre.»

Au service personnalisé s'ajoute de petites attentions qui sont plus souvent l'apanage de concessionnaires haut de gamme: lavage gratuit des voitures, navettes, plusieurs voitures de courtoisie, rendez-vous à heure fixe et même, dans certains cas, cueillette à domicile ou au bureau de la voiture du client.

Compétitifs, sans plus

Et les prix? Ils sont compétitifs, mais pas nécessairement plus qu'ailleurs, de l'aveu même de la grande majorité des concessionnaires du coin. «Aujourd'hui, les prix sont comparables à ceux de Québec. Je ne suis pas là pour jouer au scab et voler des clients à mes confrères, et j'ai un salaire à gagner, avoue candidement M. Larue. Mais, à coût égal, on devient meilleur marché à cause de notre service.»

Impression corroborée par des clients originaires de Québec rencontrés lors de notre passage à Saint-Raymond. «J'ai fait affaire avec plusieurs concessionnaires de la région de Québec, j'ai magasiné, mais c'est ici que l'on trouve le meilleur service», déclare G. Arthur Fleury, 76 ans, qui prenait possession de sa 44e voiture une Toyota Matrix 2011 ce jour-là. «La mentalité des gens de la campagne, dit-il, ne se retrouve pas à Québec. Les gars du service nous parlent, ils aiment être en contact avec les clients»

Il n'est pas le seul de cet avis. «Ça fait 30 ans que j'ai un chalet dans le secteur et j'ai entendu dire que les gens étaient entièrement satisfaits, c'est pourquoi j'ai pris mon rendez-vous ici», a indiqué pour sa part Françoise Boudreau, de Sainte-Foy, propriétaire d'une Saturn Ion 2006.

«Le fait que plusieurs personnes de Québec possèdent un pied-à-terre dans le secteur nous aide aussi à attirer et conserver notre clientèle, souligne Christian Plamondon, propriétaire de Hyundai Saint-Raymond. J'ai aussi des clients de Montréal qui ont des connaissances dans la région et qui en profitent pour venir acheter quand ils sont de passage. J'ai même des clients réguliers qui viennent d'aussi loin que La Tuque.»

Voit-on ce genre de comportement dans d'autres secteurs de villégiature? Apparemment, non. «C'est quelque chose de particulier au comté de Portneuf, soutient Serge Beaudoin, directeur général de Saint-Raymond Chrysler. Nous avons deux concessions à Joliette et les gens de Montréal n'y viennent pas. Pourquoi? Je l'ignore. Je n'ai pas encore trouvé le secret de la Caramilk!»