Pour les Chinois, qui ont accueilli à bras ouvert la dernière Buick Regal introduite chez eux depuis près d'un an, son nom ne pose aucun problème. En français, s'acheter une voiture dont l'appellation est synonyme de délice, de volupté et de jouissance, sans oublier son côté un peu kitsch rétro, n'est pas de nature à vous faire passer pour le type le plus cool du voisinage. Peu importe que ces Buick courent les rues de Pékin, on peine à avouer que l'on s'est acheté une petite Regal. Chez GM, où l'on a déjà vendu des Parisienne sans se faire traiter de s'adonner à la traite des blanches, ce dilemme est passé complètement inaperçu alors que l'on a déjà eu la présence d'esprit de retirer le nom de La Crosse pour le remplacer par Allure. Ainsi vont les susceptibilités.

Cette parenthèse fermée, précisons que la nouvelle compacte de Buick doit son existence à l'Opel Insignia (voiture de l'année en Europe en 2009), qui lui a prêté son châssis et la grande majorité de ses éléments mécaniques. En fait, elle devait traverser l'Atlantique avec le passeport de la Saturn Aura, mais cette dernière marque ayant été bazardée par GM, l'Aura est devenue Regal.

Dans sa version CXL, elle reçoit un 4 cylindres de 2,4 litres qui est un peu rachitique avec ses 180 chevaux. Il sera heureusement accompagné d'un turbocompresseur dans la future GX, ce qui portera la puissance autour de 220 chevaux secondés par une boîte manuelle à six rapports.

L'équipement de série est particulièrement généreux et comprend, entre autres, des sièges chauffants en cuir, le système de stabilité, des jantes de 18 pouces, l'accès sans clef, des rétroviseurs chauffants et une chaîne audio qui fait monter à bord les systèmes MP3 et Bluetooth. Le prix du modèle de base mis à l'essai se situe à 31 990$ auquel il faut ajouter une option de 2525$ pour un «équipement privilégié».

D'une ligne plutôt attrayante, la voiture a bonne mine et ses dimensions la situent entre une Toyota Camry et une Audi A4.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

Sur la route, la Buick Regal a un cachet européen. Sous d'autres rapports par contre, elle reste une Américaine.

Un moteur surchargé

Si son bilan est assez réjouissant, il l'eut été davantage avec un moteur autre que le 4 cylindres de base qui peine à donner une poussée adéquate aux 1630 kg qui s'inscrivent lors de la pesée. Car, 9,9 secondes pour franchir le cap des 100 km/h à partir d'un arrêt n'est pas tout à fait le genre de performance dont on se vante devant des férus de statistiques. Pas plus d'ailleurs que les misérables 8,2 secondes nécessaires pour passer de 80 à 115 km/h. Est-ce que ces chiffres sont dédommagés par une consommation frugale? Pas tellement puisque la Regal nécessite en moyenne 8,6 litres par 100 km/h pour poursuivre son petit bonhomme de chemin.

Bien que j'aie aimé cette berline sport made in Europe, je trouve qu'on lui a insufflé un peu trop les gênes d'une Buick. Ce n'est pas la chaise berçante que l'on a connue autrefois, mais il reste un arrière-goût de voiture américaine qui pourrait empêcher les acheteurs de VW Passat ou d'Acura TSX (ses deux cibles selon GM) de rentrer au bercail. Il manque à la Regal la rapidité d'exécution des commandes qui plaît tant dans des modèles concurrents.

Campée sur ses roues de 18 pouces (19 en option), la Regal n'est jamais préoccupée par les accidents de terrain. Ainsi chaussée, elle aborde avec un certain aplomb les virages en lacets tout comme les dégradations du revêtement. De telles conditions font ressortir la robustesse de la carrosserie, épargnée de tout bruit suspect. En plus, ses dimensions lui confèrent aussi une certaine agilité en milieu urbain où sa direction précise est un atout indéniable.

Ce comportement routier fidèle aux origines germaniques de la Regal est cependant légèrement assombri par un intérieur qui souffre notamment d'une habitabilité mesurée sous certains rapports. Il faut, par exemple, prendre garde de ne pas se heurter la tête sur le pavillon en prenant place à l'arrière et même à l'avant du côté passager. C'est le prix à payer pour cette ligne très flatteuse de faux coupé qui limite aussi énormément la surface vitrée. La lunette arrière haute et étroite oblige à faire preuve de prudence en marche arrière.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

Joliment dessinée, la Buick Regal est née en Allemagne sous le nom d'Opel Insignia.

Une nette progression

Une fois au volant, on apprécie les sièges aux formes bien étudiées, l'ergonomie, les généreux espaces de rangement complétés par des pochettes aumônières aménagées à l'arrière des dossiers avant. Deux grands cadrans accueillent l'indicateur de vitesse de même que le compte tours. Dommage que les petits cadrans (niveau d'essence et de température) entre les deux soient masqués par le volant.

Comme d'autres modèles avant elle, la Buick Regal s'inscrit dans le programme de redressement mis en place par General Motors à la suite de ses mésaventures financières d'il y a deux ans. Lentement, mais sûrement, le géant se réveille et semble avoir trouvé ce qui lui faisait rudement défaut dans ses créations anciennes, c'est-à-dire cette qualité tant réelle que visuelle qui émane de ses produits. Depuis longtemps, on reprochait au constructeur américain de ne pas s'inspirer suffisamment de ses filiales européennes et principalement allemandes. Avec la Buick Regal, on l'a finalement fait et le résultat est on ne peut plus louable.