Pourra-t-on un jour magasiner sa voiture neuve, puis l'acheter directement d'un site web ? Si Tesla, Audi et Cadillac, entre autres, semblent vouloir aller dans ce sens, les chances que ça se produise pour l'ensemble de l'industrie semblent plutôt minces, conviennent les experts...

Le mois dernier, soucieux de réduire les frais d'exploitation de son entreprise, Elon Musk, PDG de Tesla, a annoncé son intention de fermer un nombre important de ses succursales, aux États-Unis et ailleurs dans le monde, afin de miser davantage sur ses ventes en ligne. Toute l'industrie a réagi sans tarder, Tesla elle-même revenant sur ses paroles dans les jours qui ont suivi cette déclaration, en réduisant le nombre de commerces qui seront fermés. Dans une industrie automobile où les tâches sont traditionnellement et rigoureusement divisées entre les constructeurs et les concessionnaires, qui les représentent auprès des consommateurs, Tesla fait depuis des années office de chien dans le jeu de quilles en gérant toutes ses ventes à l'interne.

Mais puisque nous sommes en 2019, le constructeur californien n'est pas le seul à lorgner l'internet pour accroître ses ventes. C'est évidemment un refrain qu'on rejoue épisodiquement depuis une vingtaine d'années, mais ça témoigne davantage de la timidité des stratégies mises en place de façon successive que de la banalité de chacun de ces gestes. Après tout, plus de 9 acheteurs sur 10 magasinent d'abord leur prochaine voiture, neuve ou usagée, sur la Toile, confirment les études.

La firme McKinsey pousse l'analyse plus loin, estimant qu'on verra bien des ventes directes sur les sites internet des grands constructeurs dans un avenir rapproché, avec ou sans l'assentiment de leurs réseaux de concessionnaires.

« Les constructeurs sont présentement dans une position tout en contrastes : ils doivent avoir une présence web impeccable, incluant tous les outils d'achat et de comparaison imaginables, mais en même temps, les concessionnaires restent une composante essentielle au processus de vente », explique la firme d'analyse dans son rapport.

« Et pourtant, la moitié des acheteurs préféreraient effectuer toute la transaction en ligne, à condition de pouvoir faire un essai routier, ou quelque chose d'équivalent. Alors pour plusieurs, la prochaine étape sera d'offrir la vente en ligne. »

Cadillac et Audi sur les talons de Tesla ?

La vente directe en ligne intrigue le groupe Volkswagen, qui a décidé de tester cette méthode de façon limitée, du côté de sa filiale Audi. Si ça fonctionne, le groupe compte élargir cette possibilité au reste de la gamme aux quatre anneaux au courant de l'année prochaine.

Du côté de General Motors, qui a tiré des ficelles auprès du gouvernement américain ces dernières années pour tenter d'empêcher Tesla d'ouvrir ses boutiques dans certains États-clés, on a décidé d'imiter en partie son rival californien dans le marché du luxe, avec une nouvelle offensive en ligne appelée Cadillac Live. Le service a été officiellement et exclusivement lancé au Canada la semaine dernière.

Cadillac ne vend pas directement à partir de son site internet, mais s'en approche le plus possible, proposant des consultations en ligne avec ses experts, le soir. Les internautes qui utilisent ce service pourront répondre à quelques questions pour déterminer quel véhicule les intéresse, et pourront en comparer jusqu'à 10 par rencontre, grâce à une modélisation 3D des produits de la marque américaine. Un lien vidéo unidirectionnel est même offert, permettant au consommateur de voir le représentant de Cadillac (mais pas l'inverse).

« Les acheteurs de véhicules de luxe ont un horaire chargé. Que se passera-t-il si quelqu'un décide de leur offrir une expérience de magasinage qui combine la simplicité d'accès du web au service personnalisé d'un concessionnaire ? C'est en plein ce que Cadillac Live compte offrir. »

- Hoss Hassani, directeur général de Cadillac Canada

Le dirigeant rappelle que 74 % des internautes n'ont aucune loyauté envers les marques dont le site internet ne répond pas à toutes leurs questions.

Ce n'est pas encore de la vente en ligne complète, mais Cadillac s'en approche encore un peu plus. Si Tesla et Audi réussissent à faire accepter cette pratique, gageons que l'industrie automobile ne tardera pas à faire ce dernier pas pour offrir carrément ses produits par internet, comme ça se fait dans à peu près tous les autres secteurs de consommation...