L'esprit très terre à terre, ce qui nous repose des autres stylistes automobiles qui nous prennent la tête avec leurs concepts souvent abscons, Karim Habib s'applique, depuis juillet dernier, à donner formes et couleurs aux véhicules Infiniti de demain dans l'espoir d'« aider cette marque à accomplir son plein potentiel », dit-il en toute humilité.

De passage au récent salon automobile de Toronto pour y présenter deux études conceptuelles, Karim Habib ne cache pas son enthousiasme à l'égard de son nouveau défi professionnel. Diplômé de l'Université McGill, Karim Habib a commencé sa carrière chez BMW. Il y demeurera 11 ans. Il apporte ensuite ses crayons chez Mercedes-Benz, mais seulement pour deux ans. Il retourne chez BMW... De cette période yo-yo, Karim Habib ne dira rien. « J'ai beaucoup appris », expliquera-t-il tout en rappelant que les idées visuelles explorées ne s'exportent pas, même d'un constructeur allemand à l'autre. Imaginez alors lorsqu'il s'agit d'un constructeur japonais dont le siège social se trouve à Hong Kong. « C'est une tout autre culture d'entreprise à assimiler », et le styliste montréalais ne cache pas que de sortir de sa zone de confort ne lui déplaît aucunement.

« Bien au contraire, j'ai toujours été fasciné par le Japon, son art et son architecture. »

- Karim Habib

Et Infiniti semble représenter pour lui un défi très gratifiant. D'autant plus que les marques de luxe japonaises, Infiniti en tête, cherchent à trouver leur propre voie en matière de design, contrairement à la concurrence dont le style est parfois trop fortement influencé par les codes esthétiques définis par Audi et BMW, voire Mercedes. Karim Habib estime que les possibilités qui s'offrent à lui chez Infiniti lui permettront d'explorer des voies plus diversifiées tout en préservant l'identité plus humaine et plus japonaise de cette marque.

Pour l'heure, Karim Habib aiguise ses crayons, esquisse des études. Sa première réalisation, la Q Inspiration, présentée au salon automobile de Detroit en janvier dernier, donne un avant-goût de sa vision de la marque et des possibilités offertes par l'électrification des moteurs, qui procurent plus de latitude en raison de la compacité de leur propulseur.

Pour ce Montréalais d'origine libanaise, l'ère électrique représente une bouffée d'air frais pour les stylistes qui pourront davantage « jouer sur les proportions des véhicules ». Le consommateur est-il prêt ? « Je ne crois pas », dit-il. La preuve, un véhicule aussi ingénieux que « la BMW i3 ne se vend pas très bien alors qu'une Tesla Model S, aux proportions plus classiques, se vend très bien ». Un styliste doit donc trouver l'équilibre pour ne pas trop dérouter le consommateur. « En tout cas, pas tout de suite », rigole Karim Habib.