On l'entend arriver de loin. Le déferlement des décibels - dus à des échappements savamment travaillés - qui renvoient leurs grondements jusqu'en haut des tribunes (vides) du circuit de Motorland est celui d'un V8 de 550 chevaux de la Jaguar F-type Coupe R. Une sonorité à vous vriller les tympans, mais ce cri exprime seulement en partie la férocité de ce fauve dont la carrosserie fermée donne seulement l'illusion qu'il se trouve en cage.

L'étude C-X16 annonçait son arrivée, la voilà. Moins d'un an après le cabriolet, Jaguar annexe une déclinaison coupé à sa gamme F-type. Toutefois, contrairement au prototype présenté au salon de Francfort 2011 et à sa muse, l'E-type de 1961, le magnifique hayon partiellement vitré se soulève ici verticalement plutôt qu'à l'horizontale. Hormis ce détail que seuls les esthètes s'empresseront de relever, plusieurs traits et ornements de ce coupé rappellent la physionomie de l'E-type. Modèle qui, en son temps, fit dire à Enzo Ferrari lui-même qu'il s'agissait de «la plus belle voiture jamais produite».

Chez Jaguar, l'heure n'est plus à la nostalgie. Le constructeur anglais regarde loin devant et, pour une rare fois de son histoire, envisage l'avenir avec optimisme. La stabilité financière que lui procure son actuel propriétaire y est pour beaucoup - le conglomérat industriel indien Tata n'est pas étranger à sa bonne fortune. À cela, reconnaît-on sans gêne, s'ajoutent les méthodes de construction et de contrôle de la qualité apprises à l'époque où la firme de Coventry évoluait dans la galaxie de l'américain Ford (1990-2008).

Ces deux éléments combinés à quelques autres ont jusqu'ici permis à la marque de s'inscrire sur les marquises d'un certain nombre de sondages d'opinion. Ceux-ci saluent la satisfaction des propriétaires aussi bien à l'égard du produit lui-même que du service après-vente de ses concessionnaires.

Plus populaire en Europe



Sur l'échiquier mondial, la direction de Jaguar estime qu'il y aura autant de coupés que de cabriolets F-type. En Amérique du Nord, la préférence ira vraisemblablement au roadster alors que le marché européen aura une prédilection pour le coupé. Après avoir fait l'essai de ce dernier, on peut aisément comprendre pourquoi.

Les amateurs de conduite préféreront la rigidité supérieure du coupé à celle du cabriolet. Cela se traduit par un train avant à la fois plus incisif, plus précis et plus directeur. La combinaison de tous ces éléments contribue également au plaisir accru de piloter cette auto.

Contrairement au cabriolet, le coupé permet non seulement de ciseler les trajectoires avec plus de finesse, mais aussi - beaucoup - de les négocier plus rapidement encore. Cela s'explique notamment par la présence d'un dispositif de vecteur de couple (torque vectoring) qui assure une étonnante neutralité de comportement dans les courbes. Cette aide à la conduite est pour l'heure exclusive au coupé.

Ce châssis à la fois plus rigide et plus sophistiqué ouvre tout grand le capot à une évolution mécanique qui se traduit par la mise en marché d'une version R (pour Racing). Cette dernière est mue par un V8 5 L suralimenté par compresseur dont la puissance culmine ici à 550 chevaux. Ce label, uniquement apposé sur le coupé, révèle de fortes mais contrôlables sensations et démontre sans équivoque la nette différence de robustesse entre le châssis d'un véhicule à carrosserie ouverte et celui d'une carrosserie fermée.

Alors que le cabriolet perd de son équilibre avec un V8 de 490 chevaux, le coupé, pour sa part, ne voit aucun problème à augmenter la taille de la cavalerie. Et ce n'est qu'un début puisque, selon les indiscrétions d'un représentant de la marque, une version plus puissante encore, la R-S, se trouve en cours de préparation.

Combien de chevaux? «Suffisamment pour justifier la présence d'un rouage à quatre roues motrices», confie notre interlocuteur comme s'il venait de nous révéler le code secret de sa carte bancaire.

Revenons à cette configuration R qui, de l'aveu des responsables de la marque, représentera le tiers des ventes du coupé. Les deux autres livrées sont mues par des V6 (340 et 380 chevaux). Hormis un rapport final de pont différent, la boîte semi-automatique à huit vitesses demeure l'unique relais entre le moteur et les roues arrière motrices. D'un rendement époustouflant - à la condition de préférer le mode manuel, moins contraignant -, cette transmission aurait tout eu à gagner à bénéficier d'un dispositif d'assistance au départ (launch control). Celui-ci, offert chez la concurrence, permettrait de retrancher une poignée de dixièmes au temps d'accélération. Mais même sans cet artifice, la F-type R coupé met 4,2 secondes pour atteindre la vitesse légale autorisée sur nos voies rapides. Et pour peu que la ligne droite - d'un circuit - déroule plus d'un kilomètre d'asphalte sous vos roues, l'aiguille du tachymètre pointera sans problème sur le chiffre 300.

La R, comme toutes les F-type d'ailleurs, est dotée d'un programme Eco assujetti à un dispositif de coupure automatique à l'arrêt (Stop&Start). Celui-ci contribue à abaisser la consommation - autrement bien décevante - tout en augmentant l'autonomie somme toute réduite que lui procure son modeste réservoir de 72 L.

Rapide, excitante à conduire, la F-type R pèche toutefois par un freinage un peu juste eu égard aux performances qu'elle revendique. La firme britannique dit avoir une - coûteuse - solution: des freins en carbone céramique. Plus résistants, plus efficaces, ceux-ci - on les reconnaît à leurs étriers jaunes - ont aussi l'avantage d'être plus légers de 21 kg et ont conséquemment un effet bénéfique sur la masse non suspendue du véhicule.

La question maintenant est de savoir si cette option carbone-céramique vaut les 12 500$ qu'elle commande. Oui, mais seulement si vous comptez bousculer cette Jag sur un circuit. Dans le cas contraire, passez donc un tour.

L'ennemi: le poids



Il suffit d'évoquer la construction tout aluminium pour croire que cette F-type pèse une plume. C'est faux. Sur la foi du document officiel, la F-type R s'affiche à 1665 kg, soit 235 kg de plus qu'une 911 GT3 (475 chevaux). Comme on l'a vu plus haut, on peut retrancher 21 kg en adoptant les freins en carbone-céramique, mais il est possible d'en ajouter autant sinon plus en optant pour le toit panoramique offert en option (1200$).

Avec ou sans R, la F-type coupé ne diffère guère du cabriolet en matière de présentation. Celle-ci est valorisante à souhait, les rangements, parcimonieux et la visibilité, toujours aussi problématique.

En revanche, cette carrosserie donne accès à un coffre d'un volume équivalant à 407 L chargé jusqu'au pavillon ou - c'est plus sûr - de 272 L.

Les frais de transport et d'hébergement liés à ce reportage ont été assumés par Jaguar Canada.

L'essentiel

> Marque/Modèle : Jaguar F-type Coupe

> Fourchette de prix : 72 900 $ à 109 900 $

> Garantie de base : 4 ans/80 000 km

> Consommation moyenne : 13,1 L/100 km (V8)

> Visible dans les concessions : Maintenant

> Pour en savoir plus : www.jaguar.ca

Fiche technique

> Moteur (essence) : V8 DACT 5 litres suralimenté compresseur

> Puissance : 550 ch à 6500 tr/min

> Couple : 502 lb-pi entre 2500 et 5000 tr/min

> Poids : 1665 kg

> Rapport poids-puissance : 3,02 kg/ch

> Mode : Propulsion

> Transmission de série : Semi-automatique 8 rapports

> Transmission optionnelle : Aucune

> Direction/Diamètre de braquage (m) : Crémaillère/10,9

> Freins av-arr : Disque/Disque

> Pneus (av-arr) : P255-35-R20/P295-30-R20

> Capacité du réservoir/Essence recommandée : 72/Super

On aime

> Équilibre du châssis

> Souffle et sonorité du moteur

> Ligne à couper le souffle

On aime moins

> Consommation élevée/Autonomie avec V8

> Habitacle étriqué

> Poids