Tiré vers le haut par quelques modèles devenus célèbres - Range Rover, Mercedes Classe G -, ce véhicule paradoxal est en train de révolutionner le marché mondial des voitures de luxe. Il permet surtout à Lincoln de redistribuer les cartes et de tenter de nouveau sa chance dans le segment du luxe, créneau qu'il a longuement dominé.

Destiné en priorité au marché américain, ce modèle ne passera pas inaperçu sur le Vieux Continent et devrait contribuer à redorer le blason d'une firme réputée pour ses « voitures ringardes » trop souvent --et parfois injustement-- soupçonnés d'être des « Ford glorifiées ».

Énormes roues, coffre énorme

Juché sur ses énormes roues, le Navigator en impose. Il est le plus long (dans sa configuration allongée) et pas loin d'être le plus lourd de la catégorie.

Son coffre, pour peu qu'on sacrifie les sièges des rangées médiane et arrière, est énorme, l'habitacle gigantesque et soigné, quoique traditionaliste (les petits rangements y sont rares). Tous les sièges sont individuels (en option), réglables et peuvent même disposer d'un branchement pour casque ou d'un écran individuel. 

Le luxe s'écrit ici en lettres majuscules.

En préférant une banquette dans la rangée médiane et en additionnant les vrais sièges qui se trouvent complètement à l'arrière, il est tout à fait réaliste de penser que huit occupants peuvent confortablement voyager à bord. On peut aussi replier toutes les assises pour disposer d'un plancher à peu près plat.

Made in USA sur un châssis de F-150

Élaboré sur le châssis de la camionnette F-150, ce 4 x 4, dont le nom s'inspire de l'univers nautique, offre sensiblement le même confort qu'une berline de luxe (privilégiez la monte pneumatique de base plus étroite), la vision panoramique en plus, et pratiquement la même vivacité sans prise de roulis, suspensions flottantes ou plongeon du train avant au freinage. On notera seulement quelques trépidations du train arrière sur une chaussée déformée ou encore une direction un peu engourdie.

Le moteur V6 3,5 L suralimenté par turbocompresseur est assez placide - lorsque toutes les places assises sont occupées -, mais on n'en demande pas davantage ; conduire un VUS comme un Lance Stroll est un exercice non seulement absurde, mais rapidement lassant. 

Correctement secondé par une transmission automatique à 10 rapports qui apprécie elle aussi une conduite coulée en dépit de la présence de palettes au volant, ce six-cylindres impressionne le conducteur par sa force de couple et son appétit qui frise en moyenne les 13 L aux 100 km. Une performance correcte considérant la nature et le poids de l'engin, mais certains concurrents, dont Cadillac, font pratiquement aussi bien avec un V8.

Super sur les routes hivernales. Off-road ? Pas tant

La présence d'un rouage à quatre roues motrices et d'une kyrielle de béquilles électroniques rend ce véhicule très sécurisant. Il fait merveille sur les routes hivernales, mais ses qualités en hors-piste sont sujettes à caution. Une prudente escapade improvisée dans les pâturages n'a pas donné de résultats très convaincants.

Chez Lincoln, on est fier de Sa Majesté Navigator. Forcément un peu m'as-tu-vu, le Navigator consomme annuellement l'équivalent d'un petit camion-citerne, encombre les stationnements et, en cas de collision, sa masse risque de réduire en miettes une petite voiture.

À ce sujet, notons tout de même une traverse surbaissée placée sous la calandre qui réduit - sans les supprimer - les risques de voir un véhicule de faible gabarit s'encastrer sous la voiture. Bien vu. Cela dit, le Navigator n'a pas besoin de s'excuser d'être aussi lourd et aussi costaud. Il est imposant - lire difficile à garer à Montréal -, confortable, vigoureux, richement doté et rompt avec la banalité d'une berline.

S'il est vrai que ce véhicule arrondit ses angles, il reste impressionnant avec ses épaules fortement sculptées et sa face avant verticale qui nécessite l'utilisation d'un petit escabeau pour voir le moteur qui tourne derrière.

Du luxe, du confort et du CO2 à foision

D'ailleurs, dès qu'il détecte la proximité de la clé de ses portières, celles-ci se déverrouillent et les marchepieds se déploient pour vous permettre de grimper aisément « sur le trône ». Belle attention ! Quant à ses performances environnementales, elles sont en avance sur plusieurs concurrents (pensez à l'Infiniti QX80, par exemple), mais ne peuvent empêcher les niveaux de consommation, et donc d'émission de dioxyde de carbone (CO2), de s'inscrire allègrement dans le haut de la fourchette.

L'habitacle n'est pas cousu de fil d'or, mais c'est tout juste. La représentation sous forme holographique des indicateurs et jauges - configurables à foison - contenus dans le bloc d'instrumentation est du plus bel effet. 

On se délecte également du moelleux des sièges - qui se moulent sur soi - ou de la majestueuse console à la fois fonctionnelle et élégante. 

Les boiseries - véritables - et le sélecteur de rapports à boutons-poussoirs (sans doute le meilleur de sa génération) agrémentent cet environnement où la mixité des matières crée une ambiance riche. Le mobilier (tableau de bord, console) en impose sans envahir l'espace habitable. La liste d'accessoires, quant à elle, est interminable.

Il faut s'y résoudre : le règne de la grande voiture de luxe touche à sa fin. La limousine tout en majesté, sculptée en trois volumes bien distincts (capot-habitacle-coffre), n'est plus la référence absolue de l'espèce automobile. Aux États-Unis, la belle américaine un peu baroque n'est plus en odeur de sainteté. Là-bas, les grosses camionnettes et autres « camions légers » inspirés par l'univers des engins tout-terrain sont même devenus majoritaires. Et le Navigator en est un digne représentant, que cela nous plaise ou pas !

Trois fleurs, trois tomates

On aime



Présentation intérieure originale

Insonorisation poussée

Capacité de remorquage

On aime moins

Encombrement spectaculaire

Trépidations du train arrière (voir texte)

Prix corsé

La facture

Fourchette de prix : de 87 500 $ à 108 028 $

Frais de transport et de préparation : 2100 $

Garantie de base : 48 mois/80 000 km

Consommation réelle : 13,3 L/100 km

Chez les concessionnaires : maintenant

Concurrents : Cadillac Escalade, Infiniti QX80, Lexus LX570

Pour en savoir plus :  www.lincolncanada.com

Fiche technique

Moteur : V6 DACT 3,5 L turbo

Puissance :  450 ch à 5500 tr/min

Couple : 510 lb-pi à 3000 tr/min

Poids : 2656 kg

Rapport poids/puissance :  5,9 kg/ch

Mode : intégral

Transmission de série : automatique 10 rapports

Transmission optionnelle : aucune

Diamètre de braquage : 12,4 m

Freins (av.-arr.) : disque-disque

Pneus (av.-arr.) : 285/45R22

Capacité du réservoir : 87 L

Essence recommandée : super

Capacité maximale de remorquage : 3946 kg