Le puissant club automobile allemand ADAC était sous le feu des critiques lundi après avoir reconnu la manipulation depuis des années d'un vote sur la «voiture préférée» des Allemands, provoquant un choc dans un pays où l'auto est reine.

Les Allemands ont découvert dimanche avec stupéfaction que l'ADAC, plus gros club automobile d'Europe avec 19 millions de membres, n'était pas aussi respectable qu'ils le croyaient. La direction de l'association a reconnu que son directeur de la communication, Michael Ramstetter, avait enjolivé les chiffres d'un suffrage pour désigner la voiture la plus appréciée dans le pays en 2014.

«L'ange jaune», prix ainsi baptisé en référence aux couleurs du club automobile (jaune et noir), avait été décerné jeudi à la dernière Golf de Volkswagen après un vote des lecteurs de l'ADAC Motorwelt, magazine destiné aux adhérents de l'association, dont M. Ramstetter était le rédacteur en chef.

La polémique a encore enflé lundi lorsque le directeur de l'ADAC, Karl Obermair, a fait savoir que les neuf précédentes éditions du prix avaient également fait l'objet de manipulations.

L'ADAC Motorwelt, qui mène de nombreux tests et passe au banc d'essai les nouveaux modèles, est une revue très influente dans la branche automobile, et ses recommandations sont très suivies par les consommateurs. L'association ADAC est à la fois un puissant lobby, censé représenter les intérêts des automobilistes, et une entreprise de 8 200 salariés, reconnue pour ses services de dépannage, ses offres d'assurances ou de locations de voitures.

«J'ai déconné», a confié dimanche au journal Süddeutsche Zeitung Michael Ramstetter, qui a immédiatement quitté ses fonctions au sein de l'ADAC. La direction de l'association a assuré n'avoir appris la vérité que vendredi et s'est empressée de souligner que la mystification n'avait pas eu d'impact sur les classements. La Golf est bien la voiture préférée des lecteurs, a-t-elle affirmé.

Les manipulations n'auraient servi selon l'ADAC qu'à augmenter le nombre total de suffrages pour améliorer la crédibilité du vote. Le club automobile a promis d'élaborer une procédure sous contrôle notarial pour les prochaines éditions.

Ces assurances n'ont pas suffi à calmer les esprits. «Les adhérents vont-ils payer encore une année pour le tricheur de l'ADAC?», se demandait Bild, le quotidien le plus lu du pays, tandis que le journal Die Welt évoquait «la plus grave crise» qu'ait connu le club, fondé en 1903.

«L'ADAC perd ici son bien le plus précieux: son indépendance. Une ombre plane désormais sur tous les tests de l'ADAC, des statistiques sur les pannes de voitures aux tests des sièges pour enfants», estimait l'internaute Fridolin Streibert sur la page Facebook de l'ADAC.

«Si elle a menti pour "l'ange jaune", on ne peut pas exclure qu'elle ait menti dans d'autres domaines», a estimé dans la presse l'expert automobile Ferdinand Dudenhöffer.

Les politiques sont également montés au front. «Le système ADAC doit être passé au crible», a réclamé dans les colonnes du journal Handelsblatt Nicole Maisch, porte-parole des Verts au Parlement, chargée des questions de consommation. Elle s'est notamment interrogée sur la possibilité de faire coexister recherche de profits et défense des consommateurs.

Sommé de s'expliquer, le directeur de l'ADAC a présenté ses excuses lundi lors d'une conférence de presse à Munich.

L'ADAC est touchée «au plus profond d'elle-même» et va tout faire pour rétablir au plus vite sa «réputation écornée», a-t-il déclaré. Des auditeurs externes participeront à une investigation pour élucider les faits, a-t-il annoncé.

Interrogé par l'AFP, le constructeur Volkswagen a affirmé n'avoir «pas tenté d'influencer le vote de l'ADAC Motorwelt», tout en soulignant que la Golf VII, voiture la plus vendue en Allemagne, avait été distinguée par de nombreux prix.