D'accord, les berlines se vendent moins, mais Volvo ne pouvait tout de même pas se permettre de laisser la S60 sans descendance. En renouvelant ce modèle, la marque scandinave termine le rajeunissement de sa gamme, sans vraiment innover cette fois face à une concurrence qui ne lâche rien.

L'histoire récente de Volvo est celle d'une ascension fulgurante. Notamment au Canada, où les ventes affichent à ce jour une hausse de 38% par rapport à la même période l'an dernier. Dire qu'il n'y a pas si longtemps, cette petite firme suédoise battait de l'aile. En quelques années, le groupe chinois Geely en a fait la signature du luxe automobile en offrant la gamme la plus jeune de l'industrie. De quoi décontenancer et, parfois, fasciner la concurrence. La firme dont le nom latin signifie «je roule» trace son sillon avec une idée bien précise: proposer une solution de remplacement au cartel allemand (Audi, BMW, Mercedes). Cette stratégie la condamne, comme Jaguar et Alfa Romeo, à jouer les outsiders, mais telle est la vocation de la maison de Göteborg.

Apparue en 2000, la première S60 a gravé dans le marbre les canons de la beauté selon Volvo. Elle a également mis fin au règne du style «boîte à chaussures» préconisé par ses ancêtres (240, 850, S70). Le tracé des lignes est épuré, les formes des ailes arrière découpées comme des chéneaux, et la qualité d'assemblage des éléments de carrosserie s'impose comme un modèle du genre.

Commercialisée depuis quelques jours, la troisième génération de cette berline sport désormais assemblée aux États-Unis s'applique à faire fructifier son héritage sans que jamais l'idée de l'amender ne paraisse l'effleurer. La silhouette s'est à peine étirée, la découpe des surfaces est encore plus incisive, mais l'invariable style Volvo - strict, puissant, mais fluide - s'impose dans tout son classicisme. Dans la rue, ce n'est pas elle que l'on remarque le plus, mais son passage n'échappe pas au regard du connaisseur.

Plus massive, mais guère plus grande

Les nouvelles proportions de l'auto ne la rendent pas forcément plus habitable ou pratique pour autant. On note des gains du côté du dégagement pour les jambes, notamment à l'arrière, mais pour le reste, la nouvelle venue marque un léger recul par rapport à la génération antérieure. Elle demeure néanmoins compétitive dans sa catégorie. En ce qui a trait au volume utilitaire, en revanche, celui-ci se trouve en deçà de la moyenne. Pis encore, faute d'avoir intégré à l'intérieur du coffre de bêtes tirettes, Volvo force l'utilisateur à regagner l'habitacle pour rabattre les dossiers de la banquette. Un oubli? La familiale V60, pourtant, en a.

La T6 pour l'homogénéité

Sans surprise, la carrosserie de la S60 s'assoit sur une structure commune à l'ensemble des produits de la marque, à l'exception de la petite XC40. Cette architecture modulaire (nom de code SPA) offre beaucoup de latitude à Volvo quant au choix de propulseurs et de mode d'entraînement. Au Canada, la marque inscrit à son catalogue trois déclinaisons bien distinctes (T5, T6 et T8) que le consommateur peut ensuite saupoudrer d'options. Dans le cadre de ce lancement de presse, la version T5, la plus accessible financièrement, la moins puissante et aussi la seule entraînée par ses seules roues avant (traction), brillait naturellement par son absence. La communication de l'entreprise suédoise gravitait plutôt autour de la T6, la plus prisée de la gamme avec sa motorisation à double suralimentation (turbocompresseur et compresseur) et son rouage intégral. Et de la T8 aussi, modèle hybride à prise enfichable dont la commercialisation débutera, elle, dans quelques mois.

Assez légère, correctement équilibrée grâce à sa transmission intégrale et propulsée par un moteur assez vif, la S60 T8 (415 chevaux avec le concours de deux moteurs électriques) plante ses accélérations dans un silence de cathédrale, et il faut presque tendre l'oreille pour capter le souffle du compresseur et du turbocompresseur. Pourtant la version T6, moins puissante, nous apparaît de loin plus homogène, même si sa consommation se révèle plutôt décevante considérant la taille de sa cylindrée. L'accélération, comme les reprises, est solide et la boîte automatique à huit rapports, la seule offerte, exécute correctement son travail.

Bien que la T6 se révèle plus alerte, plus vive et surtout plus souple que la T8, elle n'est pas la plus brillante des berlines sport pour autant. L'assistance correctement dosée de sa direction permet de l'inscrire aisément dans les virages, mais le ressenti n'est pas celui de l'actuelle Série 3 de BMW, d'une Giulia d'Alfa Romeo ou encore d'une XE de Jaguar. La S60 propose plutôt une conduite rassurante, confortable et une stabilité à toute épreuve, mais guère de plaisir.

La T8, plus rapide, ne fait pas mieux, au contraire même en raison de son freinage puissant, mais carrément détestable. Difficile à moduler, celui-ci vous rappellera sans doute votre première séance de conduite dans une auto-école. Contrairement aux autres S60, la version T8 fait appel à un système sans liaison mécanique (by-wire), et les ingénieurs de la marque présents sur place reconnaissaient que celui-ci doit faire l'objet d'une mise au point. Reste à voir si ces correctifs seront apportés avant la mise en circulation de ce modèle prévu au cours du premier trimestre de 2019. Souhaitons-le!

Berline à vivre

L'habitacle ressemble au salon d'attente d'un hôtel-boutique gentiment branché. Harmonies douces des teintes offertes, de fins placages de bois, de discrets parements d'aluminium, de cuir souple, doux et légèrement odorant. L'élégant tableau de bord forme l'horizon de ce boudoir scandinave conçu avec un méticuleux souci du détail. Il exprime aussi un louable renoncement à la mise en scène technologique des marques allemandes et témoigne d'une qualité de fabrication au-dessus de tout soupçon. L'écran tactile qui ressemble à la tablette électronique que vous avez sans doute entre les mains s'avère facile à utiliser, et la présence d'un microprocesseur plus puissant lui permet de répondre plus diligemment à nos demandes d'information. Qu'à cela ne tienne, le meilleur demeure l'attention bien sentie au dessin des sièges avant qui minimisent grandement la fatigue au volant tout en procurant un support exquis.

À l'arrière, deux personnes peuvent confortablement s'asseoir en prenant bien garde de ne pas se cogner la tête contre le renflement du toit au moment d'accéder à la banquette ou de s'en extraire. Le coffre, à défaut d'offrir un volume comparable à celui de la concurrence, propose une bonne ouverture et un seuil à hauteur raisonnable.

Pour une marque qui, des années durant, a martelé l'importance de la sécurité, on regrette de constater que plusieurs avancées dans ce domaine figurent sur la liste des options... Ainsi, il faut consentir un déboursé additionnel pour obtenir des capteurs d'angles morts ou un rétroviseur central à coloration automatique. Navrant ! Tout comme de constater que certains éléments de douceur pour mieux apprécier l'hiver comme le volant chauffant figurent aussi parmi les équipements optionnels. On en attendait plus d'une marque scandinave...

Les frais de voyage de ce reportage ont été payés par Volvo Canada, qui n'a exercé aucun droit de regard sur le contenu du reportage.

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Fiche technique

L'ESSENTIEL

Marque/modèle: Volvo S60

Fourchette de prix: de 42 400 $ à 67 050 $

Frais de transport: 1395 $ (préparation en sus)

Garantie de base: 48 mois/80 000 km

Consommation réelle: 9,8 L/100 km (estimation)

Chez les concessionnaires: maintenant

Rivales à suivre: Audi A4, Infiniti Q50, Lincoln MKZ

Pour en savoir plus: visitez le site de Volvo

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TECHNIQUE (S60 T6 R-Design)

Moteur: essence L4 DACT 2 L suralimenté

Puissance: 316 ch à 5700 tr/min

Couple: 295 lb-pi entre 2200 et 5400 tr/min

Poids: 1772 kg (T6)

Rapport poids/puissance: 5,6 kg/ch

Mode: intégral

Transmission de série: automatique huit rapports

Transmission optionnelle: aucune

Diamètre de braquage: 11,9 m

Freins (av.-arr.): disque-disque

Pneus (av.-arr.): 235/45R18 (R-Design)

Capacité du réservoir: 60 L

Essence recommandée: super

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ON AIME

Sièges confortables

Finition sérieuse

Motorisations vives (sauf T5)

ON AIME MOINS

Freinage pointilleux (Polestar)

Consommation décevante

Comportement aseptisé