C'est à se demander si Mitsubishi ne fait pas exprès pour que l'on soit allergique à sa voiture électrique I-MIEV. Cela commence dès la livraison avec un modèle d'essai peinturluré d'une description du véhicule strictement en anglais: I-Miev «Mitsubishi innovative electric vehicule» suivie d'un «no tailpipe no emission drive @earth». Et le comble de l'insolence, c'est cette invitation à prier pour le Japon («Pray for Japan») placardée sur les flancs de la voiture.

J'ai beaucoup de commisération face à ce qu'a vécu le Japon ces derniers mois et je n'ai pas tendance à m'offusquer devant de tels sermons, mais il me semble que je n'ai pas à me faire dicter quoi que ce soit par un constructeur automobile.

D'ailleurs, après avoir conduit le modèle réservé à la presse, on aurait davantage envie de dire «prions pour Mitsubishi» tellement leur voiture électrique est un piètre exemple de ce que l'on attend d'un tel véhicule. Il serait étonnant que l'on en vende des masses tellement il s'agit d'un engin minimaliste dont les carences sont inacceptables dans le marché actuel de l'automobile. Depuis la dureté ennuyeuse de son accélérateur jusqu'à son vacillement sur la route par vents légers, la I-MIEV a rudement besoin d'une mise à niveau avant de se montrer le nez chez un concessionnaire. La I-Miev que j'ai conduite n'était pas loin d'une voiturette de golf un peu plus enveloppée et à mille lieues de ce que l'on est en droit de s'attendre de nos jours d'un véhicule, qu'il soit électrique ou pas. Que Mitsubishi nous propose une sorte de prototype en développement au lieu d'une auto prête à la commercialisation est la meilleure façon de se tirer dans le pied.

Gare au vent

Haute sur pattes et étroite selon les critères du marché européen, la voiture résiste mal aux vents de travers et sa tenue de route est assez précaire en virage. La direction est tantôt trop légère, tantôt en parfait contact avec le bitume tout en fournissant un diamètre de braquage qui fait de la I-MIEV une petite auto on ne peut plus maniable à la ville.

Au vu des performances réduites de cette citadine, le freinage semble adéquat quoique je n'aie pas expérimenté de situation d'urgence pour en témoigner.

À propos de performances, le moteur électrique ne peut donner que ce qu'il a avec ses 66 chevaux et l'on doit patiemment compter un bon 10 secondes pour effectuer un dépassement ou porter sa vitesse de 80 à 115 km/h. Quant au traditionnel 0-100 km/h, il vous donnera au moins 11 secondes pour admirer le paysage.  Le couple quasi instantané rend cependant les déplacements en ville d'une grande facilité. Sur la route, cette Mitsubishi sans pot d'échappement peut se mêler à ses voisines à essence jusqu'à 130 km/h, sans problème autre qu'une rapide dégringolade de l'autonomie.



Photo: Jacques Duval, collaboration spéciale

Avait-on vraiment besoin de peinturlurer cette pauvre petite Mitsubishi pour nous faire savoir qu'elle n'a ni pot d'échappement, ni d'émissions nocives?

Autonomie encourageante

Fort heureusement, la I-MIEV n'est pas trop mal pourvue en matière d'autonomie. Après un chargement d'une douzaine d'heures sur une prise de 120 volts (contrairement aux 22,5 heures annoncées dans la documentation de Mitsubishi) , on peut espérer parcourir une centaine de kilomètres ou plus. Dans mon cas (voir photo), j'a parcouru 94,5 km et il restait encore deux barres sur la jauge des batteries, ce qui permet de compter sur environ 20 km de plus. Il reste que l'on doit se fier à une imitation de jauge à essence au lieu d'un cadran numérique comme la Volt qui affiche le nombre exact de kilomètres restants en mode électrique. Avec la I-Miev, on a l'angoisse de se demander si la dernière barre de la jauge ne va pas disparaître au prochain virage. On m'informe qu'un bouton permet de transformer les barres restantes de la jauge en chiffres, mais l'absence d'un manuel d'instructions dans la voiture ne m'a pas permis d'y avoir recours.  

Détail curieux, la voiture est une propulsion (roues motrices arrière), ce qui risque de lui compliquer la vie en hiver. On me souffle toutefois à l'oreille que Mitsubishi offrira une version quatre-roues motrice de la I-MIEV.



Photo: Jacques Duval, collaboration spéciale

Le cadran de droite indique la distance parcourue avec la Mitsubishi électrique et celui de gauche, en forme de jauge à essence, ce qu'il reste en autonomie, environ 20 km.

Véhicule publicitaire

Parmi les autres particularités plus ou moins heureuses de ce modèle, on peut citer la trop forte intervention du frein moteur et cela que le levier de la boîte monovitesse soit placé sur D, B ou C. Le silence du moteur est aussi gâché par une insonorisation si mince que les bruits de route s'introduisent dans l'habitacle et que la carrosserie donne l'impression de ne pas être très bien boulonnée quand on circule sur mauvaise route.

L'intérieur est celui d'une auto dépouillée dont la radio semble être un ajout de dernière minute. Les glaces bénéficient de commandes électriques, un luxe absent pour le verrouillage simultané des portières. Quant à l'habitabilité, cette mini voiture peut être considérée comme une 4 places à la condition que les occupants des places arrières ne soient pas trop costauds.

La façon de faire de Mitsubishi avec sa I-MIEV laisse songeur. Depuis près de deux ans déjà, la marque japonaise nous offre d'en faire l'essai sans que l'on puisse témoigner d'une quelconque évolution. C'était et c'est encore une voiture incomplète que l'on utilise comme véhicule publicitaire et qui paraît fatiguée de servir d'appât à un public pas toujours averti du statut actuel de la voiture électrique. Je plains le service des relations publiques d'avoir à composer avec une telle politique et je dis «prions pour Mitsubishi».

Photo: Jacques Duval, collaboration spéciale

Un tableau de bord simpliste que celui de la Mitsubishi I-MIEV.