Fibre de carbone, aluminium, magnésium... Les voitures exposées au salon de Detroit multiplient les matériaux composites et alliages savants pour plus de légèreté, nouveau Graal des constructeurs américains.

L'aluminium a commencé à être utilisé par des marques de luxe comme Bugatti dès les années 30, et par les constructeurs européens haut de gamme comme Audi dès les années 90, mais les constructeurs américains étaient en retard. Ils rattrapent le mouvement, poussés par des normes d'émissions et consommation de plus en plus strictes.

Et ce d'autant que les prix de l'aluminium ont parallèlement fondu ces dernières années, mêmes s'ils restent plus élevés que ceux de l'acier.

«La légèreté devient critique. Chaque constructeur explore toutes les pistes possibles pour alléger les véhicules», explique à l'AFP Dan Flores, porte-parole de General Motors.

GM expose ainsi à Detroit une nouvelle version de sa Corvette, la Z06, plus légère de 50 kilos que la précédente, équipée d'une technologie «exclusive» pour éliminer des rivets et souder directement l'aluminium.

Et comme chaque gramme compte, le coffre de la voiture de sport comprend désormais un câble en alliage léger au lieu d'un «activateur motorisé plus lourd».

Les regards se tournent surtout vers Ford, numéro un du segment des pickups, qui a doté son nouveau F-150, son véhicule le plus vendu, d'une carrosserie en aluminium sur un châssis acier.

«C'est nouveau et ambitieux sur un véhicule utilitaire, car il va finir cabossé et c'est encore cher à réparer», souligne Bertrand Rakoto, analyste indépendant. «Il faudra que les concessionnaires soient équipés en outillage et formés».

Les rivaux de Ford, Chrysler (groupe Fiat) et GM ont laissé entendre qu'ils allaient observer attentivement l'accueil que recevra le F-150, sans dire s'ils comptaient lui emboîter le pas.

Ford doit convaincre les clients du segment des pick-up, particulièrement ceux des secteurs de la construction et de l'énergie, que le véhicule garde sa capacité de traction bien qu'il soit plus léger.

Le F-150 «est à la fois solide et intelligent», et il «montre que les économies de carburant sont maintenant une raison d'acheter un véhicule Ford», a fait valoir le président du groupe, Bill Ford, lors d'une conférence de presse.

Alan Mulally, le directeur général de Ford, a assuré que les gains de légèreté et d'efficience permettaient de réduire suffisamment les coûts pour compenser le prix plus élevé de l'aluminium.

Risque d'emballement des coûts

Mais Bertrand Rakoto relève un risque d'explosion des coûts «si tout le monde passe à l'aluminium».

De plus en plus de voitures sont aussi fabriquées avec une part de fibre de carbone, un matériau de haute technologie très solide et léger mais cher, ce qui le réservait jusqu'à présent aux voitures de course ou de luxe.

La berline sport Stinger du coréen Kia, un des modèles les plus en vue du salon, comprend ainsi une part de fibre de carbone, notamment dans les roues.

La BMW i8 est elle aussi toute en carbone avec un intérieur composite.

Les capacités de ce matériau «sont très bonnes, le prix reste un problème», a constaté Alan Mulally, interrogé par l'AFP.

Alec Gutierrez, analyste du cabinet KBB, estime toutefois que «le prix va baisser» et que la fibre de carbone sera de plus en plus utilisée.

Bertrand Rakoto note aussi que la fibre de carbone, bien que solide, «se brise au lieu de se déformer pour amortir les chocs», ce qui présente un risque pour la sécurité à bord. «Il faut repenser toute l'architecture», souligne-t-il.

Autre problème: l'obligation croissante de recycler le carbone, ajoute M. Rakoto.

Les autres matériaux utilisés pour alléger le véhicule sont notamment la fibre de verre, le kevlar, le titane. Le point d'achoppement reste leur prix.

Plus abordable, le plastique peut être utilisé comme chez Renault sur des ailes, «qui du coup se déforment sans rompre lors de petits chocs, comme un accrochage sur un stationnement».

Mark Reuss, directeur des produits de GM, souligne qu'il n'y a «pas de solution miracle»: «il ne s'agit pas seulement se substituer» un matériau par un autre, «c'est aussi une question d'ingénierie».