« Par les années passées, la voiture électrique n'a peut-être pas eu toute la vogue qui lui est due à cause du manque de stations de recharge dans la ville et les environs, mais les grands avantages de cette voiture superbe ne devraient pas rester inaperçus et depuis une couple d'années, les stations qui avaient fait défaut ont été installées un peu partout et offrent maintenant toute la facilité possible aux personnes désireuses de se procurer un aussi agréable bijou. »

Non, il ne s'agit pas d'un commentaire d'un concessionnaire Nissan ou BMW vantant les mérites de la Leaf ou de l'i3. Et non, cette remarque sur la voiture électrique n'est pas celle d'un convaincu en plein débat télévisé ou radiophonique tenu récemment. Mais c'est bel et bien un sujet d'actualité, abordé dans les pages de La Presse du jeudi 29 janvier 1914 ! En pleine semaine du salon de l'auto de Montréal. Oui, 1914. Il y a un siècle.

Ce passage tiré du quotidien est frappant. Et troublant. En ce temps-là, on est admiratif de la voiture branchée. Et les commentaires de l'époque ne sont pas sans rappeler certains autres beaucoup plus récents...

« Son grand luxe, son fini supérieur et sa facilité remarquable de conduite sont la cause de cette grande popularité », écrit-on dans La Presse en janvier 1914. Cela ne vous évoque-t-il pas une berline californienne ?

« Plusieurs connaisseurs avancent que pour l'homme d'affaires, c'est la voiture idéale et que comme voiture de ville, elle est insurpassable », ajoute alors le quotidien. Si c'est ainsi que l'on voyait la voiture électrique, il n'y a qu'un pas - dans le temps - que l'on franchit allègrement pour arriver au même constat aujourd'hui.

D'HIER À AUJOURD'HUI

Cette admiration pour ce genre de véhicule est rapportée dès la première exposition d'automobiles à Montréal. « Les machines Franklyn et Pierce - électriques - que représente Wilson & cie, ont obtenu un succès remarquable. Plusieurs de ces superbes machines furent vendues », lit-on dans le journal La Patrie du 23 avril 1906.

En ce début du XXe siècle, alors que l'industrie automobile foisonne de constructeurs et tâtonne dans le domaine de la propulsion, la voiture électrique partage le marché avec la voiture à essence et la voiture à vapeur. Le record de vitesse (105,98 km/h) établi par une voiture électrique, la Jamais Contente, ne date que de 1899. Une première.

Les voitures électriques à batterie vont cependant être victimes des mêmes faiblesses que celles qu'on leur reproche aujourd'hui, dans une moindre mesure : leur autonomie est restreinte, elles sont beaucoup trop lourdes et le temps de recharge est un handicap. L'essence quant à elle se stocke facilement et offre une plus grande autonomie.

Les années 1910 voient la voiture électrique commencer à péricliter. En 1912, le constructeur Detroit Electric propose quatre modèles. Au salon de Montréal de 1914, la liste des modèles électriques semble de moins en moins étoffée. On y trouve par exemple un coupé de Stockwell Motor. Tate Electric propose deux roadsters et un coupé.

On ignore quand est réellement porté le coup de grâce. L'arrivée du démarreur électrique en 1911 va donner un coup de fouet à la voiture à essence alors débarrassée de sa manivelle. La suite, on la connaît.

En 1996, GM propose sa EV1, 90 ans après que les « machines électriques » Franklyn et Pierce eurent obtenu « un succès remarquable » à la première expo du genre à Montréal.

Combien d'entre vous achèteront une voiture électrique en cette année 2016 ?

PHOTO FOURNIE PAR WIKIPEDIACOMMONS

La «Jamais Contente» du Belge Camille Jenatzy est la première voiture à avoir atteint les 100 km/h. C'était en 1899. Et elle était propulsée par deux moteurs électriques de 50 kW alimentés par des batteries d'accumulateurs Fulmen (100 blocs de 2 V).

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Ceci est la première voiture hybride de l'histoire. Sortie en 1900, la Lohner-Porsche a été conçue initialement par Ferdinand Porsche lui-même. Avec un moteur à essence associé à quatre moteurs-roue électriques, c'était un monstre à quatre places: 1,8 tonne de batteries au plomb, 600 kg de moteurs, pour un poids total de plus de 4 tonnes.