Promettant 400 km voire davantage entre deux recharges, des voitures électriques de nouvelle génération pointent le bout du capot au Mondial de Paris, de quoi attirer davantage de clients, espèrent les constructeurs.

Renault a frappé fort d'emblée en annonçant jeudi, au début des journées de presse du Mondial, que son modèle électrique vedette, la Zoé, serait désormais doté d'une autonomie théorique de 400 km contre 240 pour la version actuelle.

«Une vraie percée»

«C'est une vraie percée», affirme à l'AFP Éric Feunteun, responsable du programme électrique de Renault, en soulignant que la commercialisation commencera d'ici à la fin de l'année. Il se dit convaincu que «grâce à cette innovation, nous allons à nouveau être en avance sur le reste du marché».

Toutefois, la concurrence s'étoffe: Opel annonce lui aussi une autonomie théorique de 500 km pour sa nouvelle Ampera-e, version européenne de la Chevrolet Bolt. 

Ici, GM promet une autonomie de 383 km pour la Bolt; en Europe, Opel fait miroiter une autonomie officielle de 500 km. Pourquoi cet écart ? La façon de calculer est différente en Europe, où on mesure l'autonomie en fonction de vitesses très basses. Les cotes nord-américaines sont plus réalistes.

La Bolt et l'Ampéra-e sont la réponse de GM à l'aiguillon Tesla.

Cette entreprise californienne, après avoir pris le monde du haut de gamme à revers depuis 2012 avec sa berline Modèle S offrant jusqu'à 500 km entre deux recharges, a enregistré plus de 370 000 pré-commandes pour sa plus petite Modèle 3 promise fin 2017 avec 350 km d'autonomie.

Karl-Thomas Neumann, le pdg d'Opel --filiale européenne de GM--, présente la jumelle européenne de la Chevrolet Bolt 100 % électrique: elle s'appelle l'Ampéra-e. Les 500 km d'autonomie (qu'on voit sur l'image projetée, derrière) sont purement théoriques. Photo: AP

Partie remise pour Nissan et la Leaf

Nissan, allié de Renault qui a lui aussi misé sur l'électrique, ne profite pas du Mondial pour annoncer d'évolution sur son modèle Leaf (250 km d'autonomie théorique), qui s'est écoulé à 230 000 exemplaires dans le monde depuis son lancement fin 2010, portant à 350 000 les modèles «zéro émission» du tandem franco-japonais mis sur les routes.

Mais Nissan continue à développer l'électrique et se dit déterminé à offrir à terme «une autonomie comparable à celle des véhicules à carburant».

De son côté Volkswagen, en plein virage stratégique sur les décombres du «dieselgate», présente à Paris un prototype, l'«I.D. Concept», censé franchir jusqu'à 600 km entre deux recharges, mais à l'horizon 2020.

«Le groupe Volkswagen va développer et construire plus de 30 nouveaux véhicules électriques en plus d'ici à 2025», a souligné son patron, Matthias Müller, mercredi soir. «L'avenir, c'est l'électrique».

Le responsable de la marque Volkswagen, Herbert Deiss, après sa présentation de la tout électrique Volks I.D. Photo: AP

L'autonomie théorique est... théorique, justement

«En 2020, une autonomie de 500 km va devenir la norme, ceux qui feront moins bien seront pénalisés», prédit à l'AFP Ferdinand Dudenhöffer, expert automobile allemand à l'institut de recherche CAR.

Depuis la dernière édition du salon en 2014, les ventes d'autos électriques en France ont presque triplé en volume. Bien que fortement subventionnées (jusqu'à 10.000 euros de «superbonus»), elles ne représentent encore que 1,07% du marché.

Quelque 35 % des Français interrogés se disent prêts à opter pour une telle technologie, une hausse de 7 points par rapport à 2014, selon un sondage Ipsos commandé par l'Association pour le développement de la mobilité électrique (Avere-France).

Et les bornes de recharge en accès public continuent à se répandre en France: 14 240 fin août, une hausse de 42 % en huit mois, indique à l'AFP Joseph Beretta, président de l'Avere-France.

L'Ampera-e et la Zoé améliorée profitent de l'évolution des batteries lithium-ion. «A coût équivalent, on met plus d'énergie et on reste compétitifs en coûts», détaille M. Beretta.

A 23 600 euros, soit 34 800 $ CAN (avant les subventions gouvernementales), la nouvelle Zoé est 1500 euros plus chère que celle qu'elle remplace et qui détient plus de la moitié du marché électrique français. Renault la proposera au lancement en location tout compris à 149 euros (220 $ CAN) par mois, dit M. Feunteun.

Nissan n'a pas montré la future Leaf au Mondial de l'auto, mais si on en juge par la nouvelle version de sa cousine française, la Zoé, de Renault, on peut s'attendre à une autonomie de 400 km... selon les cotes européennes, qui sont peu réalistes. Le patron de Renault (et de l'Alliance Renault-Nissan), Carlos Ghosn, a présenté la Zoé.

Dans les faits, même pas 250 km...

Quant aux autonomies annoncées, M. Beretta invite à la prudence. Avec les Zoé actuelles, «on était autour de 120 km en réel, là on va frôler les 250 km en réel», dit-il.

C'est à peine le tiers de ce que peut franchir un diesel entre deux pleins.

«Quand vous interrogez des consommateurs sur l'autonomie qu'ils veulent, plus de la moitié des gens répondrent 500 km, et un tiers plus de 750 km», note Rémi Cornubert, expert chez AT Kearney.

La faible autonomie des électriques constitue «plus un frein psychologique qu'autre chose parce que dans les usages du quotidien, 80% des Français font moins de 100 km par jour», rappelle pour sa part Flavien Neuvy, directeur de l'observatoire Cetelem de l'automobile.

Une BMW 225xe branchée à une borne, au Mondial de l'auto de Paris. Photo: AP