Quel conducteur montréalais n'a-t-il pas donné un coup de volant pour éviter à la dernière minute un nid-de-poule printanier assez gros pour une couvée d'autruches?

C'est un des défis particuliers qu'a relevés une équipe de l'Université du Nevada à Reno et de l'Université libre de Berlin, quand ils ont planifié un voyage de 2400 km sur les routes du Mexique à bord d'une Volkswagen Passat 2010 sans conducteur bourrée d'informatique, de capteurs et de caméras.

Le nid-de-poule est un des nombreux facteurs imprévisibles que la conduite autonome doit surmonter pour que les autos sans conducteur soient un jour une réalité.

La voiture avait roulé dans les rues lisses de Berlin et de Suisse depuis 2011, mais «il a fallu faire de nombreux ajustements» pour composer avec les routes mexicaines utilisées pour se rendre de Reno, au Nevada, à la ville de Mexico. «Les nombreux nids-de-poule rendent les choses très difficiles pour les voitures autonomes», explique le professeur Paul Rojas, dans un document publié par l'Université libre de Berlin. «Pendant nos longues sorties durant les essais au Mexique, les paramètres de conduite ont été ajustés et les résultats ont été impressionnants: les dépassements se faisaient de façon très fluide même à 130 km/h. La voiture a reconnu tous les dangers sur la route et a réagi comme il fallait.»

La voiture a traversé le désert de Sonora, puis la zone tropicale de Sinaloa, avant de traverser les montagnes vers Jalisco. L'essentiel du trajet s'est fait sur de grandes routes, mais il y a eu des passages sur des chaussées vieilles, étroites et dépourvues de marquage et d'accotement, de même que 150 km de conduite urbaine dans les nombreuses villes traversées durant le voyage de 10 jours. De nombreuses zones de travaux routiers ont aussi été traversées sans problème.

Une partie de l'autoroute n'avait aucun marquage, en raison de travaux de réfection très récents faits après de violents orages venus de l'océan Pacifique.

Technologie

La voiture, baptisée Autonomos, est équipée de sept capteurs laser, de neuf caméras vidéo, de sept radars et d'un GPS ultraprécis.

Le niveau d'intelligence artificielle requis pour interpréter les nids-de-poule et autres imprévus était donc bien plus élevé que celui requis pour les routes parfaites et les autoroutes larges d'Europe. «Ce sont précisément ces défis qui nous ont incités à faire cette expérience au Mexique, durant laquelle nous étions accompagnés de voitures de la Police fédérale mexicaine.»

De plus, deux membres de l'équipe de recherche étaient toujours assis dans la voiture; celui assis dans le siège du conducteur surveillait la route au cas et le passager avait le nez dans l'ordinateur pour suivre comment le logiciel interprétait les conditions routières immédiates et à venir.

«Pour rouler en sécurité, les voitures autonomes ont besoin de cartes spéciales détaillant le nombre de voies, le marquage de la chaussée, la position des sorties, intersections et feux de circulation. Ces cartes détaillées ne sont pas toujours disponibles, alors tout projet de voiture autonome doit produire ses propres cartes», explique le professeur Rojas.

Évidemment, on ne peut cartographier à l'avance chaque nouveau nid-de-poule ni anticiper quand des travaux seront entrepris par les autorités routières.

C'est pourquoi les logiciels développés pour la voiture autonome de demain doivent savoir réagir en temps réel aux évènements spontanés.

La détection et l'évitement des piétons, cyclistes et autres utilisateurs de la route requièrent encore plus de souplesse.

Les premières voitures autonomes sont censées arriver sur le marché dès 2020.