D'ici deux ans, la commande vocale deviendra la deuxième interface en importance à bord... après le volant.

Ce qui était le rêve des géants de la techno semble bien vouloir se produire, mais pas nécessairement sous la forme souhaitée. Tandis qu'Apple, Microsoft, Google et même Amazon tentent d'imposer leurs assistants numériques à bord des voitures, les sociétés automobiles préfèrent opter pour leurs propres solutions.

C'est du moins le cas de BMW et de Mercedes-Benz, qui mettent toutes deux en marché, ces jours-ci, leurs propres systèmes de reconnaissance vocale. Ceux-ci permettent de lancer l'aide à la navigation, de changer l'état de la climatisation et d'effectuer les tâches qui jusqu'ici se faisaient à partir d'un écran tactile ou de quelques boutons savamment logés sur la console centrale du tableau de bord.

Contrairement aux commandes vocales très limitées et plutôt maladroites des dernières années, ces nouveaux systèmes sont aussi ambitieux que Siri sur votre iPhone ou Alexa sur les enceintes connectées d'Amazon. Dans le cas de l'Intelligent Personal Assistant de BMW, il est possible d'ajuster divers réglages du véhicule, et même de demander à quoi les plus étranges peuvent bien servir. « Comment fonctionnent les feux de route automatisés ? » est un exemple de question qu'on peut lui poser.

Une connexion montréalaise

« Quel est le sens de la vie ? », pourront aussi demander les conducteurs plus philosophes. La réponse, on s'en doute, étonnera un peu. On risque même d'y déceler un petit accent montréalais, puisque la commande vocale de BMW a été en bonne partie conçue par les labos que la société américaine Nuance Communications possède dans la métropole québécoise.

Et comme sur votre téléphone, il suffira de lancer un « Hé BMW ! » à bord d'une BMW neuve achetée à partir de ce mois-ci pour accéder à cette interface de nouvelle génération. « C'est vraiment une toute nouvelle expérience de conduite », assure Dieter May, qui supervisait les produits numériques du Groupe BMW jusqu'à la mi-février. M. May a quitté son poste et travaille maintenant pour une société spécialisée dans les semi-conducteurs.

Au début du mois, à Barcelone, Mercedes-Benz a profité du Mobile World Congress, un événement international sur la mobilité informatique faisant de plus en plus de place à l'automobile, pour présenter la plus récente version de sa berline compacte CLA. À bord, on y trouvait notamment sa nouvelle interface d'infodivertissement, appelée MBUX, et une version « open source » du jeu vidéo Mario Kart, appelée SuperTuxTart.

Le clin d'oeil à ce classique de Nintendo n'est pas fortuit : pour la filiale du groupe Daimler, c'est une façon de rappeler que la CLA cible une clientèle plus jeune que ses acheteurs traditionnels. Une interface dernier cri comme son système MBUX va dans le même sens. Et, bien entendu, la commande vocale qui permet de lui parler plus ou moins naturellement renforce ce petit air de jeunesse.

L'écran tactile de la décennie à venir

L'enjeu est important, car dans l'industrie automobile mondiale, on estime que la commande vocale sera la deuxième façon d'interagir avec les automobiles en importance dès 2021. Ce sera l'équivalent pour la décennie à venir de ce qu'auront été les écrans tactiles au cours des 10 dernières années. À l'exception près que, cette fois-ci, on semble vouloir éviter le tape-à-l'oeil (ou est-ce à l'oreille ?) peu ergonomique qu'on a pu voir dans plus d'un habitacle ces derniers temps.

« La reconnaissance vocale a vraiment évolué depuis 22 ans », souligne André Berton, qui dirige l'équipe derrière l'interface vocale du système MBUX de Mercedes-Benz.

« Si on travaille sur la reconnaissance depuis le début, ce sur quoi on doit se concentrer aujourd'hui, c'est la compréhension du langage. »

- André Berton, responsable de l'interface vocale du système MBUX de Mercedes-Benz

En effet, car à 100 km/h, même une bête commande liée à la radio d'auto peut produire une distraction qui mènera à un éventuel accident. Il faut donc que le système comprenne rapidement, et qu'il réagisse non moins lentement. « Une pause de plus de 200 millisecondes peut vouloir dire que la commande n'a pas été comprise. Il faut donc réagir vite », ajoute M. Berton.

Et au gré de mises à jour logicielles, ces systèmes vocaux s'amélioreront, à mesure que les données (anonymes) récupérées par les constructeurs détermineront des lacunes. On ne peut pas en dire autant des interfaces tactiles déjà sur les routes... Ce qui explique sans doute l'empressement de certains constructeurs à les remplacer au plus tôt par quelque chose de plus intuitif.

PHOTO MERCEDES-BENZ

La plus récente version de la CLA de Mercedes-Benz propose une interface d'infodivertissement appelée MBUX.