L'autopartage tel qu'on le connaît ici avec Communauto va-t-il se faire dépasser sur sa droite par les constructeurs automobiles qui s'imposent de plus en plus dans les centres-villes en proposant des voitures en libre-service?

L'an prochain, la ville française de Lyon fera cohabiter le service d'autopartage Autolib' avec car2go, le service de location de Smart ForTwo initié par le groupe Daimler AG.

Selon le même principe que le vélo en libre-service, car2go est conçu pour de courts trajets dans les centres-villes. Une voiture peut être louée à n'importe quel moment, n'importe où, sans réservation. Aucun lieu ni heure de retour n'est imposé. Elle peut être laissée sur presque n'importe quel stationnement public.

Le service car2go existe dans quatre villes dans le monde: Ulm et Hambourg en Allemagne, Austin aux États-Unis et Vancouver au Canada. San Diego, Amsterdam et Lyon seront les prochaines à en bénéficier. Le concept a donné des idées à la concurrence puisque BMW et Volkswagen testent actuellement un service plus ou moins similaire à Munich et à Hanovre.

Les utilisateurs séduits

La proximité, la souplesse et l'accessibilité du service séduisent les utilisateurs. Et les politiciens. L'agglomération lyonnaise va chapeauter le déploiement futur de car2go sur son territoire. «On a un a priori tout à fait favorable, commente Gilles Vesco, adjoint au maire de Lyon. On se base sur les expériences précédentes: car2go, c'est la satisfaction d'un besoin qui n'est pas forcément le même qu'avec Autolib'».

On s'en doute, car2go n'a pas été accueilli à bras ouverts par le service d'autopartage Autolib' créé en 2003. «Cette arrivée nous a inquiétés au moment de son annonce, car nous avons perçu ce service comme un concurrent qui séduit aussi bien les élus que -potentiellement- les habitants du Grand Lyon, témoigne François Gindre, directeur de Lyon Parc Auto, le gestionnaire du service. (...) Il nous semble que car2go est un service flexible, mais qui est en concurrence directe avec les transports en commun, le vélo et les taxis. Notre service, Autolib', va probablement pâtir de cette arrivée.»

François Gindre estime toutefois que car2go présente des inconvénients. «Le périmètre d'exploitation [la ville de Lyon] et la tarification de car2go en font en effet un service dédié aux petits trajets urbains.»

Le tarif de car2go devrait être autour de 0,42$ la minute avec un plafond de 22$ (15 ou 16 euros) pour une heure. Des tarifs supérieurs à ceux de l'autopartage.

L'expérience de Vancouver

Depuis juin dernier, les Smart de car2go sillonnent les rues de Vancouver où l'entreprise d'auto-partage, Modo, est présente depuis 15 ans. Cinq mois et quelques milliers d'abonnés à car2go plus tard, Modo ne voit pas de différences dans ses activités. «Vancouver est à ma connaissance l'une des deux villes au monde à avoir trois entreprises qui font plus ou moins de l'autopartage sur son territoire. Notre plus grand concurrent reste la voiture individuelle. Les gens savent faire la différence entre les trois», explique Tanya Paz, directrice du développement des affaires de Modo.

Celle-ci estime qu'il y a de la place pour tout le monde. «Plus les gens ont de choix pour se déplacer, plus rapidement ils se déplaceront, plus ils épargneront et plus ils seront en bonne santé.»

Autolib' et car2go sont «des produits et des services qui ne se cannibalisent pas entre eux. Ils sont complémentaires et pas concurrents, selon nous. Il y a de la place pour les deux», croit Gilles Vesco. L'agglomération lyonnaise souhaite même un accroissement de ces deux services pour desservir sa population de 1,3 million d'habitants.

Autolib' est destiné à des déplacements ne pouvant être faits en transport en commun, en taxi ou en vélo, affirment ses gestionnaires. D'où la possibilité de tirer son épingle du jeu. D'autant plus qu'une Smart ne permet pas à ses deux passagers de prendre ne serait-ce qu'un sac de voyage.

«Nous pensons qu'après une diminution importante des souscriptions à notre service, les clients reviendront vers nous avec une vision plus claire de nos avantages: des voitures de modèles variés, la possibilité de réserver une voiture, ce qui permet de planifier, des tarifs vraiment plus adaptés pour les trajets qui nécessitent vraiment l'usage d'une voiture», croit François Gindre.

S'il faut attendre avant de percevoir les effets de la concurrence à Vancouver, Modo se soucie déjà de la disponibilité de l'espace public. «La présence de car2go et l'aide au stationnement qu'il a eue de la Ville sont décevantes. Daimler est un constructeur automobile. Il leur a été octroyé les mêmes permis de stationnement en zone résidentielle et sur rue qu'à nous», signale Tanya Paz.