La Chine travaille à un calendrier «pour une interdiction» de la production et de la vente de voitures à carburants fossiles - un objectif titanesque destiné à doper dès à présent le développement de l'auto électrique. Cette décision aura des répercussions majeures sur l'industrie automobile et sur la croissance de l'auto électrique dans le premier marché automobile du monde, a prévenu un responsable politique, qui n'a pas précisé quand l'interdiction entrerait en vigueur.

Le ministère chinois de l'Industrie et des Technologies de l'information (MIIT) a «entamé des recherches» sur le sujet et «va établir un calendrier en lien avec les administrations concernées», a assuré ce week-end le vice-ministre de l'Industrie Xin Guobin.

2040 ?

Pékin se dit donc prêt à emboîter le pas à la France et au Royaume-Uni, qui ont récemment fait part de leur intention d'interdire la vente des voitures diesel ou essence sur leurs marchés d'ici à 2040.

En Chine, cette mesure viserait essentiellemen les voitures à essence; les voitures diesel y sont très rares.

«De telles mesures vont conduire à de profonds changements dans l'environnement de l'industrie automobile en Chine», a insisté M. Xin devant un forum automobile à Tianjin (dans l'Est de la Chine), selon des extraits de son discours rapportés par les médias d'État.

«Les entreprises devront (...) améliorer le niveau d'économies d'énergie des voitures traditionnelles et développer vigoureusement les véhicules à énergies propres», a martelé le vice-ministre.

Même fort vagues, les annonces du vice-ministre Xin ont contribué à faire bondir sur les Bourses chinoises les titres des constructeurs et équipementiers spécialistes de l'électrique, à commencer par BYD --le «Tesla chinois»--.

Une voiture électrique de marque BYD branchée à une borne de recharge à Pékin. Photo: AFP

Un tâche gigantesque

Quel que soit le calendrier envisagé par les autorités chinoises, le défi à relever s'annonce herculéen: 28 millions de véhicules (dont 24,38 millions de voitures individuelles) ont été vendus l'an dernier en Chine, en hausse de 14%.

Sur ce total, les voitures propres représentent encore une goutte d'eau (1,7%), mais le créneau est attractif: les ventes de véhicules «à énergie nouvelle» ont ainsi bondi de 53% en Chine en 2016, à 507 000 unités, grâce à des primes gouvernementales et à des facilités d'immatriculation.

Le régime communiste a entrepris de sabrer les incitations pour les consommateurs, et veut désormais forcer la main aux constructeurs: il a introduit en juin un projet de règlement pour leur imposer un quota de «voitures propres» qui débuterait dès 2018.

Il s'agirait d'un système complexe où chaque véhicule vendu représenterait un certain nombre de crédits, plus généreux pour les voitures électriques. Avec pour obligation pour un constructeur d'accumuler dès l'an prochain 8% de crédits «véhicules verts» sur le total de ses ventes.

En Chine il y a la loi et il y a la vraie vie: deux voitures à essence sont stationnées illégalement dans des places réservées aux voitures électriques. Photo: AP

«Le monde suivra»

«C'est un processus de long cours», observe Cui Dongshu, secrétaire général de l'influente Association chinoise des voitures individuelles. «Il sera difficile d'arrêter la production de véhicules traditionnels à carburant sur les deux prochaines décennies» et au-delà, la tâche restera particulièrement ardue pour les poids-lourds, indique-il à l'AFP.

Si la Chine dit non aux moteurs à combustion, le reste du monde suivra, car personne ne peut ignorer la Chine, c'est un trop gros marché», souligne Bill Russo, directeur du cabinet GaoFeng Advisory à Shanghai.

Pour lui, Pékin veut faire en sorte que le déclin du moteur à combustion «intervienne selon un calendrier qui permette aux constructeurs chinois d'élaborer leurs solutions». «Doper l'électrification, c'est aussi aplanir le marché pour les marques chinoises», auxquelles fait défaut l'avancée technique des occidentaux, estime-t-il.

Inquiétant pour Volkswagen et d'autres constructeurs

Tout cela a de quoi inquiéter certains groupes automobile, comme l'allemand Volkswagen (4 millions de véhicules vendus en Chine l'an dernier), et inciter l'ensemble des constructeurs à gonfler au plus vite leur offre de voitures propres dans l'Empire du milieu.

La politique entrera en application «dans le futur proche», a confirmé M. Xin ce week-end, selon l'agence officielle Chine nouvelle.

Volkswagen --de concert avec les autres allemands-- mène un combat d'arrière-garde pour retarder le déclin du en Europe, tout en développant son offre électrique. En Chine, Volks a conclu une coentreprise avec le chinois JAC pour rattraper son retard et vise «400 000 ventes de véhicules hybrides et électriques d'ici 2020 et 1,5 million d'ici 2025».«La version finale (du quota) n'est pas encore publiée, mais nous travaillerons dur pour le respecter. Ce n'est pas facile, on est déjà en septembre», a confié à l'AFP Christoph Ludewig, porte-parole de Volkswagen en Chine, faisant état des «efforts colossaux» de l'entreprise.

L'américain Ford, lui, assure que 70% de ses modèles vendus en Chine seront disponibles avec l'électrification en option d'ici 2025, et vient d'établir une joint-venture dédiée à l'électrique avec le chinois Zotye: «Une stratégie agressive pour proposer une gamme complète» de l'hybride au 100% électrique, insiste Anderson Chan, porte-parole de Ford en Chine.